Figure mythique de la Légion étrangère et de la France libre, le prince Amilakvari (1906-1942) est entré dans la légende des grands combattants par ses faits d’armes lors de la Seconde Guerre mondiale.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, aucun livre ne lui avait été consacré avant cette première biographie écrite par Jean-Paul Huet, officier de réserve citoyenne Terre. Publié par les éditions Lemme en 2018, en raison de son succès, cet ouvrage a fait l’objet en 2022 d’une deuxième édition revue et augmentée. À travers ce livre, on découvre le portrait atypique de ce soldat de la France libre qui a tant magnifié les valeurs ancestrales de la Légion étrangère. Au fil des pages, on suit celui qui fut surnommé par ses hommes « Bazorka », de son parcours initiatique en Afrique du Nord jusqu’à sa mort au champ d’honneur à El Alamein en 1942.
Né dans une famille princière géorgienne, Dimitri Amilakvari et sa famille ont quitté forcés leur pays agressé par l’Armée rouge en 1921. Arrivé en France, souhaitant poursuivre la tradition militaire de ses aïeux et notamment de son père, le jeune Dimitri embrasse la carrière des armes et intègre Saint-Cyr en 1924 en tant qu’officier-élève étranger. En 1926, le jeune officier rejoint la Légion étrangère. Dans les années 1930, au sein du 4e REI, Il connaît sa première épreuve du feu lors de la campagne de pacification du Maroc. Au début de la Seconde Guerre mondiale, on le retrouve avec la 13e DBLE dans la campagne de Norvège (printemps 1940) où il s’y distingue notamment à Narvik ; il démontre de vraies qualités de chef et s’impose auprès de ses hommes. Homme de terrain, il n’hésite pas à prendre des initiatives. Cité à trois reprises, il reçoit la Légion d’honneur. Revenu en France en raison des événements de mai-juin 1940, avec la 13, il rejoint Londres. Il s’engage au sein des FFL le 21 juin 1940. Pour expliquer son ralliement, il déclare « qu’il doit tout à la France et ce n’est pas au moment où elle a besoin de lui qu’il l’abandonnera ». Somme toute, il fait le choix de la reconnaissance. Il participe à tous les combats, en Afrique (campagne d’Érythrée), en Syrie et en Libye. Néanmoins, comme beaucoup de ses camarades, c’est douloureusement qu’il vit les combats fratricides. Ainsi, il refuse de se battre au Gabon faisant jouer une clause de conscience qui fait référence au contrat signé le 1 juillet 1940 qui stipule « qu’en aucun cas les volontaires ne pourront être mis dans le cas de combattre des troupes françaises ». Pendant la campagne de Syrie, il fait le nécessaire pour éviter les affrontements avec ses camarades du 6e REI. Pour Amilakvari, il existe un principe immuable « La Légion ne se bat pas contre la Légion ». Il prend le commandement de la 13 en 1941 au grade de lieutenant-colonel. C’est alors un officier supérieur respecté et admiré. Pouvant se montrer parfois dur et exigeant, il n’en reste pas moins que pour ses légionnaires, c’est un chef parfait, un véritable meneur d’hommes, compétent, que l’on pouvait suivre les yeux fermés et pour lequel chacun de ses hommes aurait donné sa vie sans hésiter.
Second du général Koenig à la célèbre bataille de Bir Hakeim, il s’y montre d’une grande efficacité. Par son audace, son coup d’œil, ses prises d’initiative et son impétuosité dans l’action, il galvanise en permanence ses légionnaires, leur permettant d’accomplir l’un des plus beaux faits d’armes de la 13e DBLE. Enfin, c’est dans le désert brûlant de Bir Hakeim qu’il prononce cette magnifique phrase, lourde de sens : « Nous, étrangers, n’avons qu’une seule façon de prouver à la France notre gratitude pour l’accueil qu’elle nous a fait, c’est de mourir pour elle. ». Le 10 août 1942 à El Tag, en Égypte, il reçoit la croix de la Libération des mains du général de Gaulle.
Le 23 octobre 1942, on retrouve le lieutenant-colonel Amilakvari à El Alamein. Avec la 13, la mission reçue est d’attaquer le mont Himeimat et le plateau du Naqb Rala qui dominent au sud le champ de bataille. Cette opération de diversion doit permettre au dispositif britannique, situé au nord, de porter une offensive. Malheureusement, le 24 octobre 1942, à 10h, la baraka lâche Dimitri Amilakvari. Un éclat d’obus le frappe mortellement au visage. À l’âge de 36 ans, il meurt en combattant, fidèle à son idéal et à la ligne de conduite qu’il s’était fixée. Il repose pour l’éternité au carré français du cimetière militaire britannique d’El Alamein.
Une promotion de Saint-Cyr (1954/1956) porte son nom.