Pour de Gaulle, le caractère est la première qualité d’une chef. Le général Mandon n’en manque assurément pas. Dès son second ordre du jour comme chef d’état-major des armées, il a pourfendu le « relativisme » qui « empêche d’appréhender correctement les menaces » et conduit au renoncement, il a nommé la réalité taboue de la mission de nos soldats : « ôter la vie de nos adversaires ». Le ton était donné.
La France peut compter sur ses soldats dans la tempête qui vient. Le premier d’entre eux s’en porte garant alors que jamais le monde n’a été aussi dangereux, ni les conflits armés aussi nombreux, depuis 1945. En Europe même, la Russie écrase l’Ukraine sous le feu et renforce son armée qui devrait atteindre son pic de puissance en 2030 ; on peut imaginer que ce n’est pas juste pour défiler sur la place Rouge.
Le mythe de la fin de l’histoire et du village global apaisé n’a plus cours. L’impensable est redevenu une hypothèse. La guerre est de retour, et il ne suffit pas de ne pas la vouloir pour y échapper. Nous avons voulu faire de l’Europe un espace ouvert, elle est devenue un espace de conquêtes.
Dans un monde qui se durcit, il est urgent de réapprendre à nous battre pour conserver notre puissance, notre sécurité et notre prospérité. Toute notre matrice cognitive est à reprogrammer en nous réappropriant les vertus oubliées de courage, de force et de civisme.
La Cité n’est pas défendue par des murs mais par ses hommes. L’armée d’un pays démocratique n’est pas coupée de la nation, elle en émane.
C’est ce qu’a rappelé le CEMA : « Si notre pays flanche parce qu’il n’est pas prêt à accepter de perdre ses enfants, parce qu’il faut dire les choses, de souffrir économiquement parce que les priorités iront à de la production Défense, si on n’est pas prêt à ça, alors on est en risque. Mais je pense qu’on a la force d’âme. La France a toujours démontré sa force d’âme dans les moments difficiles. »
La violence des mots choisis brise un tabou. Les « pertes » ne sont pas anonymes, ce sont bien nos enfants. L’abstraction des « morts pour la France » s’incarne. Elle retrouve des visages, et les plus chers de tous.
La guerre est un choc de volonté. On n’a de volonté qu’à la mesure de ce que l’on est prêt à perdre. A ce titre, nos compétiteurs ont reçu un message stratégique. Quand la France donne des garanties et se dit prête à se défendre, elle sait à quoi elle s’engage. En toute connaissance de cause. En toute responsabilité.
La Russie, nous livre une d’ores et déjà une guerre hybride dont un des aspects vise à nous diviser et à saper notre volonté de résistance. Ses narratifs épousent trois axes : une guerre en Europe ne concerne pas la France si ses frontières ne sont pas directement menacées (on nous a déjà fait le coup à Munich) ; le président Macron veut déclarer la guerre à la Russie pour faire oublier les questions intérieures comme les retraites (c’est accorder beaucoup de poids géopolitique à nos petits débats internes et flatter un ethnocentrisme inavoué en plus de nos passions partisanes) ; il est trop dangereux d’affronter la Russie pour d’y risquer (la version stratégique du regard que l’on détourne d’une femme qui se fait agresser dans le métro pour ne pas prendre un mauvais coup).
Nous sommes à l’heure des loups. Si nous nous montrions faibles, nous ne ferions qu’exciter la meute. La dissuasion ne se cantonne pas aux forces nucléaires. Les forces morales en font partie. Nous préparer au plus douloureux des sacrifices est le seul moyen de n’avoir peut-être pas à le faire en retenant nos ennemis, russes ou autres, de franchir certaines lignes rouges.
Mais un peuple qui retrouve ses vertus viriles au point de se dire prêt à voir mourir ses enfants plutôt que de se soumettre, et de le dire en ces termes impose le respect.
Si le pire devenait malgré tout inévitable dans les prochaines années, préparons-nous à frapper sans faiblesse et sans états d’âme. Faisons-le savoir. C’est irrésolution qui tue le plus.
Discours intégral du CEMA prononcé le 18 novembre 2025 devant le Congrès des Maires de France.
Monsieur le président de l’association des maires de France, mesdames et messieurs les maires de France, je suis vraiment impressionné. Impressionné parce que vous représentez nos territoires, vous représentez toutes les jeunes femmes et les jeunes hommes qui ont choisi de porter l’uniforme dans les armées françaises. Et donc, j’ai un petit peu l’impression de parler à notre pays, dans toutes ces dimensions, et à tous ceux qui représentent aussi la jeunesse qui est engagée aujourd’hui dans les armées et que j’ai la chance de commander.
