15 juillet 1099 : prise de Jérusalem.
Objectif principal de la première croisade dont le lancement remonte à l’appel du pape Urbain II lors du concile de Clermont (15 août 1096), la Ville Sainte est prise par les croisés conduits par Raymond de Saint-Gilles et Godefroy de Bouillon. Ce dernier parvient à s’approcher de la muraille au moyen d’une tour d’assaut protégée des flammes par une couverture de peaux d’animaux fraîchement dépecés. Selon les us et coutumes de l’époque, les vainqueurs massacrent une bonne partie de la population juive et musulmane. Cette précaution aussi sauvage qu’inutile sera lourde de conséquences dans les futures relations entre les différentes communautés qui se disputeront le contrôle des Lieux Saints.
12 juillet 1240 : bataille de la Neva
La bataille de la Neva eut lieu sur les abords sud de la rivière homonyme, où Alexandre Iaroslavitch, grand-prince de Novgorod, repoussa une expédition en provenance de Suède. Cette victoire lui valut le nom d’« Alexandre Nevski », soit « de la Neva ». La bataille fait partie des guerres novgorodo-suédoises.
Cette bataille n’a qu’une maigre source contemporaine russe, et n’a laissé aucune trace du côté suédois, la Suède étant quasiment en guerre civile à l’époque. De plus, la source ne donne aucune indication sur le déroulement de la bataille, et ne mentionne qu’un nombre de victimes très faible : côté vainqueurs trois habitants de Novgorod et une vingtaine de locaux, et « deux pleins bateaux de cadavres » du côté des vaincus. Ce manque de données laisse place à de nombreuses interprétations. De plus, des spécialistes ont recensé 26 confrontations armées entre les Suédois et les Novgorodiens à l’époque, pour ne rien dire de celles opposant les gens de Novgorod aux Norvégiens ou aux Lituaniens, ce qui relativise l’importance de la bataille.
Cette bataille, même avec une dimension magnifiée par la légende, marque effectivement le développement de l’autonomie de ce qui deviendra la Russie, par rapport à ses voisins, en l’occurrence la Suède. Avec cette autonomie croissante, le lien politique traditionnel entre les Scandinaves et les Russes se distend : au siècle précédent, de nombreux princes et princesses de Novgorod et de Kiev avaient conclu des mariages avec des membres des familles royales de Suède, de Norvège et du Danemark.
15 juillet 1410 : bataille de Tannenberg ou Grunwald (Pologne actuelle).
Les chevaliers Teutoniques sont écrasés par une coalition de Polonais et de Lituaniens en Prusse orientale.
Ecouter sur TB l’historien Sylvain Gougenheim au sujet de cette bataille.
15 juillet 1804 : première remise de la Légion d’honneur (Invalides – Paris).
Le 26 messidor an XII () a lieu en la chapelle des Invalides la toute première remise de Légion d’honneur (instituée le 19 mai 1802) par Napoléon 1er aux officiers méritants au cours d’une fastueuse cérémonie officielle, la première de l’Empire.
La remise des insignes se fait dans l’ordre alphabétique des patronymes (tous des civils), signe du respect que le nouveau régime veut manifester envers le principe révolutionnaire d’égalité. Napoléon décore pour la première fois des militaires lors de la deuxième cérémonie au camp de Boulogne le .
15 juillet 1867 : naissance du médecin et explorateur polaire Jean-Baptiste Charcot.
Né le à Neuilly-sur-Seine, Jean-Baptiste Charcot est le fils du médecin Jean-Martin Charcot, qui a laissé son nom à la maladie de Charcot. De 1876 à 1885, il fréquente l’École alsacienne, y pratique beaucoup le sport (boxe, rugby à XV, escrime). En classe de 5e, il fonde avec quinze camarades de classe les « Sans Noms », une société scolaire avec laquelle il organise en 1880 un des premiers, voire le premier, match scolaire de rugby à XV en France.
À cette même époque, il rédige les aventures d’un trois-mâts en Patagonie pour un petit journal illustré. L’été, il pratique la voile à Ouistreham.
De 1883 à 1887, il fait de nombreux voyages avec son père (pays de Galles, Shetland, Hébrides, îles Féroé, Islande, île Jan Mayen, Pays-Bas, Espagne et Maroc) et en garde une véritable phobie des pays trop chauds. En 1888, il accomplit son service militaire au 23e bataillon de chasseurs alpins en qualité de médecin auxiliaire.
