Le rapport d’information n°2048, rendu par la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale, porte sur le projet de loi de finances 2026, spécifiquement le volet « Défense – Préparation et emploi des forces Air ». Il analyse à la fois les grandes tendances budgétaires, les enjeux capacitaires, humains et technologiques de l’Armée de l’air et de l’espace (AAE), ainsi que les défis stratégiques à court et moyen terme.
Contexte et objectifs budgétaires
- Pour 2026, l’effort budgétaire pour la défense connaît une nette augmentation, dont une part significative vise l’AAE : 4,38 milliards d’euros en autorisations d’engagement contre 3,33 milliards en 2025, et 3,761 milliards en crédits de paiement contre 3,53 milliards en 2025.
- La montée en puissance budgétaire est destinée notamment à la capacité d’alerte avancée, au renouvellement des systèmes sol-air, à l’accroissement de la flotte A400M et à la préparation de la future aviation de transport et d’assaut.
État des capacités et missions récentes
- En 2025, l’AAE a été fortement mobilisée pour des missions variées : posture de dissuasion nucléaire permanente (Rafale, MRTT, ASMP-A rénové), posture de sûreté aérienne (détection, interception, lutte anti-drones, sécurité de grands événements), et missions de service public (opération Sentinelle, recherche et sauvetage, lutte contre les incendies, secours aux personnes, soutien biomédical, transport aérien).
- La flotte d’avions de chasse demeure sous-dimensionnée (environ 230 avions sont jugés nécessaires), entraînant la mutualisation forcée des appareils pour missions conventionnelles et stratégiques, risquant d’affaiblir certaines postures en cas d’alerte.
- Le renouvellement capacitaire se poursuit (livraisons MRTT, modernisation de l’ASMP-A, commande de GlobalEye comme successeur de l’Awacs).
Ressources humaines
- Après une période de départs élevés, la tendance au recrutement est en nette hausse (+2,5% en 2024, +6,4% en 2025, +4,7% prévu en 2026).
- La cible à 40 000 aviateurs à l’horizon 2030 se rapproche, mais des points de vigilance subsistent sur certains métiers critiques (numérique, personnels navigants, contrôleurs aériens, formateurs).
- Des politiques de fidélisation (primes spécifiques) sont recommandées pour sécuriser ces viviers.
Principaux enjeux et points de vigilance
- Disponibilité matérielle : La disponibilité des aéronefs reste contrastée (65% selon données de 2022), et l’effort sur le maintien en condition opérationnelle (MCO) est renforcé, bien que le gouvernement ne publie plus de statistiques détaillées.
- Les contrats verticalisés pour le MCO (RAVEL, BALZAC, CHELEM) améliorent la disponibilité, mais le retrofit de Rafale au standard F4, la montée en puissance de la flotte A400M, et le vieillissement de certaines flottes (C-130, Casa CN235, Puma Air) sont des contraintes majeures.
- Equipements nouveaux et infrastructures : Les investissements concernent aussi infrastructures aéronautiques, équipements de protection passive des bases, innovations numériques et spatiales.
- Surveillance de la très haute altitude et de l’espace : Il est recommandé de renforcer la capacité d’alerte spatiale avancée (radar Nostradamus, satellites de détection infrarouge, radars UHF longue portée), en coopération européenne (projet Odins Eye, JEWEL).
Défis stratégiques et recommandations
- Face à une menace aérienne multiforme (drones, missiles hypersoniques, furtivité), la défense aérienne doit être multi-couches, intégrée, et réactive, impliquant une sophistication accrue des capteurs et des effecteurs (moyens de lutte anti-drones, systèmes sol-air, intercepteurs, protection passive des bases).
- La France doit récupérer rapidement une capacité offensive de suppression des défenses aériennes ennemies (SEAD), perdue depuis l’abandon du missile Martel. Le développement accéléré de nouveaux missiles de croisière et la reconnaissance de Dassault Aviation comme leader du pilier NGF (SCAF) sont jugés critiques.
- L’interopérabilité européenne est encouragée (consortium EISNET pour la norme ouverte C2-senseurs), afin d’améliorer les performances de la défense anti-missile et de partager en temps réel les données sur les menaces.
Conclusion
- Le rapport salue l’effort budgétaire, mais insiste sur la nécessité de démutualiser les missions poste-dissuasion, d’améliorer la disponibilité matérielle, d’accélérer le renouvellement capacitaire, et de garantir une montée en puissance des effectifs.
- Il souligne enfin l’importance du volet offensif de la défense aérienne et du développement de la capacité SEAD, ainsi qu’une coopération européenne accrue pour une détection et une réaction anticipées face à l’évolution rapide des menaces aériennes et spatiales.






