jeudi 10 octobre 2024

Les systèmes d’armes létaux autonomes (rapport parlementaire du 22 juillet 2020)

L’enjeu du présent rapport consiste donc à aborder la question des SALA de manière objective, en faisant d’abord œuvre de pédagogie pour distinguer le mythe de la réalité. D’autre part, il s’agit aussi pour les rapporteurs de veiller à ce que le débat sur les SALA, quoique légitime au regard des défis posés par l’essor de l’autonomie dans les systèmes d’armes létaux, ne parasite pas les efforts consentis en matière d’intelligence artificielle de défense en général.

La première partie du rapport est consacrée à l’objet même des SALA. Le débat autour des SALA résulte pour l’essentiel d’une confusion entre l’autonomie et l’automatisation, c’est-à-dire une action programmée à l’avance. L’autonomie, du grec autos et nomos qui signifient respectivement « soi-même » et « règle », désignerait ainsi la capacité, pour un système, de s’assigner sa propre mission. Au cours des auditions, les rapporteurs se sont vus tout à la fois indiquer que les SALA existaient déjà, qu’ils n’existaient pas et ne pourraient pas exister, eu égard à l’état actuel des connaissances techniques, ou encore qu’ils n’existaient pas mais pourraient voir le jour à moyen terme. À l’issue des auditions, les rapporteurs partagent ce dernier point de vue, et c’est précisément la perspective de l’irruption prochaine de systèmes de plus en plus autonomes qui irrigue le présent rapport.

La deuxième partie porte sur les enjeux éthiques et juridiques soulevés par l’essor de l’autonomie des systèmes d’armes et l’éventuel développement des SALA, et ce faisant, sur leur encadrement international dans une logique de maîtrise des armements. L’emploi de SALA sur le champ de bataille pourrait bouleverser la nature des conflits armés et radicalement modifier les rapports de l’homme à la guerre. Sans remettre en cause la pertinence des principes du droit international humanitaire (DIH), qui fait l’objet d’un consensus parmi les États, l’emploi de SALA compliquerait leur respect. La France se distingue par ses contributions au débat en défendant une position que les rapporteurs jugent « réaliste », préférant un encadrement effectif et efficace à une interdiction préventive, qui serait vaine au regard de l’inexistence des SALA.

La troisième partie, enfin, souligne la nécessité pour la France de ne pas laisser le débat sur les SALA parasiter ses efforts dans le domaine de l’intelligence artificielle de défense. En effet, en l’absence de définition rigoureuse des SALA et d’un encadrement international au juste niveau, c’est le développement de l’intelligence artificielle en général qui peut être remis en cause. Par ailleurs, les grandes puissances militaires se sont lancées dans une nouvelle course aux armements, faisant courir à la France et à l’Europe le risque d’un déclassement stratégique, technologique et industriel. Dans ce contexte, la France n’est pas démunie et dispose d’atouts indéniables, d’autant qu’elle a établi une stratégie ambitieuse en matière d’intelligence artificielle de défense ; il s’agit désormais de conforter les actions entreprises par le développement de synergies à l’échelle européenne. Sans faire de concession sur ses exigences éthiques, la France a les capacités d’incarner une voie originale, fidèle à ses valeurs.

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