vendredi 17 mai 2024

DIÊN BIÊN PHU : Journal de marche du 7 mai 1954 (fin de la bataille)

Concerto de l’Adieu – Extrait de la bande originale du film de Pierre Schoendoerffer « DIEN BIEN PHU » (1992), composée et dirigée par Georges Delerue.


Nuit du 6 au 7 mai

 

18 h 00

Fin du tir des lance-roquettes multiples.

Le C-119 n° 149 touché au-dessus d’ISABELLE par la DCA perd de l’altitude et devient difficile à piloter. Il est accompagné de deux autres C-119 pilotés par des Américains.


Le C-119 de McGOVERN tente de se poser dans la nature. Ils repèrent une petite vallée sur la rivière Nam Het affluent de la Song Ma. Terrain relativement plat et au bout le village de Muong Het mais s’écrase en tentant de se poser dans la nature.

À quelques centaines de yards de la piste l’aile heurte un arbre. C’était la 45e mission de Mc GOVERN sur Diên Biên Phu. La partie avant explose ; la partie arrière se désolidarise. Le sous-lieutenant ARLAUX est gravement blessé (fracture de 4 vertèbres lombaires) et fait prisonnier. Moussa, autre largueur, blessé à la jambe, ne survivra pas en captivité.

Les deux autres largueurs sont morts avec les pilotes BATAILLE et RESCORIO.

Le sous-lieutenant ARLAUX sera libéré le 13 octobre 1954. Il pèsera 38 kg. 


BILAN Santé du 1er au 06 mai :

  • ACM 29/44 : 47 entrants, 14 opérés, 5 décédés.
  • ACP 3 : 43 entrants, 21 opérés, 7 décédés.
  • ACP 6 : 15 entrants, 4 opérés, 2 décédés.
  • ACP 5 : 56 entrants, 42 opérés, 12 décédés.

Pourcentages de décès par rapport au nombre d’entrants : 16,1 %.

Pourcentages de décès par rapport au nombre d’opérés : 32 %.

Bilan général du 13 mars au 6 mai :

  • Mars : 1 153 entrants, 188 opérés, 316 évacués dont 19 PIM, 120 décédés.
  • Avril : 1 351 entrants, 665 opérés, 173 décédés.
  • Mai : 161 entrants, 81 opérés, 26 décédés.
  • TOTAL : 2 665 entrants, 934 opérés, 3 165 évacués, 319 décédés.

Des concentrations d’obus sur ELIANE 4, ELIANE 2, DOMINIQUE 3 et sur CLAUDINE 5. Harcèlement intense sur l’ensemble de la position.

Durée du bombardement 3/4 d’heure puis les Viets attaquent.

Le char POSEN est envoyé sur ELIANE 4.

La colonne CRÈVECŒUR serait à 50 km de la cuvette.

18 h 30

Poursuite des travaux d’organisation du terrain. Mouvements signalés en fin de journée sur la face Est.

Harcèlement intense de la position avec consommation 1 250 coups de 105 mm, 250 coups de 120 mm, 300 coups de 75 mm, de très nombreux coups de 81 mm.

18 h 45

ELIANE 2 : le premier assaut Viêt a été lancé sur la face Sud-Ouest pour prendre à revers les défenseurs.

Le DLO d’ELIANE 2, ROBIN, prépare les tirs d’arrêt. Il fait encore jour quand un millier de Viets sortent de terre et se lancent vers les barbelés. Toute l’artillerie au profit d’ELIANE 2. Quand les premiers rangs ennemis atteignent les barbelés, le décompte du DLO annonce zéro et les obus explosent sur le bataillon Viet à découvert.

Après la fumée, il y a 200 corps sur le terrain et les autres se replient.

La valeur d’un bataillon ennemi (BAT 98) a été décimée devant les barbelés par deux sections. En face, 2 compagnies du 1er BPC.

19 h 00

Il fait nuit mais les lucioles se mettent en place.

Les vagues d’assaut sur ELIANE 2 se succèdent à une demi-heure les unes des autres, elles portent maintenant sur les 4 faces du point d’appui, dans les intervalles, le bombardement est intense.

Les dernières forces de l’artillerie sont pour ELIANE 2.


Sans appuis d’artillerie CLAUDINE 5 se désagrège. La 3e section de la 2e Cie du I/2 REI se replie vers CLAUDINE 2.

Harcèlement général de la position en particulier au 75 SR. Indice d’attaque en direction d’ELIANE 10 et 12 et d’ELIANE 2 et 4.

19 h 30

2 salves de lance-roquettes H6 sur les positions d’artillerie qui continuent à riposter ; tir de 4 salves supplémentaires l’artillerie se tait. 

3 pièces de 105 touchées.

Tous les commandants de compagnie, seuls sur leurs pitons assiégés, réclament des renforts, des munitions.

Mais le « Gars Pierre » n’a plus rien à leur offrir.

20 h 00

Poursuite du harcèlement à la même cadence. Nombreux mouvements suspects au Nord de DOMINIQUE 3 et à l’Est d’ELIANE. Concentration d’artillerie VM sur CLAUDINE 5 cause de très lourds dégâts.


Pilonnage des ELIANE. Les premières lignes sont au contact. Les 105 d’ISABELLE essaient d’encager ELIANE 4. Contre-batterie Viet sur ISABELLE.

ELIANE 4  : Le sous-lieutenant LATANNE est avec ses mortiers.

À la nuit tombée la position s’embrase. Les sol est labouré autour des alvéoles de ses mortiers. Les mortiers sont renversés et déréglés. Les servants orientent leurs tubes en leur donnant une inclinaison approximative.

ELIANE 2 : les obus arrosent les flancs de la colline. L’assaut est attendu sur les Champs Elysées et par un cheminement naturel situé au fond de la dépression Sud-Ouest où coule « un petit oued ». Le DLO sur ELIANE 2 – le sous-lieutenant JUTEAU – reçoit les demandes de POUGET pour détruire les pièces camouflées sur le Mont Chauve.

POUGET demande à son adjudant d’unité, le sergent-chef SERGEANT, de monter des munitions et surtout des grenades pour le corps à corps. L’itinéraire est difficile entre ELIANE 2 et le dépôt central. Les 50 m de tranchée ne sont plus qu’une dépression écrasée par les bombardements. Sur les 20 hommes de corvée (paras et coolies) un seul est indemne et arrive à amener une caisse de grenade au PC. Les autres sont blessés ou tués. Le sergent-chef SERGEANT est blessé 4 fois ! Une fois au dos, une fois à l’abdomen. Il remonte sur ELIANE 4 pose son arme et descend ELIANE 2. Le pont sur la Nam Youm étant sous le feu Viet, il traverse à la nage et atteint l’ACP de Vidal.   

21 h 00

1ère CMMLE – sous-lieutenant PINAULT : Nous avons encore 4 000 coups de mortiers en prévision du repli.

21 h 30

L’assaut est lancé par le régiment 102 de la Division 308 le meilleur de l’armée Vietminh.  Des tirs d’arrêt précis et le tir des mitrailleuses sont mis en place par le DLO. Tous les canons et les mortiers de Diên Biên Phu tirent sur les pentes d’ELIANE 2. L’attaque est stoppée ; de grosses pertes vietminh à la jumelle : estimation de 200 morts pris sous un tir de barrage stoppés net.

Reflux vers le Sud.

Salve de lance-roquettes H6 sur le PC GONO « pour effrayer ».

22 h 00

Reprise de la préparations sur la position centrale par toute l’artillerie Vietminh par 105 et 75 et tous calibres de mortiers. Harcèlement intense sur ISABELLE. 3 pièces de 105 détruites avec leurs servants sur le centre.

