samedi 7 décembre 2024

Cégétistes et Sudistes, arrêtez de faire les « Zouaves » !

Un peu de retard pour ce billet suite à un problème technique sur le site du Monde. J’aurai pensé cependant que mon billet aurait été obsolète. Eh bien non, grâce aux camarades de la CGT et de SUD qui sont restés égaux à leur image sinon à leur caricature. Et le Monde du 7 juin 2016 a aussi donné une illustration utile à mes propos sous une forme humoristique.

Ainsi, cégétistes auxquels j’associe les syndicalistes de Sud (Union Syndicale Solidaire) et FO, n’est-il pas temps d’arrêter de « faire les Zouaves » (Cf. Site du ministère de la défense sur le sens de cette expression) ? Au moins celui de l’Alma, fidèle au poste, au service de la population, a rempli sa mission de service public qui est d’alerter sur la menace de l’inondation.

En préambule, un peu d’histoire.

Qui est le zouave du pont de l’Alma (Cf. Le Figaro), ensuite qui étaient ces Zouaves, troupes de haute valeur, kabyles à l’origine mais dont l’histoire est intéressante  et finalement bien moins indigènes que j’aurai pu le croire (Cf. Wikipedia), notamment en raison d’une mauvaise prise en compte de leur religion … selon wikipedia.

On le voit bien. Ces syndicalistes en grève presque permanente sont bien loin de correspondre à ces soldats valeureux, courageux au service du pays qu’étaient ces zouaves. Je garderai donc le sens négatif à cette expression de « faire le zouave » pour le comportement sinon l‘attitude de ces syndicalistes bien peu exemplaires dans l’épreuve que vit une partie de la population française face aux intempéries. Leurs mouvements sociaux, en grande partie  catégoriels auraient sans doute suscité une bien meilleure compréhension s’ils avaient été suspendus et si nous avions vu ces grévistes contribuer concrètement et physiquement à la solidarité nationale dans cette période exceptionnelle.

Mais, compte tenu par exemple du passé de la CGT, politique, syndical, antimilitariste, est-ce surprenant ? Quand des dockers cégétistes refusent de changer des navires pour soutenir nos troupes en armement et munitions, sans d’ailleurs à ma connaissance subir de mesures de rétorsion des gouvernements de l’époque, comment ne pas voir ces syndicats comme hors du temps, hors de la réalité, archaïques et surtout politisés (Cf. En exemple cette lettre de février 2016 de la CGT au ministre des transports), bien loin de toute déontologie syndicale pour défendre les salariés. Je ne peux pas leur attribuer une quelconque éthique par ailleurs compte tenu des affaires rendues publiques sur la gestion des différents comités d’entreprises où la CGT a été notamment impliquée.

Ceci étant dit, l’action syndicale face à la loi el-Khomry soulève une problématique intéressante sur la notion d’intérêt général et donc dans ce cas de service public, sinon du service au public. La situation actuelle met en interaction une action syndicale radicale, une économie qui redémarre péniblement et une catastrophe climatique tout en étant dans le contexte d’une situation sécuritaire qui est celle de l’état d’urgence…

Violences syndicales

L’implication de cette grève radicale ne peut être ignorée en outre pour l’image de la France à la veille de l’Euro. En fonction des résultats obtenus ou pas le recours à la violence et au rapport de forces, l’action syndicale sera renforcée ou affaiblie  durablement avec sans doute à la clé, une reconfiguration salutaire des organisations dans ce cas.

En effet, l’enjeu est vital pour le gouvernement et la CGT. Dans l’état actuel du rapport de forces, il y aura un vainqueur et un vaincu bien que nous ne sommes pas à l’abri d’un compromis de façade pour ne pas perdre la face. Cette situation pose aussi la question de la responsabilité et de la mesure dont l’être humain, à titre individuel ou collectif, doit faire preuve. Que constatons-nous ? La grave catastrophe naturelle qui touche la France, et en particulier l’Ile de France aurait mérité, une prise de conscience des priorités.

Comment comprendre qu’une grève ne soit pas suspendue alors que le fonctionnement de la société est largement perturbé, faisant appel à tous les moyens publics et privés pour y faire face ? La CGT et Sud sont-ils des syndicats responsables notamment si je me réfère aux propos recueillis par les médias sur l’esprit donné à ces grèves jusqu’au-boutiste, faisant appel au chantage et aux actions violentes (Cf. Les violences inadmissibles à l’encontre du ministre de l’économie Emmanuel Macron), d’intimidation bien loin des règles de la démocratie auxquelles se réfèrent Martinez pour justifier ces grèves.

Je pourrai aussi ajouter les effets des mesures gouvernementales prises par anticipation ou en cours. Les concessions salariales ou statutaires pour limiter l’étendue des grèves (revalorisation du point d’indice de la fonction publique, augmentation des enseignants, annulation de réduction de crédits, gel des négociations dans les entreprises publiques comme la SNCF…) contribueront sans aucun doute à rendre aussi plus difficile la diminution du déficit public. Ainsi, plus de quatre milliards d’euros ont été promis en 2016 alors qu’il faut tenir l’engagement de réduction de 50  milliards d’euros des dépenses publiques pour ramener le déficit public sous les 3 % du produit intérieur brut en  2017.