Mais si j’ai accepté cet échange ou ce moment avec vous, c’est parce que le moment pour moi est particulièrement grave. Alors, je ne veux pas dépeindre un tableau trop noir, mais le président de la République me demande de lui permettre de protéger les Français et les Françaises, de protéger nos intérêts, de protéger notre pays dans toutes les circonstances. Et donc naturellement mon regard est comme le vôtre celui d’un homme de terrain. Mais je regarde au-delà de nos frontières l’évolution, et, très sincèrement aujourd’hui, je vois que toute l’anticipation qui avait été faite sur notre pays et qu’on trouve dans les grands documents d’évaluation stratégique de notre environnement, tout ça est en train de se concrétiser. Et malheureusement la dégradation s’accélère.
Et donc je pense que c’est important pour notre population et donc important pour vous, qui êtes le premier maillon au contact de nos concitoyens, d’avoir ce temps où je partage avec vous ce que je perçois du monde et des défis de sécurité pour nous.
Donc tout d’abord un petit panorama entre nous de ce qui se passe autour de nous et après peut-être, dans un deuxième temps, de manière concrète, ce que l’on peut faire ensemble pour aider notre pays à être au rendez-vous des défis.
Désengagement des États-Unis
Premier grand phénomène. On a un désengagement des États-Unis de l’Europe. C’est quelque chose qui pour nous était quasiment impossible parce que : « pays de la liberté », pays proche, pays qui a participé à notre libération du joug allemand, pays avec lequel on a des relations extraordinaires dans tous les domaines. Et pourtant, depuis plusieurs présidents américains, de manière constante, on voit que dans le domaine de la défense, les États-Unis sont en train de se concentrer sur l’Asie. Et très concrètement, il y a quelques semaines, les Américains ont décidé de retirer leurs troupes de Roumanie où ils avaient plusieurs milliers de soldats, dans un moment où la guerre est sur notre continent. Les Roumains ont été menacés par les Russes au début de l’attaque de l’Ukraine, les Américains retirent leurs forces du flanc est de l’OTAN. Ils ne les retirent pas totalement. Ça n’est pas un désengagement brutal. Ce qui permettra aux optimistes d’espérer qu’ils vont rester.
Le film, si on le regarde depuis 20 ans, c’est un mouvement inexorable de bascule vers l’Asie. Des partenaires militaires de grande qualité avec lesquels je peux échanger régulièrement me disent : « On est préoccupé de l’évolution de la Chine ». Et je sais que pour vous la Chine, c’est déjà une empreinte économique avec des exploitations de bois, des relations commerciales, des opportunités et on observe tous l’économie chinoise qui est aujourd’hui très présente. On voit les véhicules chinois dans nos rues avec, aujourd’hui, une bascule du « made in China » à « made by China ». Nos enfants, nos parents qui ont les téléphones Huawei en main.
Puissance militaire chinoise
Donc la Chine est une puissance démographique, ça, on le savait, ce n’est pas nouveau. Elle est devenue une puissance économique majeure et dans le domaine militaire. Aujourd’hui, la Chine pose un problème de puissance militaire aux États-Unis. Elle est capable de faire ce qu’il y a de plus perfectionné dans tous les domaines. Et pour ceux qui ont regardé, les images très mises en scène du 3 septembre en Chine, le président chinois accueillait un ensemble de leaders, il a fait défiler ce qu’il y a de mieux au monde aujourd’hui en termes d’équipement militaire, des drones aux satellites, aux missiles balistiques, à des forces qui défilaient avec une rigueur et un ordre extraordinaire.
Il a fait la démonstration de sa puissance militaire. Pour l’instant, la Chine ne l’utilise pas. Elle est toujours dans une logique de puissance douce, qui s’affirme doucement, dans son environnement proche, et qui va conquérir, souvent par une approche économique, des territoires, un peu plus d’emprise et un peu plus d’influence. Je pense en particulier à nos outremers, Polynésie, Nouvelle-Calédonie, où la pression des ressources s’exerce doucement mais fermement.