L’attaque est lancée sur ELIANE 4 et 10 par 2 régiments neufs des divisions 312 et 316.

Demande pour le matin de ravitaillement en munitions d’artillerie mortiers et infanterie le plus tôt possible.

Le secteur Nord-Est d’ELIANE 4 est tenu par la 2e Cie du 5e BPVN ne comportant plus que 30 hommes encaisse le premier choc.

La 3e Cie vient en appui. Les parachutistes repoussent l’attaque avec les mortiers de 81 mm des paras. Le char POSEN intervient en appui.

LANGLAIS dégarni la face Nord du camp qui n’est pas en danger et envoie 2 sections du BEP qui traversent le camp et le pont sous le feu.

Sur ELIANE 10, le 6e BPC s’effondre. Le capitaine TRAPP dispose encore de 60 parachutistes mais les reconnaissances viets s’infiltrent, de plus en plus nombreuses.

Les combats ont lieux dans le noir dans une confusion extrême.

Lieutenant ALLAIRE.

Il ne reste que 150 hommes. Les mortiers d’ALLAIRE n’ont plus de munitions ; les servants se battent comme des fantassins.

Les Dakota tournent au-dessus du camp pour larguer la 1re Cie du 1er BPC.

La décision est prise de maintenir les lucioles plutôt que l’obscurité pour le largage afin de permettre les combats sur ELIANE 10.

Tous les renforts sont rameutés de Epervier pour aider Eliane 10.

2 Cies réduites à 40 hommes (8e BPC).

Les trous dans les HUGUETTE sont comblés par ce qu’il reste des artilleurs.

 

22 h 15

Message du GONO à Hanoï : Violent matraquage sur l’ensemble de la position et en particulier sur les ELIANE et la zone d’artillerie PC par 105 et 75 mm et tous calibres de mortiers Harcèlement intense sur ISABELLE. 3 pièces de 105 hors service. Vietminh au contact sur toute la face Est. Demande pour matin ravitaillement munitions d’artillerie mortiers et infanterie le plus tôt possible.

22 h 30

Reprise de CLAUDINE 5 avec les dernières réserves du REI dont les sapeurs du bataillon.

23 h 00

8 des 9 obusiers de 105 mm d’ISABELLE sont détruits.

Sur le Camp, il reste 7 pièces de 105 et 600 coups. Sur ISABELLE, il reste une pièce et 2 000 coups.

Lieutenant André SAMALENS (1927-1954).

Le reste du 6e BPC est acculé sur ELIANE 10 par le régiment 165. Le lieutenant André SAMALENS est tué en pleine contre-attaque.

Chef de section à la Cie TRAPP, le chef MÉNAGE, 22 ans est un ancien du bataillon. Il a 15 hommes avec lui et deux mitrailleuses de flanquement qui jouent leur rôle.

Percée Viet sur le secteur de SAMALENS qui vient d’être tué.

Le chef MÉNAGE pris à revers avec ses hommes, arrive à se dégager avec 7 à 8 hommes.

ELIANE 12 est tenue par quelques sections du 31e Génie.

Sur ELIANE 2, 3 heures de répits ont permis de creuser plus profond les tranchées.

Le char BAZEILLES, sur ELIANE 2, hors service par une roquette continue de tirer à la 12.7 mm. Il tirera les dernières cartouches d’ELIANE 2.


La compagnie spéciale 83 du régiment 151 (génie) de la division 351  du 20 avril au 6 mai a creusé une galerie de 40 m sous la colline. Sape pas assez profonde.

Une erreur de 20 m. Les Cies de 1er échelon doivent profiter de l’état d’hébétude dans lequel se trouvent les rescapés du 1er BPC.

ELIANE 2 : Un large frisson parcourt la croupe de la colline, la terre tremble, un énorme geyser de terre et de fumée. La sape creusée par le Viet Minh sous la position depuis le 3 mai saute, 1 tonne d’explosifs : la 2e Cie du 1er BPC est ensevelie, disparue enfouie sous les décombres, déchiquetée par l’explosion.

Le Vietminh se lance à l’assaut Régiment 174 mais, englué dans la boue, il glisse sur la pente. Les Viets envahissent le point d’appui par l’Est. Ils occupent les lèvres de l’entonnoir. Les Viets relancent un matraquage au canons de 105, l’explosion n’ayant pas réalisée tous les objectifs. 

Seule la 2e section est aspirée par l’explosion.

Les rescapés de la 2e Cie, 5 hommes dont des blessés, lancent toutes leurs armes automatiques et fauchent la vague d’assaut.

Contre-attaque du capitaine POUGET depuis le haut qui reprend de blockhaus en blockhaus.

Au 1er BPC, le capitaine EDME est dans son abri PC avec le lieutenant FESSELET. Ils sont secoués, le sol tremble et une masse de terre, de roche et de débris retombe sur les hommes.

Une contre-attaque de la 3e compagnie a réoccupé le sommet jusqu’au bord du cratère, un cratère de 50 mètres de diamètre.


CLAUDINE 5, à la pointe Sud-Ouest du camp, est en danger, matraqué depuis deux heures. Attaque du régiment 102.


1 310 blessés : 490 couchés, 820 assis.

23 h 15

Privateer 28F7 traite un objectif sur demande de TORRI Rouge à 2,5 km au nord-est du « T » lumineux. Un autre Privateer et quatre B-26 larguent des bombes de 250 livres.

Bombardement de la RP41 par 4 B-26 du Tunisie. Grosse explosion rouge sur un convoi de camions.

Les équipages des C-119 réalisent 2 rotations dans la nuit. En 6 jours, 950 tonnes ont été larguées.

Minuit

Situation critique : munitions de 120 pratiquement épuisées, reste moins de 500 coups. Situation ELIANE 2 très confuse. ELIANE 10 enfoncée. CLAUDINE 5 attaquée. JUNON tâtée sérieusement. 1 pièce de 105 en état à ISABELLE, 7 à Diên Biên Phu.

Artillerie :

  • Diên Biên Phu : 7 pièces de 105 en état
  • Isabelle : 1 pièce de 105 en état.

1ère CMMLE du sous-lieutenant PINAULT (annonce au téléphone) : Nous cessons le feu. Plus de munitions ». A 21 h 00 nous avions encore 4 000 coups de mortiers. Nous allons nous coucher après 4 jours sans sommeil et la nourriture manquant depuis 2 jours.


CLAUDINE 5 matraquée depuis 2 heures.

Les légionnaires de la 2e Cie du 1er REI résistent difficilement à l’assaut du régiment 102. Rapport de force 1 contre 10.

ETTLINGEN envoyé en renfort (adjudant TOFFOLO) Rouge  avec une unité de légionnaires de la 2e Cie 1er REI.

Traversée de CLAUDINE 4. Mise en poste à 100 m de CLAUDINE 5 pour appui des légionnaires, une section en recueil et en protection.

Les Viets occupent la partie Ouest de la position.

ELIANE 10 : le chef MÉNAGE est blessé à la jambe gauche par une grenade. Son tireur FM est tué. Pas d’évacuation, pas de soins, juste le pansement individuel.

02 h 00

CLAUDINE 5 tombe au milieu de la nuit.


Situation critique ; il reste 100 obus de 120. Quelques éléments tiennent toujours sur ELIANE 2 et dans la partie Sud ELIANE 10. CLAUDINE 5 a dû être évacuée. Un bouchon tient la tranchée au plus près des barbelés. Neutralisation par artillerie d’ISABELLE et Diên Biên Phu. Colmatage en cours sur ELIANE 10.


Pression très forte sur CLAUDINE 5.

Sur ordre du commandant CLÉMENÇON, repli avec les survivants et abandon de CLAUDINE 5.

Devant la pression repli des défenseurs vers le char ETTLINGEN.

