mercredi 24 avril 2024

Les derniers pirates blancs

Aux rivages de la Grèce.  La longue lutte des chrétiens et des musulmans entretint la piraterie en Grèce jusqu’à l’époque contemporaine. Les puissances les utilisaient de part et d’autre, pour la plus grande gloire de Dieu. L’Ordre de Malte continuait d’employer quelques moines-pirates, parmi lesquels les Français se distinguèrent. Au XVIIe siècle, le chevalier de Téméricourt, la terreur de l’Egée, pratiquait le meurtre, le viol et la vente d’esclaves, allant jusqu’à nier l’enfer. Son contemporain, le chevalier Crevelier, lorsqu’il pilla Naxos en 1675, n’épargna même pas les prêtres. Fléaux pour certaines îles, ces forbans de la croix étaient une providence pour d’autres ; leurs prises, vendues à vil prix à Milo, faisaient de cette île l’entrepôt commercial le mieux achalandé de l’archipel.

Mais les Grecs ne fournissaient pas seulement des victimes. Depuis Homère ils n’avaient jamais abandonné sans retour les grandes traditions de la piraterie. Comment l’auraient-ils pu quand leur sol, en tant d’endroits, n’était que cailloux et montagnes pierreuses, quand les exigences des Turcs les obligeaient à se réfugier dans des îles surpeuplées, quand la nature, avare de récoltes, se montrait prodigue au contraire de baies dissimulées, de caps propices à l’embuscade, de grottes-repaires, de montagnes-vigies, d’îlots-refuges et d’écueils complices ? La géographie et la misère les destinaient au métier de forban. Certaines îles en vivaient, et même de vastes pays. Les Maniotes, habitant le sud du Péloponèse, sur les pentes abruptes du Taygète battues par la mer, se considéraient comme les descendants des Spartiates, brave peuple de proie ; pratiquement indépendants des Turcs, divisés par de farouches querelles héréditaires, ils savaient s’unir pour des expéditions de pillage. Les moines même, dit-on, s’embarquaient alors pour prélever la dîme sur les prises.

On guettait les navires marchands sur leurs routes ordinaires. L’île Sapienza sur la mer Ionienne, Cythère à la pointe de la Grèce, l’îlot désert de Fourni, près de Samos, étaient des bases classiques. Paros, Ios, Milo, Psara, Icaria étaient fréquentés à certaines saisons ; on poussait même jusqu’à Chypre, en Syrie et en Egypte. Mais on ne se contentait pas des navires ; on écumait sur les côtes. Les Epirotes pillaient Corfou, les Maniotes ravageaient Cythère et les Cyclades. Partout les populations du littoral devaient surveiller constamment la mer, se réfugier dans des grottes à la moindre alerte. A la fin du XVIIIe siècle, les rivages étaient abandonnés, les villages s’étaient reconstitués dans l’intérieur, dans des citadelles au flanc des montagnes que hérissaient des tours de vigie, allumant des feux pour prévenir les alentours dès qu’on signalait un pirate.

La vie des pirates était d’ailleurs rude ; pendant de longs mois ils erraient sur des côtes désertes, dormant en plein air, cuisant quelques maigres galettes sous des cailloux rougis au feu. De cette humanité quasi préhistorique émergeaient quelques noms. Tel le Klephte Zakharias, qui tendait ses embuscades sur les côtes d’Egine et de Salamine. Tel ce Jean Capsi, de Milo, qui réussit quelque temps à arracher l’île aux Turcs. « Presque tout le monde, écrit le R. P. Sanger, se soumit avec plaisir à un brave homme qui faisait honneur à son pays. » Consacré par l’évêque, il régna trois ans et fut pendu par les Turcs.

Au début du XIXe siècle, les îles d’Hydra, de Spetsa, de Psara (patrie de l’illustre Canaris), vivaient d’un intense commerce maritime, dont la piraterie était une des branches prospères. La guerre de l’Indépendance utilisa tous ces hardis écumeurs. Les Maniotes furent parmi les premiers à déclencher l’insurrection. Les forbans grecs firent beaucoup de mal aux Turcs, coulant et incendiant leurs flottes. Mais on ne pouvait demander à des pirates professionnels de se limiter à des buts patriotiques, et ils pillaient un peu tout le monde. « Je déclare, écrivait en 1816 l’amiral de Rigny, qu’il est impossible à un bâtiment isolé de faire 10 lieues dans ces mers sans être assailli. » Le jeune royaume de Grèce ne parvint que lentement à faire régner l’ordre. About aurait pu, peut-être plus justement, faire de son Roi des Montagnes une histoire de pirates.