Aujourd’hui, quand je regarde la pénétration des zones économiques exclusives autour de la Nouvelle-Calédonie ou autour de la Polynésie, les endroits où la France, où les armées françaises sont présentes, notre souveraineté est respectée. Mais partout ailleurs, la prédation s’exerce, sur la pêche, les ressources naturelles. Et la Chine est un de ces acteurs de prédation.
Donc vous avez deux grands acteurs. Un qui est en train de se séparer progressivement de l’Europe en termes de priorité pour se concentrer vers la Chine et une Chine qui s’affirme comme puissance avec le risque de confrontation avec les États-Unis.
Aujourd’hui, vous avez au Pentagone une horloge, visible de tous les officiers qui servent au Pentagone, qui décompte tous les jours jusqu’en 2027. Parce que pour les États-Unis, en 2027, la Chine s’empare de Taïwan et rentre dans la confrontation. Ce que je veux dire, c’est que ce ne sont pas uniquement des analyses de renseignement. Vous avez la première puissance mondiale aujourd’hui qui affiche au cœur de sa défense un horizon 2027 et d’affrontement possible.
C’est pour moi les deux premiers éléments d’évolution de notre contexte qui vont définir les paramètres de notre sécurité.
Confrontation avec la Russie
Le troisième point bien sûr, et nous avions hier la visite du président Zelensky à Paris, c’est la guerre sur notre continent depuis maintenant presque 4 ans et ce n’est pas un premier événement. C’est-à-dire qu’en 2008, la Russie décide d’attaquer la Géorgie. En 2014, elle s’empare de la Crimée. En 2022, elle relance une attaque en Ukraine en s’emparant de quatre régions qu’elle a quasiment conquises aujourd’hui. Donc, quand on regarde ce film : 2008, 2014, 2022, il n’y a aucune raison d’imaginer que c’est la fin de la guerre sur notre continent. Malheureusement.
Malheureusement, la Russie aujourd’hui, je le sais par les éléments auxquels j’ai accès, se prépare à une confrontation à l’horizon 2030 avec nos pays. Elle s’organise pour ça, elle se prépare à ça et elle est convaincue que son ennemi existentiel, c’est l’OTAN, ce sont nos pays.
Groupes terroristes en Afrique
Je continue mon tour d’horizon, en quittant notre continent et en allant vers l’Afrique. En Afrique aujourd’hui, sur l’Afrique proche, on a naturellement toutes les conséquences du réchauffement climatique et tous les différentiels économiques qui font que la pression migratoire, les défis climatiques, les catastrophes naturelles vont se poursuivre et vont provoquer des éléments qui peuvent déstabiliser des États et induire des crises régionales potentiellement plus larges.
Deuxième phénomène, peu de temps après le triste la triste commémoration des attaques terroristes de Daesh à Paris : aujourd’hui, les leaders terroristes qui étaient autrefois basés au Levant, proche Moyen-Orient et Afghanistan, sont en Afrique.
Une Afrique dans laquelle le Sahara est profondément déstabilisé avec de nombreuses juntes qui sont arrivées au pouvoir, qui n’arrivent pas à stabiliser la sécurité dans leur pays. Vous avez en ce moment à Bamako au Mali… Vous vous souvenez il y a 12 ans, nous intervenions au Mali pour éviter que Bamako tombe dans la main des djihadistes. Aujourd’hui, vous avez des djihadistes qui empêchent l’approvisionnement en essence de la capitale. Avec une junte qui a fait appel à des corps expéditionnaires russes pour se protéger, pour essayer de rétablir une sécurité. Ils n’y arrivent pas. En revanche, ils arrivent bien à préempter toutes les richesses du pays.
Nous observons que les techniques des drones qui sont utilisées aujourd’hui sur notre continent dans la guerre entre l’Ukraine et la Russie, c’est-à-dire la capacité à utiliser des drones en portant des charges explosives, cette technique est apprise par les groupes terroristes au Sahel. Donc là aussi sur notre rive sud, des phénomènes préoccupants pour notre sécurité. Aujourd’hui, on n’a pas eu d’attaque préparée et organisée depuis le continent africain, mais il y a une évolution préoccupante des groupes terroristes, de leur emprise sur des régions entières. Et aujourd’hui la pression s’exerce sur les pays côtiers de l’Afrique niveau Atlantique et on sait qu’on a aussi un problème sur la corne est de l’Afrique.
Paix menacée
Le proche et Moyen-Orient. La situation n’est pas bonne non plus.