Retour de l’ETTLINGEN à sa position, ravitaillé en urgence.

Mission de ravitaillement de l’affut quadruple du pont Bailey en calibre 50.

Retour par le PC du GAP.

Le Dakota Zoulou Delta en Luciole sur Diên Biên Phu.

Le stock de munitions a baissé. Il reste 100 coups de mortiers de 120 ; les 7 obusiers de  105 disposent au total de 300 coups, le 105 qui débouche à 300 m sur DOMINIQUE n’a plus que 11 obus.

ISABELLE subit toute la nuit un très violent harcèlement de mortier de 120 à effet de souffle.

Sur ELIANE 4, les mortiers du sous-lieutenant LATANNE sont touchés par des coups au but. Des pièces détruites, des servants blessés, évacués vers le poste de secours.

Entre 02 h 43 et 03 h 50

Cinq C-119 décollent de Cat Bi pour ravitailler d’urgence en munitions. Trois parviennent à parachuter correctement dont le 537 du capitaine VANNIER qui reçoit par radio les félicitations du général DE CASTRIES.

03 h 00

Il reste 20 hommes sur ELIANE 10 autour de l’abri des transmissions.

La Cie du 8e Choc arrive sur ELIANE 10. Il a fallu 4 heures pour faire 600 mètres. Des contre-attaques permanentes pour dégager l’entrée du pont Bailey. Une des compagnie en renfort a été anéantie en traversant la Nam Youn. 2 petites sections de légionnaires blessés d’ELIANE 2 descendent pour renforcer ELIANE 10.

Sur ELIANE 10 comme sur ELANE 4 : Assauts après assauts, devant une marée Viet qui grouille, c’est un combat au corps à corps jusqu’à la dernière cartouche, la dernière grenade et emporté par le combat… l’engagement se termine au couteau.  

Sur ELIANE 4, la 1re vague Viet est hachée par les mortiers qui tire leurs derniers obus.

Le char ETTLINGEN est envoyé pour renforcer le POSEN sur ELIANE 4 tenu par le 2/1er RCP et le 5e Bawouan.

Marchant sur ses cadavres, l’ennemi atteint le sommet et s’infiltre à travers les poches de résistance en utilisant notre réseau de tranchées.

Les lieutenants POTIER, CORDIER et BELPOIX, avec une trentaine d’hommes, contre-attaquent.

Le sommet change de main trois fois en 3 heures.

Les Viets s’infiltrent à travers les poches de résistance en utilisant le réseau des tranchées.

Les colonnes d’assaut qui convergent vers ELIANE 4 offrent des cibles aux chars.

Malgré les tirs incessants de toutes les armes des chars et les nombreuses cibles, les vagues sont trop puissantes et ne sont pas arrêtables.

Une contre-attaque sur ELIANE 4 réussie. À l’aube ELIANE 4 est entièrement sous emprise française.

De la Cie à 60 hommes venue des HUGUETTE, arrivée sur ELIANE 4, il ne reste que l’opérateur radio, 2 parachutistes, 1 Vietnamien et 1 légionnaire.

Une contre-attaque de la 3e Cie récupère le sommet ; pendant qu’ELIANE 4 (2/1er RCP et 5e  BPVN) tombe.

04 h 00

Combats au corps à corps continuent à l’intérieur d’ELIANE 2 et 10. Harcèlement se poursuit sur ISABELLE et sur Diên Biên Phu.

ELIANE 2 tombe ; dernier élément à bout de munitions. Contre-attaque en préparation sur ELIANE 2.


Sur ELIANE 2, il ne reste que 35 hommes en état de combattre, quelques chargeurs FM et une grenade. POUGET ne peut plus joindre le PC.

Demande du capitaine POUGET de renforts d’une Cie pour ELIANE 2 ou d’autorisation de percée pour rejoindre ELIANE 3 sur un poste radio légion laissé par le capitaine COUTANT. Réponse du commandant VADOT : Vous devez rester sur place Vous êtes Parachutiste et vous devez résister jusqu’à la mort… au moins jusqu’au jour.

POUGET : Bien compris, Terminé pour moi. Si vous n’avez rien à ajouter, je détruis mon poste.  

Intrusion Vietminh sur le Réseau : Le Président Ho Chi Minh vous offre l’audition d’un disque « le Chant des partisans ». « Demain l’ennemi connaitra le prix du sang et des larmes. Ohé ! Compagnons dans la nuit la liberté nous écoute… »

POUGET écoute jusqu’au couplet et tire 3 balles dans le poste.

Au dehors un étrange silence sur ELIANE 2 les petits groupes de survivants succombent.

Il tombe un ou deux obus par minute au hasard. Dans les trous, les survivants des deux compagnies du 1er BPC sont groupés par trois ou quatre. L’excitation de la bataille est tombé… Ils ont l’air abattus, épuisés, vidés.

Assis par terre POUGET voit sortir du sol des vagues trop nombreuses. Les hommes, côte à côte sur toute la longueur des tranchées, commencent à crier Di vé Mao len Mao Mao (En avant ! vite ! vite !). POUGET donne l’ordre de se replier vers le centre au lieutenant FESSELET avec ceux qui pouvaient marcher.

POUGET et le lieutenant JULIEN se replient dans le fond d’une tranchée une grenade à la main avec quelques hommes qui se barricadent et jette sa grenade sur les Viets. Il est assommé par l’explosion et fait prisonnier.

04 h 40

Un bataillon Viet Minh envahit ELIANE 2 où les derniers défenseurs sont sans munitions. Le char BAZEILLES tire les dernières cartouches.

05 h 00

Le Dakota MS du Sénégal a largué 6 hommes. Le Dakota NX du Sénégal a largué 9 hommes. Le ZD du Franche-Comté 19 hommes. Le ZQ du Franche-Comté 17 hommes. Le 666 du Béarn 19 hommes et le 593 du Béarn 21 hommes. Au total de 91 hommes qui sont les derniers à avoir sauté sur Diên Biên Phu.

Les Dakota portant la 1ère Cie du 1er BPC, FAUSSURIER, ont reçu l’ordre du colonel LANGLAIS de rentrer à Hanoï. Le choix a été déchirant entre le parachutage des renforts et l’éclairage du champ de bataille. Si les ELIANE ne sont plus éclairés, les Viets vont s’infiltrer. La décision est prise par BIGEARD après demande au capitaine LE PAGE sur ELIANE 10. D’un côté, une Cie fraiche en renfort, de l’autre le risque d’une rupture des défenses d’ELIANE 10.

Réponse de LE PAGE : « BRUNO » de LE PAGE. Continuez à larguer les lucioles. Terminé pour moi.

SHD : Photographie oblique – position au 07 mai 1954 matin.

Les dernières lucioles tombent du ZD  se sont succédé toute la nuit le YD, le YA du Franche- Comté en début de nuit relayé par le ZB, le ZQ et en dernier le ZD


ELIANE 2 tombe. Le char MULHOUSE se rend au Pagodon pour protéger à la mitrailleuse ELIANE 3 des tirs venant des flancs d’ELIANE 2.

Le char SMOLENSK, avec sa mitrailleuse de 50, arrose les collines. Au bout de quelques minutes une salve de roquettes tombe autour. Le sergent NEY qui sert l’arme est légèrement blessé mais reprend le tir.

Le CONTI arrose à la mitrailleuse les abords d’ELIANE 12 de l’autre côté de la Nam Youm.

Le DOUAUMONT réagit à chaque attaque sur Epervier.

Tous les chars, ou ce qui l’en reste, sont engagés.

 

Vendredi 7 mai

SHD : photographie aérienne – situation le 7 mai 1954 avant l’assaut final.