En 1891, reçu au concours d’internat d’études de médecine, il fait, en qualité de médecin, un voyage en Russie avec son père.
En 1892, il achète son premier yacht (Daisy, un petit cotre qu’il rebaptise le Courlis), un sloop de 8,30 m avec lequel il apprend à régater. En 1893, son père, Jean-Martin Charcot, meurt d’un œdème du poumon. Jean-Baptiste fait construire par le chantier Bonnin à Lormont/Bordeaux son premier bateau qu’il baptise Pourquoi-Pas ? : il s’agit d’un cotre de 19,50 m (20 tonneaux). Cette même année, il est interne à l’hôpital de la Salpêtrière puis à l’hôpital Saint-Antoine à Paris.
En 1894, il fait une croisière de deux semaines. L’année suivante, il soutient sa thèse de doctorat sur L’atrophie musculaire progressive et devient docteur en médecine à la faculté de Paris, le . L’année de son doctorat, une infirmière de l’hôpital de la Salpêtrière meurt en couches en lui donnant une fille, Marie-Louise, surnommée Marion (1895-1927). Cette même année, il est également finaliste du championnat de France de rugby, au poste de pilier droit de l’Olympique, club qu’il a fondé avec des amis du Racing Club de France.
Le , il épouse Jeanne Hugo, petite-fille de Victor Hugo, divorcée de son ami d’études Léon Daudet. Cette même année, il est champion de France de rugby, toujours avec l’Olympique.
Il revend son bateau, qu’il remplace par un trois-mâts barque en bois de 26 m, le Pourquoi-Pas ? II. En 1897, il change de bateau, pour une goélette en fer de 31 m, avec moteur à vapeur, le Pourquoi-Pas ? III. En 1898, il remonte le Nil jusqu’à Assouan en compagnie du milliardaire Vanderbilt.
En 1899, séduit par les modifications et les améliorations apportées par le propriétaire intermédiaire, il rachète son ancien trois-mâts barque, le Pourquoi-Pas ? II, et va croiser dans les eaux britanniques.
En 1900, il est double médaillé d’argent aux Jeux olympiques de Paris dans l’épreuve de voile.
En 1901, il réalise des recherches nautiques, météorologiques et microbiologiques vers l’archipel des Shetland, les Hébrides et les îles Féroé.
En 1902, il est versé dans la réserve de la Marine nationale. Il acquiert une goélette en fer de 214 tonneaux (la Rose-Marine), réalise une croisière avec son épouse à l’île Jan Mayen. Puis il navigue vers l’Islande, franchit pour la première fois le cercle polaire arctique et approche des glaces.
Il a aussi acquis dans les années 1895-1900 un chalet en bois de style suisse dans la ville d’eau d’Aix-les-Bains, en Savoie.
En 1903, Jean-Baptiste Charcot fait construire à Saint-Malo un trois-mâts goélette de 32 mètres, Le Français. Pour suivre de plus près les travaux, il s’installe à proximité de Saint-Servan, dans une demeure dominant la Rance, au lieu-dit La Passagère. Il monte la première expédition française en Antarctique, qui hiverne sous le vent de l’île Wandel. Le , l’expédition quitte la péninsule Antarctique, après un hivernage sans encombre. Il s’agit du premier hivernage d’une expédition scientifique dans les Pôles après celui du belge de Gerlache sur la Belgica entre 1897 et 1899. Les objectifs scientifiques sont dépassés : 1 000 km de côtes découvertes et relevées, trois cartes marines détaillées, 75 caisses d’observations, de notes, de mesures et de collections destinées au Muséum national d’histoire naturelle. Le bateau est revendu à la marine argentine. Dès son retour en France, Charcot divorce et s’installe chez sa sœur Jeanne, avec sa fille Marion.
Le , il se remarie avec Élisabeth Marcelle Marguerite (Meg) Cléry (fille d’un célèbre avocat parisien, Léon Cléry), peintre qui l’accompagnera souvent dans ses voyages. Monique, sa deuxième fille et la première du couple, naît le . Il lance une nouvelle expédition antarctique et commence la construction du Pourquoi-Pas ? IV, bateau d’exploration polaire de 40 mètres, gréé en trois-mâts barque, équipé d’une machine à vapeur chauffant au charbon et comportant trois laboratoires et une bibliothèque.