Malheureusement, vous avez tous assisté à cette terrible attaque du 7 octobre contre Israël. La barbarie à l’état pur, la barbarie la plus absolue. Et s’ensuit un combat qui s’est étendu progressivement de Gaza à l’ensemble de la région avec des bombardements et des tirs de missile entre l’Iran et Israël. Des groupes terroristes au Yémen qui menacent la circulation du flux économique mondial en mer Rouge où nos frégates interviennent, où nos avions interviennent pour protéger la circulation du trafic commercial.
Bon, forcément ce portrait est très noir et j’en suis désolé mais je crois qu’il faut le dire. Parce que nous avons la chance d’avoir grandi et de vivre dans un monde en paix. Dans nos sociétés qui ont vécu l’atrocité de deux guerres mondiales et qui vivent depuis des décennies dans un environnement pacifié et pensant que la paix était définitivement acquise. Malheureusement tout ce qui se passe autour de nous, nous montre que certains ont fait le choix de la force.
Et la Russie aujourd’hui est convaincue que les Européens sont faibles. Elle en est convaincue.
Et pourtant, et c’est là que j’aimerais quand même vous dire tout l’optimisme qu’il faut avoir, pourtant, nous sommes forts. Nous sommes fondamentalement forts. Nous sommes fondamentalement plus forts que la Russie. Mais il faut accepter que nous vivons dans un monde en risque et que nous pouvons devoir utiliser la force pour protéger ce que nous sommes. C’est quelque chose qui était complètement sorti de nos discussions familiales, je pense. J’imagine que dans vos communes, il est rare que spontanément nos concitoyens parlent du danger posé par la Russie. Le terrorisme nous a profondément marqués et je pense que l’action de nos soldats, des forces de sécurité intérieure, des patrouilles de sentinelle, pour ceux qui les vivent, rappellent le risque terroriste.
Europe militaire forte
Le principal risque aujourd’hui, c’est un risque de forme de faiblesse face à une Russie qui est décomplexée dans l’usage de la force et qui poussera son avantage si elle sent qu’on reste faible. La Russie au début du conflit en 2022, c’est moins d’un million d’hommes et de femmes sous l’uniforme. Aujourd’hui, c’est 1,3 million. Leur projection en 2030, ce n’est pas loin de 2 millions. 40% de son économie va à l’industrie de défense. Aujourd’hui, la Russie produit plus d’équipements de défense qu’elle n’en consomme sur le front. Elle est clairement dans une phase de préparation de quelque chose d’autre. Alors, les Européens collectivement sont largement plus forts que la Russie. C’est pour ça que je pense qu’il ne faut surtout pas être pessimiste. Les Européens réunis, c’est plus d’1,4 million de femmes et d’hommes qui portent l’uniforme, qui sont prêts à défendre les valeurs de leur pays. C’est une industrie extraordinaire. On a, en France, des techniciens, des ingénieurs, des chefs d’entreprise qui savent produire ce qu’il y a de mieux au monde.
Je vais prendre le cas d’un système qui a été présenté hier au président… ukrainien. L’une des principales menaces aujourd’hui en Ukraine, ce sont tous les tirs de drones et de missiles qui partent chaque nuit de Russie vers l’Ukraine, pour atteindre les centres énergétiques, l’électricité, les centres d’entraînement, les villes, pour rompre le moral des Ukrainiens. L’Europe a créé depuis quelques années un système qui s’appelle SAMP/T, qui est fabriqué avec les Italiens et en lien aussi avec le Royaume-Uni. Je pense que tout le monde a entendu parler des systèmes américains Patriot qui sont le symbole de cette capacité à se protéger contre des missiles et des avions. Les Ukrainiens nous expliquent aujourd’hui que le système fait par les Européens, et donc par des ingénieurs et des techniciens français, marche mieux que le meilleur des systèmes américains. D’accord ? On a tout le savoir, toute la force économique, démographique, pour dissuader le régime de Moscou, d’essayer de tenter sa chance plus loin. Ce qu’il nous manque, et c’est là que vous avez un rôle majeur, c’est la force d’âme pour accepter de nous faire mal pour protéger ce que l’on est.
Force d’âme
Les armées, c’est un extrait de la nation. Les femmes et les hommes, qui sont aujourd’hui employés partout dans le monde, ont entre 18 et 27 ans sur le terrain. Ils sont jeunes, ils viennent de vos communes, ils ont les mêmes aspirations. Ils tiendront dans leur mission s’ils sentent que le pays tient avec eux. Si notre pays flanche, parce qu’il n’est pas prêt à accepter de perdre ses enfants, parce qu’il faut dire les choses, de souffrir économiquement parce que les priorités iront à de la production de défense par exemple. Si on n’est pas prêt à ça, alors on est en risque. Mais je pense qu’on a la force d’âme.