 

Pendant la nuit le général DE CASTRIES a demandé le parachutage immédiat d’obus de mortiers tous calibres. 42 tonnes de munitions ont été larguées mais n’ont pu être ramassées.

État de l’artillerie au matin :

  • Obusiers de 105 mm : 8 (pertes importantes sur ISABELLE où il reste 2 pièces).
  • Obusiers de 155 mm : 1 (mais tellement usé qu’il ne peut tirer à distance).
  • Mortiers de 120 mm : 6.

 

SHD : situation d’ISABELLE.

 

Journée de mauvais temps et d’averse.

Aucun des 16 C-119 ne peut venir ravitailler (1 a tenté mais a fait demi tour météo). 22 Dakota viendront ravitailler jusqu’à 17 h 00.

28 Dakota ont décollé de Hanoï – 6 ont fait demi-tour :

  • 1 cause de la météo,
  • 2 pour cause mécanique,
  • 3 pour raison tactique.

Sur la journée du 7 mai 70 tonnes sont larguées par les 22 Dakota.

16 chasseurs bombardiers, 1 Privateer et 25 B-26 se relaieront sur la journée pour crever le plafond et venir bombarder.

05 h 30

Sur ELIANE 4 une attaque est repoussée du Régiment 98 sur la face Est les hommes tiennent bon sur le Nord et le Sud mais sont à court de munitions

Il y a les blessés sur ELIANE 4 qui abrite l’ACP 6 et les postes de secours du 2/1 RCP et du 5e BPVN. Le sous-lieutenant LATANNE du 2/1 RCP, lors de la descente sur le flanc d’ELIANE 4 après perte de contact radio, est blessé au genou. Il rejoint le médecin ROUAULT.

Le calvaire des blessés allongés dans les alvéoles et des trous sur la contre pente de la colline est encore plus effroyable.

Le char ETTLINGEN  sur la plateforme du PC de BRÉCHIGNAC sur ELIANE 4, surplombe ELIANE 10 où les combats sont violents.

Le POSEN, déplacé au carrefour de la RP41, de sa position, protège le repli des combattants d’ELIANE 4 et de l’ETTLINGEN. Alerté du début de chute d’ELIANE 10, l’ETTLINGEN descend la pente de ELIANE 4. Le POSEN bat de ses feux les lisières Est de ELIANE 10.

La pression s’intensifie sur ELIANE 4 qui commence à s’effondrer.

06 h 00

Les combats continuent dans ELIANE 10. Contre-attaque en préparation sur ELIANE 2.

06 h 30

Un bataillon Viet frais se regroupe sur ELIANE 1 pour monter à l’assaut d’ELIANE 4.

C’est la fin.

CLAUDINE est en train de craquer sous les assauts d’un régiment de la 308 vers CLAUDINE 5. Un dernier bouchon entre Lily tenu par les derniers tirailleurs marocains et CLAUDINE 4. Tous les hommes valides rassemblés.

Toute sortie devra passer nécessairement par CLAUDINE et JUNON.

07 h 17

Ivan de Somow.
DE SOMOW.

Une patrouille de 4 Bearcat du Saintonge décolle de Bach-Maï – sergent-chef DE SOMOW.

Équipés de 2 bombes de 500 livres et de quatre roquettes alourdis par un Belly Tank. Ciel Bleu sans nuage, c’est la 65e mission sur Diên Biên Phu du chef de patrouille.

Contacté Torri Rouge assigne pour objectif ELIANE 1 et DOMINIQUE 2 et ensuite la protection d’un parachutage par des Dakota.

10 000 pied cible de la DCA lors de l’attente avant l’attaque.

Le chef de patrouille ajuste un tir de roquettes sur une pièce de DCA qui prend à parties les transports, un obus vient percuter son aile gauche le caisson à munition qui explose et arrache une partie de l’extrados de l’aile et les volets.

Il arrive à mettre le cap sur Hanoï.

Escorté par un ailier et un flight de 3 B-26 Martini Bleu en retour après un bombardement de DOMINIQUE 1 ayant décollé à 6 h 26 de Cat Bi.

Il arrive à rejoindre Hanoï et, après des tests de vol, parvient à se poser.

Le longeron principal fortement endommagé a tenu.

07 h 30

Message réservé au général COGNY : Le fait le plus grave est notre manque de munitions. J’ai depuis longtemps attiré votre attention sur le mauvais rendement des parachutages. Ce matin, après une nuit de combat, il ne reste que quelques coups de 105 alors que 5 canons sont encore disponibles. Mais je n’ai a peu près plus de munitions d’infanterie. Pour étaler, il me faut 2 milliers de coups de 120 et de 81 mm en première urgence. Rien que pour ces 2 catégories de munitions le chargement de 20 C-119 y suffirait à peine, en admettant que rien ne soit perdu. Il faut larguer à basse altitude avec une protection de chasse et larguer uniquement les munitions. Nous ne pouvons passer ce cap qu’à l’aide d’un effort exceptionnel de l’aviation.

08 h 00

Le 6 mai a été largué 185 tonnes de munitions puis 42 tonnes la nuit du 6 au 7. Le ramassage n’a pas pu être effectué ou que très partiellement.


La contre-attaque sur ELIANE 2 est interrompue par la nouvelle action VM sur ELIANE 4 et ELIANE 10. Combats corps à corps en cours. Situation en munitions tragique.

08 h 05

L’assaut final est lancé contre ELIANE 4 et 10.

08 h 15

Quatre Bearcat du Saintonge indicatif Black et Blue décollent. Avant d’attaquer DOMINIQUE 1, ils doivent attendre que 3 B-26 Martini Rose larguent leurs 18 bombes de 500 livres sur le Mont Chauve.

08 h 30

4 Bearcat du Languedoc, Ripaton Azur et Ripaton Tango se sont envolés de la Plaine des Jarres au Laos mission bombarder DOMINIQUE 1 dès la fin du bombardement de Black. Modification d’objectif pour un bombardement sur Dominique 6 : Ripaton doit larguer manuellement ses bombes.

08 h 35

Les Corsair de la 14F vont effectuer 16 sorties au profit de Diên Biên Phu. Une première patrouille Gayal Rouge décolle. Un des appareils fait demi-tour technique.

09 h 00

Chute de Diên Biên Phu, 2-7 mai 1954.

 

La face nord de ELIANE 4 tombe sous la poussée des hordes hurlantes de troupes vietminh fraiches. Les soldats Vietminh sont vêtus de tenues para camouflées de para et coiffé du casque américain venant des colis largués à l’extérieur du camp.

Une poignée de parachutistes continuent de résister autour du PC.

Les Viets sont maîtres d’ELIANE 10. Le 6e BPC a disparu. Depuis son arrivée, il a perdu 337 tués dont 126 autochtones, soit 55 % de son effectif.

La situation est très compromise sur ELIANE 10. Les survivants se replient sur ELIANE 12 recueillis par les Thaïs au Sud.

Les chars ETTLINGEN et POSEN appuient le repli avec la mission d’aider le maximum d’hommes à repasser la Nam Youm.

Les deux chars se mettent en place à hauteur des blockhaus d’ELIANE 12.

Coincés entre 2 haies de barbelés les deux chars subissent une concentration de mortiers.

Les chars apprennent la chute d’ISABELLE 4.

Quand la brume se disperse totalement nous voyons, depuis les postes d’observation, un bataillon traverser le pont Bailey en courant. Nous lançons deux salves de H6. La fumée couvre le pont. Quand elle se dissipe plus personne ne bouge sur le pont.

09 h 05

Ripaton Tango arrive vertical et doit patienter un quart d’heure le temps que Black et les deux Ripaton Azur achèvent leurs attaques.