Lafitte.  L’histoire de Jean Lafitte, dernier des grands flibustiers français et patriote américain, n’est bien connue que dans sa partie centrale ; ses origines et sa fin se nimbent de légendes.

Certains le font naître à Saint-Malo, d’autres à Bayonne, mais il semble plus probable qu’il ait été Bordelais. Si l’on en croit un mémoire anonyme, il fit plusieurs voyages le long de la côte africaine. Au cours de l’un d’eux, il se brouilla avec le capitaine et débarqua à Maurice où il devint corsaire et négrier ; de nombreuses prises sur les Anglais l’ayant enrichi, il rentra en France. Mais il devait montrer jusqu’à la fin que les biens matériels, qu’il estimait, ne suffisaient pas à son besoin d’actions hors série. Il repartit pour la Guadeloupe et reprit la course. Quand l’île fut conquise par les Anglais, il passa avec d’autres corsaires à Carthagène, qui commençait à se révolter contre les Espagnols. Les autorités insurgées ne firent aucune difficulté pour leur délivrer des commissions. La flibuste recommençait. C’est là que Lafitte eut un trait de génie ; au lieu de rester à Carthagène, aux ordres de la nouvelle République, il s’établit sur la côte sauvage de la Louisiane, près de La Nouvelle-Orléans.

La Louisiane venait d’être cédée par Napoléon aux États-Unis. Mais ceux-ci n’y étaient guère installés. Les colons français, coureurs des bois, trafiquants divers, avec pas mal de joueurs et de fripons, formaient la majorité. Lafitte se mêla d’abord à eux, faisant figure de riche bourgeois, possédant des esclaves et une forge. Son frère Pierre l’accompagnait. Cette reconnaissance préalable les amena à fixer leur centre d’activité dans l’île de Barataria.

C’était, à l’ouest de l’embouchure du Mississipi, une région amphibie, dans les boues du fleuve, au milieu d’un complexe de lacs, « bayous », rivières et canaux, domaine des alligators et des palétuviers. Un immense golfe s’ouvre là, tout proche de La Nouvelle-Orléans, protégé du large par un chapelet d’îles, avec des passes faciles à défendre. Lafitte rassembla en ces lieux propices une réjouissante compagnie de mauvais garçons : il y avait des flibustiers munis (ou non) de commissions délivrées par la République de Colombie ou par d’anciens gouverneurs français des Antilles ; il y avait aussi des contrebandiers connaissant tous les détours de ce monde aquatique. Lafitte mena avec beaucoup d’autorité et d’habileté cette double industrie, ce qui, avec de tels compagnons et dans la proximité d’une grande ville, était un assez joli tour de force.

Les témoignages s’accordent à le représenter comme un homme grand, « d’une physionomie belle et particulièrement remarquable », de rapports sympathiques et gais, d’une intelligence dynamique ; doté aussi de belles qualités de caractère, « ferme, courageux, magnanime ». Il savait s’imposer par son entregent et un certain magnétisme personnel, qui séduisaient à l’occasion jusqu’à ses ennemis. Ces aimables vertus ne l’empêchaient pas d’être un astucieux calculateur et un organisateur hors ligne.

La Louisiane, ayant reçu de nombreux immigrants américains, fut érigée en État. Son premier gouverneur, Claiborne, voulut montrer que l’ère de l’anarchie était passée et lança, en mars 1821, une proclamation contre les pirates de Barataria, exhortant tous les bons citoyens à « sauver la Louisiane de l’odieux reproche de donner asile à une association dont les pratiques sont subversives de toutes les lois humaines et divines et dont nul ne peut partager les trésors mal acquis sans être déshonoré à jamais et s’exposer à une punition sévère ». Mais les membres de la dite association continuaient à se promener tranquillement dans les rues de La Nouvelle-Orléans où ils comptaient d’innombrables amis ; la population dans son ensemble estimait naturel de frauder la douane et de participer au bon marché des prises. Lafitte introduisait des marchandises et des nègres. Les prises étaient vendues publiquement à Barataria et les acheteurs venaient nombreux ; on recevait même des ordres de Philadelphie et de New York.