Quelle autorité de l’Etat ?

Qu’en tirer comme conclusion sinon que le syndicalisme à la française issue de la seconde guerre mondiale n’est plus acceptable dans une société moderne comme la nôtre ? Cela est d’autant plus vrai que l’enjeu de ces grèves est la préservation d’intérêts catégoriels sous-jacents, avec peu de rapports avec la loi El-Khomry contestée.

C’est surtout la réaction des syndicats à leur affaiblissement programmé au bénéfice de la modernisation du dialogue social avec ce fameux article 2 qui permet aux entreprises de négocier directement avec les salariés et les syndicats présents dans l’entreprise, finalement d’adapter le dialogue social au « terrain » de l’entreprise et aux réalités, loin aussi de toute instrumentalisation politique des grèves dont on peut soupçonner légitimement un syndicat comme la CGT.

Plutôt que l’article 2, j’aurai d’ailleurs voulu une réaction ferme de nos politiques et de nos syndicalistes sur la liberté religieuse organisée au sein des entreprises et instaurée par la loi El-Khomry dans son article 1er alinéa 6 (Cf. Projet de loi du 24 mars 2016). Beaucoup évoquent la laïcité au quotidien, mais ce projet de loi installe la religion, en particulier l’islam puisqu’il s’agit essentiellement de cette religion, au sein des entreprises.

Face à cette capacité grave d’entraver le fonctionnement de la société dans le but d’empêcher le vote d’une loi, y compris en menaçant le bon déroulement d’activités internationales comme l’Euro de foot, issue de syndicats peu représentatifs du monde du travail, essentiellement concentrés dans la fonction publique et non concernés directement, l’affaiblissement de l’autorité politique et de l’Etat est un risque réel et renouvelé. Tout recul aura des conséquences importantes en cette année préélectorale.

Pour conclure, je vois deux conceptions du service public et du service à apporter aux Français. Soit vous préférez ces syndicats qui maintiennent une grève alors que les Français sont inondés, soit vous préférez ceux assurent le service public, le service du public, en tout temps et en tous lieux, comme les soldats de la République  qui, comme d’autres fonctionnaires, aident durant ces inondations, protègent aussi la population sur le territoire national et détruisent la menace à l’extérieur de nos frontières (Cf. Ce clip de l’état-major des armées du 4 juin 2016).

Général (2S) François CHAUVANCY
Général (2S) François CHAUVANCY
Saint-cyrien, breveté de l’École de guerre, docteur en sciences de l’information et de la communication (CELSA), titulaire d’un troisième cycle en relations internationales de la faculté de droit de Sceaux, le général (2S) François CHAUVANCY a servi dans l’armée de Terre au sein des unités blindées des troupes de marine. Il a quitté le service actif en 2014. Consultant géopolitique sur LCI depuis mars 2022 notamment sur l'Ukraine et sur la guerre à Gaza (octobre 2023), il est expert sur les questions de doctrine ayant trait à l’emploi des forces, les fonctions ayant trait à la formation des armées étrangères, la contre-insurrection et les opérations sur l’information. A ce titre, il a été responsable national de la France auprès de l’OTAN dans les groupes de travail sur la communication stratégique, les opérations sur l’information et les opérations psychologiques de 2005 à 2012. Depuis juillet 2023, il est rédacteur en chef de la revue trimestrielle Défense de l'Union des associations des auditeurs de l'Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale (IHEDN). Il a servi au Kosovo, en Albanie, en ex-Yougoslavie, au Kosovo, aux Émirats arabes unis, au Liban et à plusieurs reprises en République de Côte d’Ivoire où, sous l’uniforme ivoirien, il a notamment formé pendant deux ans dans ce cadre une partie des officiers de l’Afrique de l’ouest francophone. Il est chargé de cours sur les questions de défense et sur la stratégie d’influence et de propagande dans plusieurs universités. Il est l’auteur depuis 1988 de nombreux articles sur l’influence, la politique de défense, la stratégie, le militaire et la société civile. Coauteur ou auteur de différents ouvrages de stratégie et géopolitique., son dernier ouvrage traduit en anglais et en arabe a été publié en septembre 2018 sous le titre : « Blocus du Qatar : l’offensive manquée. Guerre de l’information, jeux d'influence, affrontement économique ». Il a reçu le Prix 2010 de la fondation Maréchal Leclerc pour l’ensemble des articles réalisés à cette époque. Il est consultant régulier depuis 2016 sur les questions militaires au Moyen-Orient auprès de Radio Méditerranée Internationale. Animateur du blog « Défense et Sécurité » sur le site du Monde à compter d'août 2011, il a rejoint en mai 2019 l’équipe de Theatrum Belli.
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