Le PCIA l’informe qu’il doit bombarder le flanc oriental d’un monticule ou un assaut est en cours. Le bombardement étant hors des limites de sécurité il demande des précisions sur la position des troupes.

La réponse est laconique : On s’en fout de ta ligne de sécurité, ils sont tout près de l’autre côté c’est eux ou nous. De toute façon on est foutu ! Alors vas-y !

Avec son ailier peu expérimenté la patrouille serrée des deux Bearcat posent leurs bombes juste derrière la crête du monticule puis expédient leurs 4 roquettes sur DOMINIQUE 3.

09 h 30

Sur zone Gayal Rouge bombarde la partie nord de ELIANE 12 puis traitent ELIANE 4 au canon de 20 mm. Durant leurs ressources, sont tirés par des DCA de 37 mm et de 12.7 mm venant de DOMINIQUE 5 et d’ELIANE 1 et 4.

Le second-maître SARTORI (Corsair 14F-21), après avoir largué ses bombes, est touché. De la fumée dans le cockpit. Il met plein gaz pour remonter s’attendant à un arrêt moteur. Blessé à la main mais le moteur tournant normalement avec le tableau de bord hors d’usage et sans radio, il poursuit la mission en suivant son leader. Posé à 10 h 45 à Hanoï, après 2 h 10 de vol. Une balle de 12.7 mm est passée au travers des pales sans les toucher, a longé le capot moteur puis a terminé sa course dans le tableau de bord.

BRÉCHIGNAC sur ELIANE 4 appelle LANGLAIS et BIGEARD : « Bruno de Brèche, c’est la fin. Ils sont au PC. Adieu. Dis au Gars Pierre qu’on l’aimait bien. Je fais sauter le poste. Hip Hip Hip » (cri de guerre des parachutistes français). Puis c’est le silence.

L’épuisement absolu est devenu si fréquent que le Dr GRAUWIN signale le cas de soldats mourant à leur poste sans la moindre blessure. Ils ont succombé à 56 jours sans sommeil sans bonne nourriture, sans repos.

Le lieutenant POTTIER arrive à s’échapper d’ELIANE 4 et à rejoindre le pont Bailey où se trouvent 2 chars endommagés et les quadruplés d’Epervier qui tiennent une tête de pont. Le capitaine LE PAGE et 2 paras arrivent à rejoindre le PC de BIGEARD. 

Le POSEN est envoyé au ravitaillement. L’ETTLINGEN reste sur place au bord d’ELIANE 12. Quelques groupes d’hommes se dirigent vers les chars pour traverser le gué sur la rivière sous leur protection.

Le dernier à traverser est un petit vietnamien portant une mitrailleuse qui traverse fataliste le pont Bailey.

L’ETTLINGEN franchit la rivière et s’installe au bord du pont avec l’arrière de son char à la direction de l’ennemi mais avec de meilleures positions de tir.

Le moteur du char le protège des tirs de charge creuses.

09 h 45

Conversation téléphonique entre le général COGNY et le général DE CASTRIES.

  • Nous avons perdu ELIANE 2, ELIANE 4, ELIANE 10 et CLAUDINE 5.
  • Sont pratiquement anéanties : 1er BPC, 5e BPVN, 6e BPC, II/1er RCP, III/3e RTA. 
  • Restent : 2 Cies à 70 des 1er et 2e BEP, 2 Cies du 8e BPC, 2 Cies du I/2e REI, 2 Cies de I/13e DBLE, 3 Cies du I/4e RTM, 3 Cies du BT2.

Les Viets ont mis tout le paquet sur la face Est y compris les régiments 102 et 88 de la 308.

L’intention du général DE CASTRIES est de tenir la Nam Youm face à l’Est en gardant quelque chose de l’autre côté pour avoir de l’eau.

Le général demande l’autorisation de décrocher cette nuit vers le Sud avec l’aide des éléments valides. Le général COGNY (qui avait la délégation du général NAVARRE depuis le 5 mai) lui a donné cette autorisation.


Les VM ont mis des forces très importantes à l’attaque de la face Est, y compris les régiments 102 et 88 de la Division 308.

10 h 00

Réunion Hanoï. COGNY, BODET, LAUZUN. Étude des mesures à prendre pour le décrochage.

Le général BODET a pris la décision de continuer les parachutages aujourd’hui pour ne pas changer la physionomie du champ de bataille et ne pas donner aux VM d’indices de repli.


ELIANE 4 et ELIANE 10 tombés. L’attaque continue très violente sans marquer de pose. Tirs de neutralisation continuent sur l’ensemble de la position par salves très nourries.


C’est le tour de ELIANE 3 tenu par la 1/13 DBLE de tomber.


Baisse de résistance sur ELIANE 11 et 12.

Le général DE CASTRIES s’entretient par radio avec le général COGNY.

COGNY sait que les ELIANE et CLAUDINE sont tombés avec de nombreuses pertes.

COGNY donne l’ordre d’exécuter Albatros. Mais la programmation a changé avec la perte de 4 bataillons paras dans la nuit. Il ne reste plus que de rares Cies au BEP de GUIRAUD et au 8e Choc de TOURRET. Le 8 dispose encore de la 4e Cie sur Epervier et de la 1re à DOMINIQUE 4.

1er message radio

 

Autorisation de lancer Albatros. LANGLAIS lance les ordres.

Les quadruplés sont les dernières bases de feu de la garnison et taillent en pièce les troupes Vietminh qui se massent sur la rive gauche de la Nam Youm

Mais la ligne des ELIANE n’existe plus, les Viets sont au bord de la Nam Youm.

ELIANE 3 : la Cie du capitaine NICOD reçoit l’ordre de rejoindre le 4e Marocain sur Lily.

Le franchissement de la Nam Youm est difficile ; le pont est impraticable, pris sous le feu. La rivière a grossi avec les pluies le franchissement s’effectue par un câble de va-et-vient tendu par le génie. Certains tirailleurs trop chargés lâchent prise et se noient dans le courant. 

10 h 15

3 B-26 du Tunisie (Martini Ambre) larguent 12 bombes de 1 000 livres entre DOMINIQUE 1 et DOMINIQUE 5.

10 h 30

Mission photo RB26 HV 529 – 4 050 m.


Une dernière poussée vietminh submerge ELIANE 4 défendue par une douzaine de Bawouan.

Les conditions dantesques des derniers jours : abrutis par le manque de sommeil, on ne savait même plus si c’était le jour ou la nuit tant la fumée des explosions obscurcissait le ciel, constamment tenaillés par la faim et la soif car la corvée des PIM n’arrivait presque plus, le nombre des copains qui s’amenuisait, l’odeur pestilentielle des centaines de cadavres.

Le char ETTLINGEN est touché deux fois par des roquettes de bazooka tirées sous des incidences différentes le moteur est touché sans prendre feu.

En urgence le char POSEN vient accrocher le char pour le ramener devant la position du peloton.


Au nord sur Epervier les troupes qui tiennent le PA sans nom doivent se replier sur une nouvelle ligne de résistance au Nord du PC du GONO.

La nouvelle d’une sortie se répand troupes en meilleur état sans les blessés regroupement sur JUNON.

Les hommes se mettent à pleurer de honte à l’idée de se rendre.

SHD : Isabelle le 7 mai à 10 h 30 avec les points blancs des parachutes.

 

10 h 38

Décollage de Bach Maï deux patrouilles de Bearcat du Saintonge Green et Gold. Bombardement entre ELIANE 10 et DOMINIQUE 3 et tir de roquettes.

Le lieutenant GARIELpose ses 2 bombes de 500 livres court retard sur ELIANE 10 à quelques dizaines de mètres du PC GONO menacé par l’ennemi.

Le chef de patrouille a un dernier contact radio avec Torri Rouge.