En , Charcot part hiverner à l’île Petermann pour sa deuxième expédition polaire. De retour en , après un deuxième hivernage, l’expédition est riche en expériences scientifiques : des mesures océanographiques (salinité, sondage), des relevés de météorologie, une étude des marées, une étude du magnétisme, des collections de zoologie et de botanique confiées au Muséum et à l’Institut océanographique de Monaco. Il rapporte aussi des découvertes géographiques comme le tracé de la Terre Alexandre et une nouvelle terre, la Terre de Charcot. Les résultats de l’expédition, considérables, comprennent également le relevé cartographique de 2 000 km de côtes. Mais Charcot, victime du scorbut, revient considérablement affaibli.
En 1911 naît Martine (1911-1979), troisième fille de Jean-Baptiste Charcot. Il mène cette année-là une courte campagne océanographique en Manche. En décembre, il participe, avec le lieutenant de vaisseau Nicolas Benoit à la création des Éclaireurs de France, l’un des deux premiers mouvements de scoutisme en France — aujourd’hui Éclaireuses éclaireurs de France —, dont il est le premier président. En 1912, le Pourquoi-Pas ? IV devient le premier navire-école de la marine. De 1913 à 1936, il est président du Yacht club de France.
De 1914 à 1918, durant la guerre, Charcot est d’abord mobilisé dans la Marine, avec le grade de médecin de la Marine de première classe, et affecté à l’hôpital maritime de Cherbourg. En , il obtient de l’Amirauté britannique le commandement d’un navire spécialement étudié et construit par les Britanniques pour la chasse aux sous-marins. En 1916, il réussit à convaincre la marine militaire française de construire à Nantes trois bateaux pièges pour la lutte anti-sous-marine, armés par des équipages vêtus comme des marins civils de la marine marchande. Commandant du premier des trois bâtiments sortis du chantier baptisé Meg, il bourlingue pendant deux ans au large des côtes bretonnes et normandes sans hélas rencontrer de sous-marin allemand. Charcot termine la guerre avec les croix de guerre britannique puis française et une citation à l’ordre de l’Armée pour ses services de guerre.
De 1918 à 1925, Charcot, obtient, dans la réserve, successivement les grades d’enseigne de vaisseau, de lieutenant de vaisseau puis de capitaine de corvette avant d’être promu capitaine de frégate en 1923. Durant cette période, il assure avec son navire le Pourquoi-Pas ? IV des missions scientifiques dans le golfe de Gascogne, en Manche, dans l’Atlantique nord, en Méditerranée et aux îles Féroé, principalement pour des études de lithologie et de géologie sous-marine au moyen de dragages, dont Charcot a mis au point du matériel et des méthodes.
À partir de 1925, atteint par la limite d’âge, il ne peut plus commander le Pourquoi-pas ? — qui est commandé par l’officier de première classe des équipages Le Conniat. Bien évidemment, Charcot reste à bord en qualité de chef des missions. Il va effectuer de multiples navigations vers les glaces de l’Arctique. En 1926, il est élu membre libre de l’Académie des sciences et se voit confier une mission à la Terre de Jameson. Il explore la côte orientale du Groenland et rapporte une abondante récolte de fossiles et de nombreux échantillons d’insectes et de flore locaux.
En 1928, le Pourquoi-Pas ? IV et le croiseur Strasbourg (ex croiseur allemand KMS Regensburg) vont à la recherche du gros hydravion français, un « Latham 47 » piloté par le lieutenant de vaisseau de Robien, disparu avec le grand explorateur norvégien Roald Amundsen, lui-même à la recherche du général italien Umberto Nobile, disparu en survolant le pôle Nord à bord du dirigeable Italia dont on est sans nouvelles. Les recherches resteront vaines pour retrouver Amundsen et Robien mais Nobile est retrouvé vivant avec une partie de son équipage.
En 1929, Charcot est reçu à l’Académie de marine.
