Ferdinand Gilson, né le 20 octobre 1898 à Champigny-sur-Marne et mort dans la nuit du 25 au 26 février 2006 à l’hôpital de Gien, est un mécanicien, propriétaire d’un atelier de mécanique, artilleur pendant la Première Guerre mondiale et résistant français lors de la Seconde Guerre mondiale.
« Je m’étais mis dans la tête de m’en sortir, de cette saloperie. » Ferdinand Gilson parle de la guerre, sa guerre, la grande, 14-18. Avec son siècle bien compté, Ferdinand s’exprime clairement, passant sans difficulté du français à l’allemand ! « Au casse-pipe, raconte le poilu, j’ai pensé que la difficulté des hommes à se comprendre était à l’origine de tout ce gâchis. » Il s’excuse de prendre du temps pour réfléchir, ferme les yeux et se souvient.
À son arrivée au front, le 16/04/17, le soldat Gilson est affecté à un régiment d’infanterie, chez les « pousse-cailloux ». « Ils ont mis quatre mois à se rendre compte que j’avais les pieds plats. Puis on m’a versé dans la cavalerie, où ils ont vite compris que je ne serais jamais un bon cavalier… Alors ça a été l’artillerie. » Ferdinand est affecté au service d’une pièce emblématique du conflit : le canon de 75. « C’était une merveille. Il tirait de 13 à 15 coups par minute, sans arrêt.
Sur le terrain, l’horreur et le grotesque sont intimement mêlés : « À cause de nos casques brillants, on faisait de bonnes cibles pour les tireurs allemands. Alors on les maculait de boue pour ne pas se faire repérer. Mais dès qu’on croisait un officier, il nous faisait nettoyer nos casques « pour le prestige »… et nous renvoyait au casse-pipe ! »
« Mourir, je m’en battais les flancs. Ce que je ne voulais pas, c’était être défiguré » Sa coquetterie lui vaudra son premier gazage. « Quand il tombait une marmite (NDLR : un obus), elle creusait un cratère, qui faisait un bon abri tant qu’il n’était pas rempli d’eau. On se disait entre nous, qu’un obus ne tombait jamais deux fois au même endroit. Alors, j’allais me planquer. « Méfie-toi », m’avait dit un copain, « les gaz se foutent dans le trou, et tu vas te faire moucher ». C’est ce qui m’est arrivé. » Il y passe deux fois, et l’ypérite, le célèbre gaz moutarde, lui laisse un cuisant souvenir : neuf trous au poumon gauche, et un assez long séjour à l’hôpital du Val-de-Grâce.
À sa sortie, on lui propose de rejoindre une école d’élèves officiers. « Une fois à Fontainebleau, on nous a dit : « Soit vous étudiez sérieusement, soit vous retournez au front. » Tout le monde a choisi d’étudier ! » C’est là qu’il apprend la fin de la guerre. Du fond de sa mémoire lui revient cette anecdote : « Une histoire courait dans les rangs. Sur une tranchée où les Allemands et les Français étaient à la lutte depuis des semaines, à peine séparés de quelques mètres, les biffins avaient reçu un message des boches, enroulé autour d’une pierre. Ils disaient : « ne tirez pas, on ne tirera pas »… ».