Nous pouvons l’espérer mais la période écoulée ne rend pas vraiment optimiste.
Je commencerai par les faits les plus récents qui en font que confirmer ce pessimisme.
D’abord la polémique permanente à la française
Le président de la République a évoqué lors du diner du CRIF les Français de souche et cela fait un tollé. Français de souche, cela tombe bien, je n’en suis pas un, étant un Français assimilé. J’ai donc une certaine saturation de ces polémistes qui veulent formater le langage, les mots, imposer leur manière de voir le Monde et finalement limiter la liberté d’expression. Cela valait bien la peine de défiler le 11 janvier 2015 (Cf. Mon billet du 11 janvier 2015). Nous luttons contre la propagande djihadiste mais par certains aspects, je me demande si nous sommes les mieux placés.
Ainsi des mots sont interdits, des tournures de phrase sont condamnées, les auteurs subissent un « bashing médiatique » ou des plaintes en justice comme islamophobes, racistes, antisémites, homophobes, fascistes… J’en oublie sans aucun doute. Par ce jeu des mots, le débat démocratique conduit à un débat tronqué et malsain mais qui satisfait une partie au moins de nos élites. Le résultat est sans aucun doute aussi cette absence de courage au mémorial de Caen qui a vu annuler la quatrième exposition dédiée à la liberté d’expression par la bande dessinée. La peur s’insinue, comme une gangrène et elle progresse.
Finalement, le Premier ministre est celui qui ose « dire » et curieusement personne ne réagit. Ainsi, nous sommes en guerre, il existe un ennemi intérieur, un apartheid existerait, mais aussi l’islam de France qui doit répondre avant tout aux besoins des Français musulmans, terme enfin employé cette semaine. Se préoccuper des Français et leur permettre d’exercer leur foi est légitime. Cependant leur problème est-il si réel que cela tant que des statistiques ne permettront pas de définir à quoi correspond la communauté musulmane vivant en France) …
Par ces polémiques incessantes, la France se déconstruit et je me demanderai si notre démocratie ne devient pas totalitaire.
Ensuite, sur les premières mesures d’urgence face au djihadisme
Nous ne pouvons ignorer les engagements des forces armées. Sur le territoire national, les forces armées voient leur déploiement prolongé au moins jusqu’en avril. En même temps, nos forces combattent dans le sahel. Le groupe aéronaval intervient en Irak alors qu’une centaine de soldats est déployée à terre.
Les premiers passeports aux futurs combattants français pour le djihad ont été retirés. Cependant, les contrôler avec les moyens réduits que nous avons et les garder chez nous, est-ce la bonne méthode ? Ils veulent faire la guerre à la France et à l’occident. Mieux vaut les laisser partir mais ne pas laisser revenir les survivants. La déchéance de la nationalité s’impose déjà pour les binationaux (Cf. Propos du général Irastorza du 28 février sur le site de l’ASAF). La question des nationaux devra être posée un jour ou l’autre même si le droit humanitaire ne s’y prête pas. Mais ce droit humanitaire, comme je l’ai déjà écrit, n’est plus adapté aux conflits du XXIe siècle. Il devra être amendé tôt ou tard.
Une autre mesure annoncée est cette réforme de l’Islam en France. A nouveau, l’exécutif tergiverse au point de ne pas vouloir toucher à la loi de 1905 sur la laïcité. L’hypocrisie française continuera à régner, ne pas choisir, ne pas changer. Or, cette loi ne devrait-elle pas l’être pour une période transitoire afin de favoriser un islam français ? La religion laïque a son poids mais n’a-t-on pas compris que la spiritualité religieuse ne pourra pas être interdite par la déesse Raison. Elle ne laissera pas non plus la place à une spiritualité laïque que certains préconisent. L’exception française n’est que française et ne reflète pas le monde réel qui nous entoure. Ne pas imposer des Français imams, continuer à accepter la domination des Etats musulmans en France est-ce une bonne politique ?
Enfin, mais cela n’est pas réglé, il faut dénoncer l’influence sinon l’importation du conflit israélo-palestinien et la focalisation autour des deux communautés juives et musulmanes en France. J’en ai personnellement assez de ce conflit qui ne se résout pas, qui joue sur les émotions vis à vis de ces communautés et surtout qui n’est pas le nôtre. Nous contestons l’engagement de français musulman au Moyen-Orient mais les franco-israéliens, soldats, dans l’armée israélienne sont-ils encore français et est-ce aussi acceptable ?
Vers une guerre longue qu’il faudra financer mais aussi rentabiliser.
Nous ne pourrons pas éviter de faire face à cette guerre idéologique et physique. La destruction du patrimoine de l’humanité en Irak (avec bien peu de considération pour le massacre de ses populations chrétiennes) montre les nouveaux barbares, fanatiques, incultes et obscurantistes que nous devrons combattre avec cependant cette interrogation sur les buts réellement poursuivis dans cette guerre à la fois militaire et subversive. Leurs chefs ont fait preuve d’une réelle intelligence mais est-elle stratégique ? Quel est l’état final recherché, la vision à long terme, peut-on se satisfaire de la création d’un califat ?
Pour notre part, autant la prendre de face avec résolution et prenons une vision stratégique qui ne peut se limiter à des mesures d’urgence. Comme le rappelait Louis Gautier, aujourd’hui secrétaire général à la sécurité et à la défense nationale, dans « Face à la guerre », publié en 2005 : « Nous n’échapperons pas au questionnement sur le recours à la force, la légitimité de nos engagements militaires et la nature de notre défense. Ceux qui se bornent à condamner la guerre par principe ou par absence de courage intellectuel ne la condamne pas réellement puisqu’ils ignorent ce qu’elle est »
Cette longue guerre contre les djihadistes aura un coût qu’il faut désormais prendre en compte et surtout estimer. Combien nous coûte l’insécurité djihadiste aujourd’hui financièrement, au titre des opérations les plus divers, de l’éducation nationale, de la sécurité intérieure, de l’anxiété de la population sur la demande intérieure … mais aussi coût sur la cohésion sociale ? Mais qui est capable de répondre parmi nos chercheurs ? Nos administrations ? Cette longue guerre pèsera et pèse déjà sur l’économie mais ne peut-on pas faire un facteur de croissance :
Il faut accepter d’aller vers plus de solutions y compris militaire, avec une logique de rentabilisation dans le long terme y compris dans la dépense publique. Le débat sur la dette publique implique la prise en compte de la sécurité nationale comme facteur hors champ de la réduction de la dette. Indirectement, compte tenu des enjeux, c’est une remise en cause du fonctionnement de l’Union européenne. Les élections à venir pourraient bien être la réponse à cette situation.