À partir de 1930, il prépare l’année polaire internationale. De 1931 à 1933, il s’occupe de la définition de la mission, de l’implantation et de l’organisation de la station du détroit Scoresby avec le concours de scientifiques, des autorités danoises locales et de la main d’œuvre du pays. En 1934, il est élevé à la dignité de grand officier de la Légion d’honneur. L’été 1934, il installe au Groenland la mission ethnographique dirigée par Paul-Émile Victor, qui séjourne pendant un an à Angmagsalik pour vivre au milieu d’une population d’Esquimaux. En septembre de cette même année, il co-fonde, avec le Muséum national d’histoire naturelle, l’aquarium et musée de la Mer de Dinard. En 1935, il revient chercher Victor et ses trois compagnons (Gessain, Pérez et Matter), puis va poursuivre l’établissement de la cartographie de ces régions. Le , un cyclone ravage les côtes de l’Islande et le bateau parvient à se réfugier dans un petit port.
En , de retour du Groenland, où il est allé livrer du matériel scientifique à la mission de Paul-Émile Victor qui vient de traverser l’inlandsis en 50 jours, après avoir rempli une mission de sondage, le Pourquoi-Pas ? IV fait une escale à Reykjavik le 3 du mois pour réparer la chaudière du bateau. Le commandant Charcot et son équipage appareillent par beau temps le pour Saint-Malo. Le une violente tempête cyclonique s’est levée et coule le Pourquoi pas ? IV sur les récifs d’Álftanes vers 5 h 30. Le bilan est de 23 morts, 17 disparus et un seul survivant : le maître timonier Eugène Gonidec, originaire de Douarnenez et surnommé Pingouin. Il racontera que le commandant Charcot, comprenant la destruction inévitable du Pourquoi-Pas ? IV sur les récifs, libéra de sa cage la mouette Rita, mascotte du bord. Le capitaine de frégate Charcot, avec à ses côtés le capitaine et officier des équipages de 1re classe Le Conniat et le maître principal pilote de la flotte Floury, restèrent à bord et coulèrent avec le navire, selon les plus pures traditions de la marine.
Jean-Baptiste Charcot, mort en mer, mais dont le corps est retrouvé, est enterré à Paris au cimetière de Montmartre, le après des funérailles nationales qui se déroulèrent à la cathédrale Notre-Dame de Paris.
15 juillet 1880 : naissance de Louise de Bettignies, résistante et agent de renseignement durant la Grande Guerre.
Louise Marie Henriette Jeanne de Bettignies est née le 15 juillet 1880 à Saint-Amand-les-Eaux. Elle est l’avant-dernière des huit enfants d’Henri-Maximilien de Bettignies (1834-1903), manufacturier de porcelaines et faïences à Saint-Amand-les-Eaux et capitaine de la Garde nationale, et de Julienne-Marie Mabille de Poncheville (1844-1927).
La famille de Bettignies est originaire de Tournai et fondatrice, en 1751 d’une manufacture de porcelaine d’art. Le grand-père de Louise de Bettignies, Maximilien Joseph de Bettignies, obtient la nationalité française en 1831. Le père, Henri-Maximilien de Bettignies, vend la Société des Produits Céramiques du Nord peu de temps avant la naissance de sa fille.
Malgré les difficultés financières de son père, Louise de Bettignies fait des études secondaires à Valenciennes chez les Sœurs du Sacré Cœur.
À partir de 1895 ses parents habitent à Lille, au 166 rue d’Isly. Louise de Bettignies part en 1898 en Angleterre pour poursuivre des études supérieures chez les Ursulines à Upton (Essex), puis à Wimbledon, chez les Ursulines, et à Oxford. La mort de son père à Lille en avril 1903 la fait revenir dans cette ville où elle termine ses études à la faculté des lettres de l’université de Lille, en 1906.
À l’issue de ses études, elle a acquis une parfaite maîtrise de l’anglais, de l’italien et de l’allemand et se débrouille en russe, en tchèque ou encore en espagnol.
Elle travaille alors comme préceptrice à Pierrefonds, puis entre au service du comte Visconti de Modrone à Milan en Italie. Elle profite de son séjour en Italie pour visiter la péninsule en 1906, alors qu’elle est chez les Visconti, elle voyage beaucoup à travers l’Italie. En 1911, elle se rend en Galicie autrichienne chez le comte Mikiewsky, près de Lemberg. De 1911 à 1912, elle se trouve chez le prince Carl Schwarzenberg, au château de Worlick.