La France a toujours démontré sa force d’âme dans les moments difficiles. Et là, on est dans le moment où il faut en parler. Il faut en parler dans vos communes parce que spontanément, ce ne sont pas des lectures du dimanche, ce n’est pas quelque chose d’accessible facilement. On peut avoir le sentiment que c’est loin et c’est vrai que ça reste loin. La mécanique ce n’est pas des chars russes qui débarquent en Alsace. La mécanique c’est une mécanique de solidarité.
C’est une mécanique de solidarité avec des pays qui sont aujourd’hui sur le flanc est de l’Otan qui pourraient être attaqués et qu’on ira protéger par solidarité. Et à partir du moment où on s’engage en solidarité, à ce moment-là, on engage les jeunes femmes et les jeunes hommes qui ont choisi de servir sous l’uniforme.
Donc moi, j’ai donné aux armées un objectif qui est d’être prêt dans trois à quatre ans, mais j’ai besoin que la nation soit prête à soutenir cet effort si on devait le faire. Je suis convaincu, je vous le dis, je suis convaincu que si nos ennemis voient notre détermination à nous défendre, à protéger ce que nous portons comme valeur, comme histoire, ils iront voir ailleurs parce qu’ils savent que nous sommes plus forts. Mais il faut en faire la démonstration et c’est dans les trois années qui viennent. C’est fondamental.
Le deuxième, c’est que vous avez aujourd’hui les armées les plus performantes en Europe. La France peut s’enorgueillir d’avoir une armée de référence en Europe. Les Européens nous observent. Et la bonne échelle pour faire face au défi dont j’ai parlé, c’est le collectif. C’est comme en sport. On peut être le meilleur ailier au rugby, s’il n’y a pas toute une équipe avec nous… Ça, c’est pour ceux qui viennent du sud-ouest ou d’autres parce qu’il y a de très bons clubs ailleurs… On ne peut pas jouer au rugby en individuel, c’est du collectif.
Donc, de la même manière, notre défense sera solide si on joue collectif avec les Européens. Et la France a un rôle de leadership parce qu’elle est vue comme un leader en Europe là-dessus.
L’engagement
Le troisième point, c’est le lien avec notre pays, le lien avec notre nation. C’est le choix de l’engagement des réservistes. Vous savez, les armées, c’est 200.000 personnes. Statistiquement cinq personnes par commune si je fais la division. Ce n’est pas grand-chose. C’est beaucoup mais ce n’est pas grand-chose. Au-delà de ces 200.000 militaires, vous avez des réservistes et on va multiplier par deux le volume de nos réserves sur les années à venir. On va aller vers 80.000 réservistes. Ces réservistes, ils viennent aussi de vos communes.
Ça fait partie des forces vives. Vous avez un rôle particulier et c’est la dernière partie de mon intervention.
Je pense que vous avez un rôle fondamental. Là encore, moi je crois beaucoup à l’équipe. On peut parler de défense à Paris, c’est fondamental. Elle se réfléchit ici, elle se conçoit ici. Mais il faut que nos concitoyens puissent échanger avec vous et que vous puissiez expliquer ce que vous avez perçu des enjeux de défense. Parce que notre défense, elle se construit localement. La conscience, elle est locale et vous êtes les meilleurs relais. Vous êtes celles et ceux qui ont le courage dans votre mandat et vous êtes au contact de nos concitoyens.
Donc, j’ai besoin que vous puissiez partager cette vision.
Elle va susciter des inquiétudes et des questions. Vous avez des correspondants défense. Je pense qu’on est dans un moment où les correspondants défense ont un rôle majeur. Il y a des périodes de paix dans lesquelles cette fonction-là a pu être une des dernières priorités dans vos mandats ou dans vos choix. Aujourd’hui, la défense a un rôle clé dans le débat.