En janvier 1813, un collecteur de taxes courageux se rendit à Barataria avec une petite troupe et fut tué. Le gouverneur demanda à la Législature de Louisiane de lever une force armée, mais les députés estimèrent la dépense inutile. En novembre, faute de moyens plus efficaces, le malheureux gouverneur lança une seconde proclamation où il dénonçait « l’apathie du bon peuple de cet État » et offrait 500 dollars pour qui livrerait Lafitte. Lafitte, dit-on, en offrit 5.000 pour qui lui livrerait le gouverneur ; mais ce n’était qu’une plaisanterie car le gouverneur ne le gênait guère. Il avait son propre gouvernement qui savait se faire respecter. Deux sloops de guerre britanniques, qui avaient essayé en juin 1813, d’attaquer Barataria, avaient dû se retirer avec des pertes considérables. Lafitte se défendait d’ailleurs d’être pirate et ne fut jamais cruel ; « il était un libre commerçant, avec une corde autour du cou ». Claiborne fit ouvrir contre lui une information judiciaire, mais il prit à sa solde les meilleurs avocats de la ville et les poursuites n’aboutirent jamais. Son frère Pierre, moins heureux ou plus imprudent, fut saisi, mis en prison, mais libéré peu après.

A ce moment, le 3 septembre 1814, un brick anglais mouilla devant Barataria. L’Angleterre et les Etats-Unis étaient en guerre. Le colonel Nicholls envoya à Lafitte un message : « Je vous demande, ainsi qu’à vos braves compagnons, d’entrer au service de la Grande-Bretagne, où vous aurez le grade de capitaine » ; on lui promettait des terres et 30.000 dollars ; ses navires devaient être placés sous commandement anglais ; si les offres étaient repoussées, Barataria serait détruit. Cette brutalité devait hérisser un homme fier comme Lafitte, mais il n’en laissa rien paraître et demanda quelques jours pour réfléchir. Cependant il envoyait des lettres au gouverneur, lui racontant tout et offrant ses services, désirant, disait-il, « rendre à l’Etat nombre de citoyens qui peut-être, à vos yeux, ont perdu ce titre sacré ». Claiborne, après consultation d’un conseil d’officiers, refusa et profita de la présence des troupes américaines pour mener une expédition contre Barataria ; de nombreux pirates furent pris, mais la plupart, avec Lafitte, se réfugièrent dans un autre coin des marais.

Sur ces entrefaites arriva le général Jackson. Il était très monté contre ceux qu’il appelait « les pirates et bandits infernaux », mais il découvrit immédiatement la faiblesse de la défense. Lafitte eut alors l’audace de se présenter à lui et de renouveler ses propositions. Jackson accepta. Les troupes de Lafitte, sous le commandement de deux vieux flibustiers français, Dominique You et Beluche, dirigèrent l’artillerie contre les Anglais et contribuèrent à les repousser. Jackson les félicita de leur « bravoure, courage et fidélité » et le Président amnistia toute la troupe.

Commerçant respecté, Lafitte ne tarda pas à s’ennuyer à La Nouvelle-Orléans. Il alla s’installer à Galveston, au Texas qui appartenait alors, assez vaguement, au Mexique ; avec une commission mexicaine, il put reprendre la chasse aux Espagnols, sans d’ailleurs afficher un préjugé excessif pour le pavillon. Là, son existence devient plus floue. On a dit qu’il avait enterré des trésors (de l’orle long de la côte de Louisiane et que, lors d’un court séjour à Washington, il avait dépensé 60.000 dollars « dans la meilleure société ». On dit aussi qu’un gouvernement insurrectionnel du Texas l’aurait nommé gouverneur de Galveston. Ce qui paraît certain, c’est qu’il eue des difficultés graves avec les marines de divers pays. Un jour, dégoûté, il monta sur son brigantin, The Pride (L’Orgueil), et disparut à l’horizon de la mer.