10 h 55 à 11 h 10

4 Corsair Gayal Bleu larguent 14 bombes de 500 livres sur la RP 41 à 300 m au nord d’ELIANE 10 sous un ciel bleu sans nuage.

11 h 00

Martini Emeraude intervient au nord-est de DOMINIQUE 6.


Toutes les positions à l’Est de la rivière sont tombées. 

Sur ISABELLE, il reste une seule pièce d’artillerie et 2 000 obus.

11 h 15

Message COGNY pour ISABELLE :  Il doit être entendu que je laisse à votre initiative le soin de décider l’exécution d’Albatros. Me tenir au courant des intentions. M’adresser toute demande que vous jugerez utile. Si vous êtes sans liaison avec GONO vous passez directement sous mes ordres.

11 h 26

Trois B-26 Cinzano Rouge venant de Vientiane au Laos bombardent sur ordre de Torri Rouge la RP41 entre ELIANE 10 et DOMINIQUE 3.

11 h 56

Deux B-26 Cinzano Gris puis 2 autre de la même escadrille sur le même objectif. 

Dans la matinée

Un Criquet n° 792 a fait un dernier vol de reconnaissance en provenance Muong Saï 1h30 de vol depuis Muong Saï une heure sur place assez haut pour la DCA et retour des missions de 4 h environ qui sont tributaires de la météo.

Le lieutenant-colonel DE SEGUIN PAZZIS en contact radiophonique avec le colonel LALANDE l’informe à mots couverts du déclenchement proche de l’opération Albatros d’évacuation.

12 h 00

1re CMMLE sous-lieutenant PINAULT : repas avec portion réduite jusqu’à la découverte d’une caisse de « Singe » de Madagascar qui est accommodée avec du riz récupéré par un autre légionnaire au 5e BPVN.

SHD : photographie aérienne – situation du 7 mai.
LCL Lemeunier (1906-2000).

Réunion des chefs de bataillon devant réaliser la sortie sous les ordres des lieutenants-colonels BIGEARD et LEMEUNIER chez le colonel LANGLAIS. Les dernières photos aériennes larguées par un Corsair indique que toute retraite est impossible ; trop de tranchées. Les dernières photos aériennes larguées montrent que trois lignes de tranchées successives coupent la zone jusqu’ici accessible entre le CR principal et ISABELLE. Les chefs de bataillons déclarent que l’état d’épuisement de leurs hommes ne leurs permettent pas de forcer les positions VM.


ELIANE 3, 11 et 12 tiennent toujours, les combats continuent.


Le MULHOUSE remplace l’ETTLINGEN sur la position du pont.

Le POSEN est touché deux fois avant de pouvoir rejoindre le MULHOUSE.

Capitaine HERVOUËT et lieutenant PREAUD.

12 h 10

Le régiment 142 s’empare d’ELIANE 12 et poursuit sur ordre sa progression. ELIANE 12 est submergée.

SHD : situation Isabelle le 7 mai 1954.

12 h 30

Trois B-26 Cinzano Vert sur DOMINIQUE 2 pour 36 bombes de 250 livres court retard.

13 h 00

Un premier Privateer 28F5 matraque DOMINIQUE 1 et 2.


Une patrouille de 2 Bearcat, armée en 500 livres et roquettes, ayant décollé à 12 h 05, bombardent à courte distance des troupes infiltrées à proximité du PC puis mitraillent au canon de 20 mm des fantassins ennemis.


Réunion chez DE CASTRIES pour discuter des solutions.

L’estimation des troupes pouvant évacuer est de 8 compagnies à 70 ou 80 hommes chacune, soit un total de 650 hommes avec 200 à 300 hommes restant sur la position pour ralentir les Viets (général DE CASTRIES). La décision des chefs de bataillon (LANGLAIS, BIGEARD, LEMEUNIER) de ne pas tenter la sortie est entérinée.

Mais DE CASTRIES veut encore gagner un peu de temps.

Le temps s’est éclairci.

Des troupes fraiches se massent sur la rive gauche.

Une troupe Viet tente de passer la Nam Youm au sud d’ELIANE 3 où les blessés de JUNON défendent la position. Le servant d’un fusil mitrailleur tire à bout portant sur la vague d’assaut ennemie. Le tireur porte autour de la taille un énorme bandage ensanglanté et laisse une empreinte sanglante sur le sol chaque fois qu’il change de position. Le chargeur est manchot et porte, lui, un pansement autour de la poitrine.

Le Régiment 209 de la Division 312 lance une attaque vers ELIANE 10.

ELIANE 10 et 11 qui couvrent le pont Bailey tiennent toujours ELIANE 3 qui couvre JUNON et le pont de bois aussi.

13 h 40

Deux B-26 du GB 1/25 bombardent un objectif à l’Est de la cuvette, en retour une reconnaissance armée sur la RP41. Passant Na San sont pris à partie par la DCA à 800 m sol. (Pilote : capitaine DEPARDON). Un obus tue le mécanicien (Adjudant MAURY). Le pilote, l’observateur et le navigateur sont indemnes. Un autre arrache le saumon du plan gauche. Le pilote parvient à ramener difficilement l’avion à Cat Bi. Au posé le B-26 n° 109 a été touché par de 2 obus de 37 mm et 32 impacts de 12.7 mm.

SHD : réseau de tranchées vietminh entourant Diên Biên Phu.

 

SHD Air : Photographie de la piste, des bombardements, des tranchées, des parachutes abandonnés.

13 h 45

Deux Bearcat du Languedoc venus de Xieng Khouang au Laos attaquent le Mont fictif suivant l’axe Nord-Sud.

14 h 00

L’amélioration du temps permet un appui aérien assez soutenu.


Message du général DE CASTRIES au colonel LALANDE l’informant de la poursuite des combats du centre le samedi 8 mai jusqu’à 7 heure du matin pour couvrir la sortie de la garnison d’ISABELLE en direction du Sud selon les dernières consignes et informations reçues. Problème : la cartographie de la zone Sud est pratiquement inexistante ou mal renseignée, compliquant la mission d’ISABELLE. Il est impossible de trouver des guides locaux connaissant la région.

Début des ordres d’évacuation d’ISABELLE avec distribution des rations, des munitions, l’allègement des hommes et le début des destructions.


Sur ordre le régiment 141 (Hongaï) de la division 312 (Bentré) poursuit sa progression pour s’emparer d’ELIANE 11 (référencé 507 par le Vietminh) et atteindre le pont sur la Nam Youm.

14 h 39

Pourrons-nous oui ou non, avoir aujourd’hui un parachutage de munitions à basse altitude. Réponse urgente. Stop et Fin.

14 h 45

Trois B-26 Martini Rose larguent leur chargement à 600 m au Sud-Ouest de ELIANE 2.

15 h 00

Récit Vietminh : l’action est facilitée et accentuée par la reddition d’un nombre important de « rats de la Nam Youm » qui étaient installés, dans des caches, dans les berges, le long de la Nam Youm. Le fortin 507 est attaqué (ELIANE 11) Une courte préparation d’artillerie et l’assaut des fantassins. À l’Est du torrent, les troupes des derniers points d’appui en profitent pour s’enfuir vers Muong Thanh (le réduit central). Un groupe de soldat du points 507 (ELIANE 11) les rejoignent. Deux de nos sections déferlent déjà dans la position quand un timide drapeau blanc apparait. La garnison entière jette les armes et lève les mains.

Le drapeau blanc et la reddition sont constatés depuis ELIANE 12 par le capitaine FAZENTIEUX du Génie.


1re CMMLE – sous-lieutenant PINAULT : recevons l’ordre de faire sauter les pièces et les postes radio.