Elle s’installe ensuite chez la princesse Elvira de Bavière, au château de Holesclau, en Autriche-Hongrie. Elle y aurait rencontré le Kronprinz Rupprecht de Bavière, qu’elle croise à nouveau en 1915 quand il commande les troupes allemandes stationnées en Belgique. C’est là qu’il lui est proposé de devenir la préceptrice des enfants de l’archiduc François-Ferdinand, héritier du trône d’Autriche. Elle décline l’offre et revient en France. De retour à Lille au début de 1914, où elle est opérée de l’appendicite, elle conduit sa mère chez un de ses frères à Bully-les-Mines, puis retourne à Lille, rue d’Isly.
À la déclaration de guerre, Louise vit dans une villa à Wissant, louée par son frère Albert. Très catholique, elle envisage à cette époque de devenir carmélite.
Lille est déclarée « ville ouverte » le 1er août 1914 et l’état-major quitte la ville le . La ville est soumise à de violents bombardements en octobre 1914. Troupes et services de l’État quittent la ville dans la confusion, laissant la place à l’abandon.
Louise de Bettignies et sa sœur Germaine Houzet vivent ensemble au 166, rue d’Isly. Leur amie, Germaine Féron-Vrau (1869-1927), responsable départementale de la Ligue patriotique des Françaises et fondatrice de l’hôpital de la Croix-Rouge les recrute toutes deux comme infirmières. Louise de Bettignies est alors âgée de 34 ans.
Traversant les ruines de Lille, Louise de Bettignies assure la navette (munitions et aliments) avec les soldats qui tirent encore sur les assiégeants. Dans les hôpitaux de fortune, elle écrit les lettres en allemand dictées par les mourants allemands pour leur famille.
Alexis-Armand Charost, évêque du diocèse de Lille, lui demande d’emporter vers la France libre le tout premier courrier de Lille, des lettres destinées à des réfugiés civils qu’elle transporte, cousues à ses vêtements ou, selon une version moins crédible, écrites sur ses jupons au jus de citron. Arrêtée par un soldat à la gare de Péronne, elle reconnaît Ruprecht de Bavière dans un groupe d’officiers. Il se souvient d’elle et lui procure un laissez-passer qui lui permet de poursuivre son voyage en toute sécurité. Elle continue son périple à travers la Belgique, les Pays-Bas et l’Angleterre. À son arrivée à Folkestone, elle est interrogée par les forces de l’ordre. Elle impressionne les services secrets britanniques par ses compétences linguistiques, son courage et son patriotisme. On lui propose alors de servir d’agente pour la Grande-Bretagne. D’après d’autres sources, c’est à son retour en France qu’elle est recrutée et retourne alors en Grande-Bretagne pour sa formation.
Louise de Bettignies s’initie en quelques jours au rudiment de l’espionnage lors d’un stage à Folkestone[18]. Elle prend le pseudonyme d’Alice Dubois, employée d’une société d’import-export en France libre et est ensuite exfiltrée en zone occupée, où elle monte avec son amie Léonie Vanhoutte, dite Charlotte Lameron, un vaste réseau de renseignements dans le Nord de la France pour le compte de l’armée britannique et de l’Intelligence Service. le réseau Ramble (pour les Britanniques) ou Alice.
En 1915, elle construit, en deux semaines, sur 40 km de front autour de Lille derrière les lignes allemandes, le réseau de renseignement qui se révélera le plus étendu et le plus efficace de toute la guerre. Elle dirige de 80 à 100 personnes appartenant à toutes les couches de la société du département du Nord. On estime qu’elle sauve la vie de plus d’un millier de soldats britanniques pendant les 9 mois de sa pleine activité (janvier à ).
Avec Léonie Vanhoutte, elle centralise des informations sur les opérations de l’armée allemande qui, via la Dame blanche, le réseau de renseignements belge de Walthère Dewé, sont transmises aux Britanniques par les Pays-Bas restés neutres. Le réseau organise aussi des passages de frontière, l’hébergement, l’observation des mouvements de trains, de troupes et de matériel, mais aussi du passage de courriers et, parfois, de presse clandestine.
Louise de Bettignies se rend une fois par mois à Folkestone avec des messages écrit sur un papier à cigarette à la plume fine, ce qui permet d’écrire plus de deux mille mots dans un alphabet spécial. Ces messages sont ensuite cousus dans l’ourlet d’un sac à main ou d’un vêtement, roulés autour d’une baleine de corset, glissés dans des cheveux, mêlés au tabac d’une cigarette, mis dans le creux d’un bouton ou d’un talon de soulier[9]. Pour ces expéditions, elle traverse la Belgique puis franchit la frontière hollandaise avec un passeur ou une passeuse.