Après ce ne sont plus que contes. Les uns le font mourir dans la brousse du Yucatan. D’autres le montrent pourchassé par un sloop britannique, blessé à mort sur le pont de la Pride et transperçant, dans un suprême effort, le capitaine ennemi. Si c’est exact, ce fut le dernier geste meurtrier du duel franco-anglais commencé avec la guerre de Cent ans.

Épisodes.  Certains des compagnons de Lafitte, après leur pardon, se résignèrent à des carrières réputées honorables. Beluche finit général en Amérique du Sud. Mais quelques-uns, les véritables élus de la flibuste, ne purent renoncer à leur vocation. Ils joignirent d’autres bandes, déjà constituées le long de côtes favorables. C’est ainsi que la partie orientale de Cuba, frangée de hauts fonds et de récifs, bien connus des flibustiers de la grande époque, connut pendant quelques années un renouveau de prospérité, encouragée par les rares autorités locales. En 1823, la baie de Sejuapo, centre de leur activité, fut nettoyée par une escadre américaine. Dès lors la flibuste, à Cuba, ne fut plus qu’un artisanat à la petite semaine et dénué de conviction, qui rendit son dernier souffle lorsque survinrent les vapeurs. Richards Hughes a décrit cette agonie dans Un cyclone à la Jamaïque. Ainsi périt la piraterie blanche, tout au moins en tant que métier et institution régulière. Ensuite il n’y eut plus que des épisodes, çà et là, souvent féroces, mais nés du hasard des circonstances, sans traditions et sans lendemains.

Parmi les forbans qui hantèrent les Antilles à cette époque, on aperçoit une figure hors série, celle du curé Domingo Murioz. Il avait, dit-on, abandonné son ministère pour l’amour de la belle Wanda, une Russe aux longs cheveux d’or dont il avait poignardé le mari et les amants. S’étant emparé d’un schooner français, l’Emmanuel, il l’avait fait peindre en noir, et arborait aussi le pavillon noir. On disait qu’il célébrait des messes, également noires, dans son repaire d’Oruba, et faisait griller ses prisonniers les bras pendus à une potence.

Un autre schooner pirate originaire des Antilles espagnoles, le Panda, croisa quelques années au large des États-Unis. Il s’empara notamment en 1832 du Mexican, en envoyant simplement une chaloupe à bord. Les forbans prirent 20.000 dollars en argent, mais, négligeant la recommandation que leur capitaine leur avait donnée : « les chats morts ne miaulent pas », ils laissèrent la vie à l’équipage, se contentant de couper les agrès et de mettre le feu au navire. Cette pitié indisciplinée leur fut fatale. L’équipage put éteindre le feu, rétablir les voiles, gagner le port et dénoncer le bateau pirate qui fut capturé deux ans plus tard ; 5 hommes, dont le capitaine, furent pendus, aux applaudissements du peuple de Boston.

Une mésaventure à peu près identique fut celle du Morning Star, qui, en 1828, rentrait de Ceylan en Angleterre, ayant à bord café et épices, ainsi que des officiers et civils britanniques rentrant en congé avec leur famille. Dans les parages de l’île de l’Ascension ils furent pris en chasse par un navire arborant les couleurs colombiennes. C’était un ancien négrier portugais. Des pirates de Cuba s’étaient fait engager comme équipage et leur chef, Benito de Soto, avait pris le commandement en baptisant le navire The Black Joke (L’Humour noir). Ayant stoppé le Morning Star, de Soto envoya une chaloupe avec ordre de piller et de tuer tout le monde. Les forbans subalternes pensèrent avoir fait leur devoir en enfermant les passagers dans les cales, en sciant les mâts et en faisant des trous dans la coque. Par miracle une femme put se sauver et délivrer tout le monde ; un autre navire arriva alors providentiellement et les sauva. De Soto continua quelque temps, le long de la côte africaine, ses funèbres plaisanteries. Mais quand il vint à Cadix pour vendre ses prises, il fut reconnu et pendu, non sans avoir fait une confession générale de ses crimes et édifié tout le monde par son exemplaire contrition.