Les légionnaires survivants du I/13e DBLE d’ELIANE 3 sont relevés pour participer à la percée Albatros. Devant le départ des légionnaires, les tirailleurs marocains sont pris de panique et sortent des tranchées, mais la résistance continue sur ELIANE 3.

Le général THANH, en l’absence du général GIAP responsable des opérations, donne l’ordre de poursuivre l’assaut sur la face Est et Ouest. La division 312 franchissant la Nam Youm et marchant vers l’Ouest, la division 308 s’avançant à sa rencontre.

15 h 05

2 Corsair d’une patrouille de 4, dont deux ont fait demi-tour pour problème mécanique, larguent 5 bombes et 12 roquettes sur le nord du Mont Chauve ; le reste au Sud d’ELIANE 2 dans une boucle de la rivière et terminent par un straffing. En repartant ils constatent des explosions autour du PC GONO.

15 h 10

3 Helldiver de la 3F bombardent HUGUETTE 5 avec des bombes de 1 000 livres dont 4 vont au but.

Avant 16 h 00

2 Bearcat venant de Xieng Khouang avec 2 bombes de 500 livres chacun, contactent Torri Rouge qui répond : « Larguez votre chargement sur nous. Ils sont dans nos barbelés. Au revoir les gars. »

Les pilotes bombardent le sud d’ELIANE 3.

Au total, sur la journée, 90 sorties feu ont été réalisées en appui direct de Diên Biên Phu.

Du 1er au 7 mai, 1 Morane 500, 1 B-26, 1 F8F et 1 Beaver ont été abattus : 2 tués, 3 disparus, 2 blessés de l’armée de l’Air. 1 blessé et 2 disparus de l’armée de Terre.

A gauche, le commandant GUÉRIN (Torri Rouge) avec le capitaine DEFENDINI.

16 h 00

ELIANE 3 est tombé, les combats continuent au corps à corps autour d’ELIANE 11 et 12. Infiltration massive VM sur l’ensemble du front Ouest de la position centrale.


Dernier message envoyé par Diên Biên Phu en télétype :

  • Eliane 3, 2, 12 : Harcèlements se poursuivent, infiltrations massives sur face ouest.
  • Dès cet instant le général DE CASTRIES donnait l’ordre de procéder à des destructions.

Situation ELIANE 3 est tombé. Infiltration massive VM sur la face Ouest.

« Cessez le feu à 17 h 30. Ne tirez plus. Pas de drapeau blanc. À tout à l’heure. BRUNO, Pauvre 6 ! pauvres paras ! »

L’heure de la fin est fixée à 17 h 30 lors de la réunion avec DE CASTRIES.

Décision d’arrêter l’appui aérien à 17 h 00, demande de livraison munitions annulée remplacée par livraison vivres.

La rive Est de la Nam Youm est entre les mains des Viets.

Médecin commandant GRAUWIN : Dans les tranchées qui mènent à l’hôpital au GAP et au 8e Choc, dans le boyau qui conduit au PC, dans toutes les tranchées qui aboutissent au réduit central, les blessés sont entassés en une file interminable, assis ou couchés, à même la boue, et cette file ne s’arrête qu’au contact des Viets ? 


Le lieutenant-colonel DE SEGUIN PAZZIS contacte, en phonie, le colonel LALANDE pour l’informer que le réduit central n’est pas en mesure de réaliser Albatros, l’évacuation du camp (ils s’expriment en anglais pour éviter les écoutes). Il ne l’informe pas de leur cessez-le-feu à 17 h 30.

Il laisse au colonel le choix entre deux solutions : prolonger la défense et faire un baroud d’honneur ou bien tenter seul Albatros.

Les destructions sont déjà en cours sur ISABELLE. Il ne reste que la solution de la sortie. Après quelques minutes de réflexion le colonel Lalande annonce par message sa décision de tenter la sortie.

ELIANE 11 et 12 tombent. Sur Epervier les derniers mortiers de BERGOT n’ont plus de munitions. 

Le dernier char en état de tir, le DOUAUMONT envoie un dernier obus sur HUGUETTE 3 en plein sur un groupe de gradés  en train d’inspecter le PA. Sans organe de visée, le tir se fait à vue, à travers le tube.

Le sort est scellé, les combattants de Diên Biên Phu plantent leurs armes dans les parois des tranchées et appuient sur les détentes. Les fusils ont un dernier hoquet, les mitraillettes un ultime aboiement et les culasses frappent le vide, les canons éclatent.

Au milieu du camp, les équipages de chars vidangent l’huile des moteurs qu’ils emballent pour les détruire. Tous les chars sont détruits entre 16 h 00 et 17 h 00. L’optique, l’armement collectif, la radio, ont été ou cassés ou jeté à l’eau, les culasses des canons démontées et enterrées, l’âme des tubes détériorée avec des grenades incendiaires. Au point de vue organe moteur, les tableaux de bord, delcos, carburateurs, filtres ont été brisés à coup de masses. En outre, plusieurs grenades explosent dans les compartiments moteurs. Seuls les trains de roulements des chars sont laissés intacts. Les artilleurs font glisser dans les tubes des grenades au phosphore pour souder les culasses. C’est FINI ! les Viets n’auront rien.

Au PC GONO, les hommes brûlent les documents ; soldats et cadres attisent des foyers où sont jetés des brassées de documents secrets.

Au PC du GAP on brûle des lots de photographies aériennes.

SHD : Isabelle le 7 mai 1954.

16 h 30

2 conversation avec Hanoï.

La première intention du général DE CASTRIES est d’entrer en contact avec les Viets par radio pour annoncer l’envoi de parlementaires, lors de la première conversation avec le général BODET.

Projet : 17 h 30 envoyer des parlementaires. Il faut soigner les blessés. Il y en a partout. On ne peut même plus les ramasser. Et puis alors, je vais prévenir que demain, il y aura des avions à Croix rouge. J’espère qu’ils laisseront faire.

Le général DE CASTRIES a déjà donné des instructions pour détruire le maximum de matériels et de munitions. Dans sa conversation avec Hanoï DE CASTRIES informe de la décision du colonel LALANDE à ISABELLE de tenter la sortie.

Le 31e bataillon du génie a reçu l’ordre de se tenir prêt à remettre la piste en état.

(message du 31e génie à Hanoï à 16 h 15)

L’état-major du GONO a demandé à Hanoï le parachutage de médicaments et de rations alimentaires pour distribuer aux hommes lors de la reddition. Les avions qui sont déjà chargés sont déchargés et la cargaison remplacée.

Le général COGNY reprend la conversation :

— Dites-moi, mon vieux, il faut finir maintenant, bien sûr, mais pas sous forme de capitulation. Cela nous est interdit. Il ne faut pas lever le drapeau blanc, il faut laisser le feu mourir de lui-même, mais ne capitulez pas, Cela abimerait tout ce que vous avez fait de magnifique jusqu’à présent.

— Bien, mon général, seulement je voulais préserver les blessés.

— Oui, seulement j’ai un papier moi (instruction du général NAVARRE avant de quitter Hanoï interdisant que soit hissé le drapeau blanc.) Je n’ai pas le droit de vous autoriser à faire cette capitulation. Alors faites ça au mieux. Mais il ne faut pas que cela finisse par un drapeau blanc. Ce que vous avez fait est trop beau pour que l’on fasse cela. Vous comprenez mon vieux ?

— Bien mon général.

— Allez, au revoir mon vieux.

Version non coupée, annotée du général Navarre et provenant de son fonds privé conservé au Service historique de la Défense.

Feu de toutes les armes sur les positions ennemies (Commandant LE GURUN : feux d’artifice final), jusqu’à épuisement des munitions, destruction des pièces d’artillerie, des appareils de transmission, des deux chars, et arrêt de toute activité à 17 h 30.