Le réseau Alice signale le jour et l’heure de passage à Lille du train impérial transportant l’empereur Guillaume II en visite secrète sur le front. Lors de l’approche de Lille, des avions anglais bombardent le train, mais manquent leur cible. L’un des derniers messages de Louise de Bettignies annonce la préparation d’une gigantesque attaque allemande pour début 1916 sur Verdun. L’information est relayée au commandement français, mais celui-ci refuse d’y croire.
Léonie Vanhoute est arrêtée en septembre 1915. Le , Louise de Bettignies se rend tout de même à Bruxelles avec le courrier pour l’Angleterre. Au poste de Froyennes, près de Tournai, elle doit prendre le train. Ce jour-là, la garde allemande fouille toutes les femmes dans une salle du Café du Canon d’or. Le cocher passe sans encombre avec le courrier caché dans la banquette. Une jeune fille, embarquée en route, est dévêtue et rudoyée. Louise dégrafe sa robe dans le dos tout en faisant glisser sa bague, en retirer un pli et l’avaler à l’insu des contrôleuses. Malheureusement, un soldat qui s’essuie les mains derrière la porte vitrée d’une autre salle réalise le geste et donne l’alerte. Refusant d’absorber un vomitif, Louise de Bettignies reçoit un violent coup de crosse à la poitrine dont la lésion serait à l’origine de sa mort, trois années plus tard. Elle est arrêtée par les Allemands le et enfermée à la prison de Tournai. Les allemands font le rapprochement entre les deux femmes bien qu’elles prétendent ne pas se connaître.
Elle est jugée expéditivement et condamnée à mort pour trahison le par le conseil de guerre à Bruxelles. Une peine de 15 ans de travaux forcés est prononcée pour Léonie Vanhoutte.
« La décision du conseil de guerre n’est pas discutable. J’accepte ma condamnation avec courage. Lors de mon opération, j’ai envisagé la mort avec calme et sans effroi, j’y joins aujourd’hui un sentiment de joie et de fierté, car j’ai refusé de dénoncer qui que ce soit, et j’espère que ceux que j’ai sauvés par mon silence m’en sauront gré. » (Lettre envoyée à la supérieure des Carmélites d’Anderlecht).
Dans une lettre adressée au gouverneur de Belgique, le général Moritz von Bissing, Louise de Bettignies demande la libération de ses co-accusés. Face à la condamnation internationale des exécutions d’Edith Clavell et Gabrielle Petit, la sentence est commuée en travaux forcés à perpétuité.
La notoriété et le prestige de Louise de Bettignies sont alors déjà considérables en France et en Grande-Bretagne. La veille de son arrivée à Sieburg, elle est citée à l’ordre de l’armée le 20 avril 1916 par le général Joseph Joffre.
Elle est détenue avec Léonie Vanhoutte dans la forteresse de Siegburg, près de Cologne. Elle y fait de l’opposition, refusant de parler ou de travailler pour l’industrie de guerre allemande. Cette attitude lui vaut des conditions de détention plus dures. Elle est mise à l’isolement pour incitation à la mutinerie dans un cachot noir et humide dont elle ressort mourante.
Louise de Bettignies meurt, après 3 ans de détention, le , des suites de sa mise à l’isolement, d’une absence de soins volontairement décidée par Herr Dürr, ancien officier prussien réformé et directeur de la forteresse, et d’un transfert trop tardif à l’hôpital Sainte-Marie de Cologne où elle meurt à la suite d’un abcès pleural mal opéré. Elle est enterrée au cimetière de Westfriedhof.
Sa dépouille est rapatriée le et, le , des funérailles solennelles sont organisées à Lille au cours desquelles elle est décorée à titre posthume de la croix de chevalier de la Légion d’honneur décernée en octobre 1918, de la croix de guerre 1914-1918 avec palme et de la médaille militaire britannique, et est faite officier de l’ordre de l’Empire britannique. Son corps est inhumé au cimetière de Saint-Amand-les-Eaux dans le caveau familial.
Léonie Vanhoutte est libérée quelques semaines après la mort de Louise et décorée de la croix de guerre en 1919. Le journaliste Antoine Rédier l’interroge pour son livre La Guerre des femmes sur le réseau Alice. Ils se marient en juillet 1934. À la fin des années trente, Léon Poirier réalise le film Sœur d’armes, sur base du livre d’Antoine Rédier.