Le Pacifique sud, faiblement gardé, vit aussi au début du XIXe siècle divers épisodes de piraterie, La Tasmanie, sauvage et peuplée d’indigènes farouches, était alors un bagne, de réputation effroyable. Les forçats, peu nourris, souvent fouettés, travaillaient aux chantiers de construction de Hobart et de Port-Macquarie, dans l’eau glacée et la chaîne aux pieds. Certains s’évadaient, s’emparaient d’embarcations et menaient, dans le détroit de Bass, une vie, à peine moins misérable mais libre, de pirates et de naufrageurs. Certains purent conduire leurs prises en Polynésie ; on en retrouva jusqu’en Chine.

C’est en Tasmanie qu’aborda un jour un certain capitaine Robertson, un rouquin au sourire perpétuel et inquiétant. Il avait derrière lui nombre d’histoires sinistres. Au service de la nouvelle République chilienne, il avait torturé des prisonniers espagnols, puis s’était emparé, dans le port de Callao, d’un navire anglais, le Peruvian, contenant 2 millions de piastres d’or. Le trésor avait été enfoui, dit-on, dans l’île Grigain mie des Mariannes. Robertson, peu soucieux de partage, massacra ses compagnons et les femmes polynésiennes qu’il avait emmenées. Puis il saborda le navire, se fit passer pour naufragé et gagna la Tasmanie. Là il fréta une goélette pour aller chercher son trésor. Mais, reconnu par un Espagnol des Mariannes qu’il avait fait fouetter jadis au Chili, il fut fouetté à son tour et promit de révéler l’emplacement du trésor ; en route, il se jeta à la mer et se noya, préférant la mort à la ruine de ses espoirs. On fouilla l’île longtemps, en vain.

Beaucoup plus tard se développa dans les îles océaniennes la corporation des « blackbirders » qui venait enlever des indigènes sur les côtes pour les revendre aux planteurs en quête de main-d’oeuvre a L’un d’eux, Hayes, pris par les Espagnols, devint un si merveilleux catholique qu’on le remit en liberté. Il reprit aussitôt son métier, en y joignant l’attaque des petits navires.

La piraterie européenne sembla ensuite éteinte pour toujours. Les navires de guerre à vapeur, puis à mazout, de plus en plus rapides, et munis finale ment de T. S. F., interdisaient tout espoir de carrière et même de tentative isolée. Les vocations se reportèrent sur la terre ferme ; la « bande à Bonnot », puis les gangsters américains, modernisèrent le banditisme en le motorisant, car on se perd plus facilement dans une grande ville que sur l’océan. Cependant on a pu signaler certaines tentatives de ressusciter la piraterie en l’adaptant aux temps nouveaux.

Lorsque les États-Unis décidèrent d’interdire l’alcool, un curieux trafic s’instaura à la limite des eaux territoriales. Des navires, apportant des caisses de spiritueux, mouillaient en pleine mer, à un endroit convenu, où les vedettes ultra-rapides des « bottleggers », s’efforçant de déjouer la douane, venaient prendre livraison. Le 24 juin 1924, le Mulhouse, du port de Fécamp, chargé de 36 000 caisses d’alcools divers, attendait ainsi les « bottleggers ». Il fut abordé par la goélette Patara dont les hommes, reçus sans méfiance, mirent des revolvers sous le nez des officiers et détraquèrent la T.S.F. Maîtres du navire, ils obligèrent les hommes à transborder la cargaison sur le Patara et sur d’autres goélettes brusquement survenues. Pendant ce temps ils buvaient, chantaient et s’amusaient beaucoup à menacer les Français de leurs revolvers, à jeter les bouteilles vides par les hublots, à piller les coffres et à démolir les mécaniques du bord. Puis ils partirent, laissant mille caisses à bord afin d’empêcher le capitaine pillé d’aller se plaindre aux États-Unis.

Le 25 mars 1952, la radio de Tanger signalait qu’un petit bateau, le Joss, venait de rentrer au port délesté de sa cargaison estimée 5 millions. Ses hommes racontèrent avoir été hélés, au large du cap Spartel, par une embarcation en panne de moteur qui demandait à être prise en remorque. Dès qu’ils eurent le filin, les gens de l’embarcation sautèrent à bord, masqués et mitraillette au poing. L’équipage fut ficelé et les marchandises déchargées sur la barque qui, moteur ressuscité, prit le large.

Hubert DESCHAMPS

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