Jean Bruller, dit Vercors, né le 26 février 1902 à Paris 15e et mort le 10 juin 1991 à Paris, est un illustrateur et écrivain français.
Pacifiste jusqu’en 1938, il abandonne sous l’Occupation ses besognes artistiques et travaille comme menuisier. Il entreprend alors d’écrire le récit qui le rendra célèbre, Le Silence de la mer. Ce récit était initialement destiné au deuxième volume de la revue communiste La Pensée libre, à la demande de son ami Pierre de Lescure. Mais le projet en avait été suspendu, au profit d’un journal littéraire moins marqué politiquement et dont la fabrication serait moins risquée, Les Lettres françaises. Or, dans un journal de quelques pages, le récit ne pouvait plus paraître.
C’est ce qui décida Jean Bruller, qui avait quelque expérience d’imprimeur, et Pierre de Lescure, qui était bien inséré dans les réseaux littéraires, à se lancer dans l’aventure de fonder une maison d’édition clandestine. Le Silence de la mer est le premier ouvrage publié, sous le pseudonyme de « Vercors », aux Editions de Minuit. Tout en assurant, avec l’aide d’Yvonne Desvignes, la publication des manuscrits que lui fournissent Jacques Debû-Bridel et Paul Eluard, « Vercors » compose un deuxième récit, La Marche à l’étoile, où il retrace en partie l’itinéraire de son père qui quitta sa Hongrie natale par amour pour la France.
Ce n’est qu’à la Libération que « Vercors » a révélé son identité. Dans le débat déclenché par l’épuration des intellectuels, Vercors défend, la notion de « responsabilité de l’écrivain » contre les principes de « droit à l’erreur » ou de « charité » avancés par Paulhan et par Mauriac. Nommé, en sa qualité d’éditeur clandestin, à la commission d’épuration de l’édition, il la quitte en 01/1945, écœuré par la complaisance de ses membres à l’égard de grandes maisons comme Grasset. Il a rendu son indignation publique dans un article intitulé « La gangrène », recueilli dans Le Sable du temps, où il met en regard cette indulgence avec la condamnation à mort d’écrivains.
En 1948, les Editions de Minuit sont rachetées par la famille de Jérôme Lindon. « Vercors » quitte alors la direction de la maison et se consacre à son œuvre. L’expérience rapportée des camps de concentration lui inspire une réflexion, exposée dans « La sédition humaine », sur la définition de l’homme dont il trouve la spécificité dans la rébellion. On la retrouve, transposée en fiction, dans Les Animaux dénaturés et les contes philosophiques Colères et Sylva.
Il reste membre du CNE, qu’il préside de 1952 à 1956. Il a rendu compte de ses rapports conflictuels avec le parti dans un ouvrage intitulé PPC (Pour prendre congé). Après cette date il se retire de la vie publique et entreprend de rédiger ses mémoires. Après ses souvenirs de l’aventure clandestine (La Bataille du silence, 1967), il rédige, sous le titre Cent ans d’histoire de France (1981-1994), une trilogie alliant histoire et témoignage, et dont le premier tome est une biographie d’Aristide Briand à la première personne.
IN MEMORIAM – Jean BRULLER (décédé le 10 juin 1991)

M&O 287 de juin 2025