Décorations :
- Chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire et à titre posthume (décret du 7 octobre 1918)
- Croix de guerre –, palme de bronze (1 citation à l’ordre de l’armée le 20 avril 1916)
- Médaille militaire (Royaume-Uni)
- Officier de l’Ordre de l’Empire britannique
15 juillet 1918 : début de la seconde bataille de la Marne.
Pressés d’en finir et hypnotisés, comme en 1914, par Paris qu’ils menacent à la fois par la vallée de l’Oise au nord, par les vallées de l’Ourcq et de la Marne à l’est, les Allemands décident une nouvelle offensive, plus formidable encore. C’est le « Friedenssturm » ou « offensive de la paix ».
Ludendorff projette, par une attaque frontale, de séparer les armées alliées du nord de celles de l’est, en tournant d’une part, Verdun par Sainte-Menehould et la vallée de l’Aisne supérieure, d’autre part, Reims et la montagne de Reims par la vallée de la Marne.
Pendant toute la journée du , malgré les épais rideaux de fumée qui les dissimulent, les avions alliés repèrent les ponts jetés sur la Marne et les bombardent à faible altitude. Ils en détruisent plusieurs et précipitent les troupes et les convois dans la rivière.
Ensuite, ils attaquent à la mitrailleuse les troupes qui ont débouché sur la rive sud. Trente passerelles moins vulnérables sont installées. Malgré un léger avantage tactique acquis au sud-ouest de Reims et sur la Marne, l’offensive de Ludendorff a complètement échoué en Champagne. Renonçant à tourner Reims par l’est, il cherche à déborder la montagne de Reims par le sud.
Il tente une manœuvre périlleuse, dictée autant par la témérité que par la méconnaissance des ressources des Alliés qu’il croit épuisées, et s’acharne en direction d’Épernay. Ludendorff jette ses troupes sans compter, s’efforçant ainsi d’atteindre le but fixé. Il lance par cinq fois, en cinq endroits différents, de grosses attaques, mais dans l’ensemble, il est repoussé.
En effet, auparavant, entre le 11 et le , le 2e corps d’armée italien s’était déployé le long de la rivière Ardre (Marne), intégré dans la Ve armée française. Le général Albricci établit son état-major à Hautvillers. À partir du , lors des violents combats de Bligny, les troupes italiennes parviennent à stopper l’offensive au prix de 4 000 morts et 4 000 prisonniers, empêchant l’armée allemande de s’emparer de son objectif sur ce secteur du front, à savoir la ville d’Épernay. Dans la vallée de l’Ardre, Ludendorff doit même se défendre contre des retours offensifs.
15 juillet 1927 : mort à 59 ans de la comtesse Constance Markievicz (Irlande).
La comtesse Constance Markievicz, de son nom de baptême Constance Georgine Gore-Both, est une révolutionnaire et femme politique nationaliste irlandaise née le à Londres et morte le à Dublin.
Issue de l’aristocratie anglo-irlandaise, elle n’était pas prédestinée à prendre la défense des plus pauvres et à adhérer à la cause nationaliste. Elle s’illustre pourtant en prenant les armes pendant l’insurrection de Pâques 1916, à la suite de quoi elle effectue plusieurs séjours en prison. Elle est élue députée au Dáil Éireann en 1918 puis occupe le poste de ministre du Travail dans le gouvernement révolutionnaire irlandais. Pendant la guerre civile irlandaise, elle soutient le camp anti-traité, puis retrouve son siège de députée en 1927 sous l’étiquette du Fianna Fáil avant de mourir peu après.
En raison de son titre de comtesse et de ses opinions, Markievicz est parfois surnommée « la Comtesse Rouge ». Avec Maud Gonne, elle est une des femmes les plus admirées de l’histoire de l’Irlande.
En 1908 elle rejoint le Sinn Féin, fondé le par Arthur Griffith. Ce parti politique, dont le nom en gaélique signifie « nous-mêmes », prône l’abstention de toute collaboration politique avec l’administration britannique et une résistance non-violente. L’année suivante, elle crée la section jeunesse de l’Irish Republican Brotherhood (IRB) : NaFianna Eireann. En 1911, elle est arrêtée en compagnie d’Helena Moloney, une autre comédienne de l’Abbey Theatre, pour avoir manifesté contre la venue du roi George V en Irlande. Puis elle se joint a Maud Gonne, James Connolly et James Larkin dans la lutte pour contraindre les autorités à étendre la loi de 1906 sur les repas scolaires à l’Irlande. En 1913, elle participe au programme d’alimentation pour les enfants pauvres de Dublin et à l’organisation d’une cantine dans le « Liberty Hall » pendant le lock-out des ouvriers syndiqués. Cette même année, elle devient trésorière de l’Irish Citizen Army (ICA).