Les archives des PC sont brulées.

Attendre dans la dignité l’arrivée des Vietminh.

Hanoï envoie trois messages à ISABELLE pour l’organisation de la sortie et le recueil.

Le lieutenant-colonel DE SEGUIN PAZZIS téléphone à toutes les unités du camp retranché.

Par ordre du général, le cessez le feu sera effectif à partir de 17 heures. Tous les matériels et les approvisionnements seront détruits.


1ère CMMLE – sous-lieutenant PINAULT : Je casse ma carabine et mon pistolet. Avec POIRIER nous liquidons la dernière boite de Vinogel sans la diluer. Nous sortons à l’extérieur et attendons les Viets.

Effectif initial de la Cie : 90 hommes. Effectifs restant : 47, dont 38 blessés (légers pour la plupart).

17 h 00

DE CASTRIES téléphone pour la dernière fois au général COGNY tandis que les combats se poursuivent avec acharnement sur l’ensemble des positions. Jusqu’à 17 h 30 les communications téléphoniques reçues à Hanoï ont été le calme extraordinaire qui règne jusqu’au dernier moment dans le PC souterrain. Les ordres sont donnés comme à la manœuvre.

Le général BODET reçoit le dernier coup de téléphone du général DE CASTRIES.

Nous sommes submergés. Les 3 PA de l’Est de la Nam Youm sont tombés. Je ne sais plus où sont mes blessés. Mes commandants d’unités affluent vers moi en me demandant que faire. Nous sommes soumis depuis cette nuit au tir des orgues de Staline. Mes hommes ne sont plus que des automates crevés de fatigue.

Le général BODET lui a donné l’ordre de laisser mourir le combat et de laisser LALANDE jouer Albatros.

Il l’a remercié de la très belle défense qui a été faite jusqu’ici, lui a dit qu’on ne les laisserait pas tomber.

Le général DE CASTRIES a dit que de chez les VM on s’évadait aussi.


Dakota Zoulou Charlie largue des médicaments sur ISABELLE. Son chargement a remplacé les munitions déjà chargées dans l’avion. 


Sur ISABELLE, réunion des commandants d’unité. Destruction de l’armement lourd et du matériel à entreprendre sur le champ. Immédiatement, on entreprend la destruction : les chars restant du peloton PRÉAUD, le dernier 105 de l’adjudant FOUCHEREAU, les canons sans recul, les mitrailleuses lourdes ; les munitions sont jetées dans la rivière. Tout est détruit, cassé. La marche en brousse sur de longue distance ne permet que l’emport de charges légères et de l’armement individuel.  

17 h 30

ELIANE 11 et 12 tenus par des restes des Thaïs et des sapeurs marocains tombent.

De partout, surgissent les bo-doïs. On dirait une horde de gamins en liesse.  Di, di ! Mau Lên. 

On a l’impression que les soldats vietminh sortent de terre leurs pas résonnent sur les plaques métalliques de la piste.

Carte des tranchées Vietminh au 7 mai 1954.
SHD : état d’Eliane, 2 au 7 mai 1954.

Dernière conversation entre COGNYet DE CASTRIES.

— Je fais sauter toutes les installations. Les dépôts de munitions explosent déjà. Au revoir

— Allez au revoir mon vieux.


Médecin capitaine VERDAGUER : Après 56 jours d’un vacarme étourdissant, un silence irréel, un immense silence pesant et triste.


Sergent-chef Louis LEGRAIN du 8e BPC : Je sort de mon abri. C’est le calme, un calme étrange, poignant après 56 jours d’enfer. Partout sur les points d’appui, le feu consume les dépôts de munitions et de matériels, les lourdes pièces d’artillerie sont renversées, criblées d’éclats parfois même déchiquetéesLes mitrailleuses lourdes sont déformées, calcinées, en pièces. Partout des cratères encore sanglants, un fantastique paysage d’Apocalypse a remplacé l’ensemble bien ordonné de la place de Diên Biên Phu, un drapeau blanc à croix rouge flotte mollement sur l’antenne chirurgicale.


Les opérateurs détruisent sur ordre leurs téléphones et leurs postes radio. Fin de porteurs.

17 h 40

9DMO, l’opérateur radio de Diên Biên Phu prend congé : On fait tout sauter. Adieu !

Section 1 Cie 360 Bataillon 130 régiment 209 Division 312.

Les supérieurs ordonnent de capturer vivant DE CASTRIES et ses officiers.

À trois nous entrons dans le PC. Quand on arrive, il y a une vingtaine d’officiers. Ils se lèvent Le camarade LUÄT dit en français : Cessez-le-feu !

Le fantassins plantent leurs armes dans la terre et appuient sur la détente ; ce qui fait exploser le canon.

Les artilleurs détruisent les pièces avec les grenades incendiaires et cassent les optiques.

Les émetteurs radios détruits, il règne un silence dans le PC.

LANGLAIS détruit son béret para, BIGEARD le garde par bravade.

Ils refusent tous les deux de sortir les bras levés.

Sur ISABELLE on se bat encore. Les liaisons radio ne se font plus qu’en graphie.

Le Viet arrive. Le petit vietnamien, une ombre de 1 m 50 qui parait avoir 15 ans même quand il en a le double, se présente à l’entrée de la tranchée, brandit son arme russe et lance Di di mau-len (allez vite) ou un Sortez.

L’abri PC est pris.

Le général DE CASTRIES est dans son bureau en uniforme avec médailles.

Les 23 officiers, sous-officiers et hommes de troupe du PC sont rassemblés.

17 h 55

Message de COGNY à ISABELLE : Me faire connaître vos intentions pour nuit du 7 au 8.

Témoignage du général Pierre LATANNE, recueilli par Chloé DUVIVIER

Pascal PECCAVET
Pascal PECCAVET
Ancien pilote d'hélicoptère sur Gazelle au sein de l’aviation Légère de l’armée de Terre (ALAT) pendant 18 ans cumulant 2 500 heures de vol. Ancien combattant de la guerre du Golfe et de la Somalie. Attaché Principal d’Administration d’État dans l’Éducation nationale. Adjoint gestionnaire d’un établissement scolaire. Commissaire aux Armées de Réserve (en attente d'affectation). Membre de l’Union Nationale des Combattants de Saint-Paul-lès-Dax (Landes). Historien chercheur pour l'ECPAD. Historien "War Studies". Spécialiste de la guerre d’Indochine. A rejoint l'équipe rédactionnelle de THEATRUM BELLI en janvier 2024.
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9 Commentaires

  1. Ces textes sont un témoignage essentiel à ne jamais oublier. Paix à tous ceux qui ont tant souffert pour l’honneur de leur patrie.

    • Merci à vous pour ce commentaire. Mon papa y a laissé la vie et combien ma tristesse et ma colère sont grandes, si vives depuis tant d’années. Merci pour ces lignes terribles mais nécessaires.

  2. La France ( politiques et haut- commandement )les a conduit au désastre,elle n’a même pas était capable de les aider dans la défaite. Trop son morts en captivité et les politiques s’en sont bien sortis .

  3. Un grand merci pour ces journaux de marches et leurs détails, c’est poignant, surtout cette fin des combats.
    Pour la mémoire et le souvenir, nos gouvernants devraient instaurer une commémoration nationale le 7 mai afin de rappeler le sacrifice ultime de tous ces hommes.

  4. Merci pour ce journal de marche très précis, vivant et bouleversant. Mes parents étant dans les Transmissions, ma mère à Saigon et mon père à Dalat, ils sont restés toute leur vie très marqués par ce drame. Je découvre et comprends, grâce à ce document unique, qu’à Dalat ils ont été chavirés par l’état désastreux de leurs camarades revenant de l’enfer. Merci beaucoup.

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