Pendant l’insurrection de Pâques 1916 à Dublin, elle est commandant en second de l’Irish Citizen Army (ICA) et dirige la brigade féminine. Au début, elle parcourt les rues de la ville pour distribuer des médicaments aux postes de combattants. Puis, avec quatorze autres femmes, elle décide de prendre les armes. Elle est la seule femme officier en uniforme et participe aux combats comme sniper au jardin public de St Stephen’s Green. Selon le témoignage d’une infirmière à l’époque, elle abat Michael Lahiff, un policier irlandais sans arme de la Dublin Metropolitan Police, âgé de 23 ans et qui s’approchait de rebelles dans ce parc. L’identité de l’assassin du jeune policier demeure toutefois incertaine et contestée.
Arrêtée, elle est internée à la prison d’Aylesbury en Angleterre, puis à Kilmainham, où elle peut entendre les exécutions des seize dirigeants de l’insurrection. Elle-même est accusée de haute trahison et condamnée à mort par la cour martiale britannique, peine commuée en détention à perpétuité, la peine de mort n’étant pas appliquée aux femmes.
Après l’amnistie générale de 1917, Constance Markievicz est libérée au mois de juin. Son retour en Irlande prend l’allure d’un véritable triomphe. Rare survivante combattante de l’insurrection, les Irlandais la considèrent comme l’héroïne de leur pays ; elle intègre la direction du Sinn Féin. Son incarcération va lui donner un autre motif de combat : l’amélioration des conditions de détention des prisonniers politiques.
En 1918, elle est de nouveau arrêtée et emprisonnée pour six mois à prison de Holloway, à Londres, de même que Maud Gonne. Cet emprisonnement est motivé par son combat contre la conscription des Irlandais et leur incorporation dans l’armée britannique. C’est pendant cette incarcération qu’elle est élue députée du Sinn Féin à la Chambre des communes, profitant de la ratification du Qualification of Women Act (accession des femmes aux élections). Elle s’était présentée aux élections générales pour le Sinn Féin dans le quartier Saint-Patrick, à Dublin.
Constance Markievicz devient ainsi la première femme élue au Parlement britannique, bien qu’elle n’y siège jamais. En effet, les élus du Sinn Féin refusent de siéger à Westminster et rejoignent le Dáil Éireann (parlement) à Dublin. Le , elle est ministre du Travail, dans le gouvernement révolutionnaire d’Éamon de Valera. En 1922, hostile au traité de paix du 6 décembre 1921 entre l’Irlande et la Grande-Bretagne, qui reconnaît l’indépendance de l’État libre d’Irlande mais qui consacre la partition de l’île et permet au roi George V de conserver le titre symbolique de « roi d’Irlande », elle démissionne de son poste et part aux États-Unis pour promouvoir la cause des nationalistes républicains hostiles au traité et récolter des fonds. Pendant la guerre civile irlandaise (mai 1922 – juin 1923), elle reprend les armes (contre le gouvernement irlandais), puis est réélue au Parlement en 1923. Comme d’autres républicains, elle refuse de prendre son siège au Parlement irlandais. Elle est arrêtée en novembre 1923, puis relâchée à la suite d’une grève de la faim. Elle adhère au Fianna Fáil au moment de sa création en 1926, et est réélue députée en 1927.
Elle décède le à l’hôpital Patrick Dunn à Dublin, des suites d’un cancer ou de la tuberculose. Les Irlandais vont s’incliner devant sa dépouille pendant 48 heures ; elle est inhumée au cimetière de Glasnevin, à Dublin, non loin de Maud Gonne, Daniel O’Connell, Charles Stewart Parnell, James Larkin, Michael Collins et d’autres.
15 juillet 1974 : coup d’État militaire à Chypre.
La Turquie, membre de l’Otan depuis 1952, envahit la partie Nord de l’île le 20 juillet craignant une union de l’île avec la Grèce.