Et je mesure à quel point aujourd’hui notre nation fait des efforts pour sa défense. Ce sont des impôts en pratique qui permettent à notre défense de se renforcer. Ce qui de mon point de vue est nécessaire et qui, pour moi, est une exigence quotidienne dans les choix que je fais d’avoir le meilleur usage du denier public et de l’effort de la nation. Mais il faut l’expliquer. Je pense qu’il n’est pas spontané pour nos concitoyens de savoir que l’effort dans la défense française, ce sont des emplois. C’est de la valeur ajoutée dans nos régions, dans nos départements, dans nos communes parce que la France est souveraine, c’est-à-dire qu’elle veut garder la maîtrise de son destin…. Notre outil de défense dépend de nous. Tout ce qui est stratégique et fait en France. Pour 1 € investi dans la défense, c’est 1,65 de retour sur nos territoires.
Parce qu’on n’a pas fait le choix d’acheter sur étagère aux États-Unis et on en est très heureux. Et c’est pour ça qu’il faut poursuivre cet effort au niveau européen, que les Européens habitués après la Seconde Guerre mondiale à avoir été équipés par les États-Unis décident plus fermement de s’équiper dans nos régions. Parce qu’on a les savoir-faire et on peut maîtriser notre défense demain. En tout cas plus qu’aujourd’hui.
Vous avez des délégués militaires départementaux qui sont également à votre disposition, dans chaque département, pour faire le lien entre vos préoccupations et, j’en ai bien conscience, un monde de la défense qui est complexe, qui a son langage pas forcément facile à comprendre.
Vous avez des commandants de régiment, des commandants de base, des commandants de base navale, qui sont également là pour être à votre disposition et faciliter ce travail de pédagogie vers nos concitoyens. C’est la mission que je leur confie et il ne faut pas hésiter à les solliciter.
Base arrière des armées
Moi, j’ai besoin de vous aussi parce que, aujourd’hui, mais encore plus potentiellement demain, si on est en situation de crise, vous êtes la base arrière des armées et nos soldats se battront l’esprit libre s’ils savent que la base arrière tient. C’est fondamental. La base arrière, c’est la capacité pour des femmes et des hommes qui déménagent souvent d’être capable de trouver une place en école, en crèche. C’est une capacité à trouver un logement.
Statistiquement, un officier déménage tous les deux à trois ans, un sous-officier tous les dix ans. La problématique est moins intense. Mais aujourd’hui, dans les préoccupations qui me sont exprimées par nos armées, la famille vient en numéro un, parce qu’il est difficile de trouver un emploi et parce que les dates d’affectation sur la carte de France sont souvent tardives et qu’il devient difficile de trouver une place à l’école. Or, ça, c’est pour moi des critères majeurs pour garder les talents. J’ai besoin de vous pour m’aider à garder les talents dans les armées françaises. Quand des gens brillants, parce que les armées recèlent des talents, quand des gens brillants n’arrivent plus à soigner leur famille, ils vont voir ailleurs, aujourd’hui, et ils ont des qualifications pour trouver ailleurs.
Vous êtes aussi, et je pense en particulier pour notre armée de terre, des acteurs clés pour permettre un bon entraînement de nos forces. Vous êtes, j’imagine, sollicités pour certains pour permettre des activités où nos armées traversent vos régions, vos communes dans des grandes manœuvres. On va en faire, on va poursuivre ça. On a besoin de ça. Parce que pour travailler contre des groupes terroristes, on peut le faire dans des espaces assez confinés. Pour imaginer des manœuvres à l’échelle de certains ennemis qu’on imagine, on a besoin d’espace. Donc, s’il vous plaît, essayez d’avoir un regard positif sur ces activités, même si je suis conscient qu’elles peuvent occasionner des gênes, des perturbations. Certains appelleront ça des nuisances. Mais en tout cas, on a un réseau qui permet de préparer ça le plus en amont possible pour réduire au maximum l’impact pour vos concitoyens.
Enfin, vous êtes des gardiens de la mémoire. Là aussi, on a tous une attache à un village, à une commune, à son histoire. Et cette histoire, c’est la mémoire des anciens qui est transmise de génération en génération. C’est aussi les monuments aux morts et ce sont les moments de commémoration où on se souvient de pourquoi ces personnes se sont battues, pourquoi elles ont donné leur vie et le sens à tout ça. Et il n’y aurait pas de sens aujourd’hui à arrêter ce que des générations ont fait pour nous. Donc je pense que le rôle de mémoire aujourd’hui est fondamental et je sais à quel point vous faites des efforts pour l’entretenir dans vos communes. Pour moi, ça fait partie des éléments qui construisent la fibre profonde de la résistance française.
Voilà, j’aimerais vous dire que nous sommes là pour vous, nous sommes là pour l’ensemble des Français, pour assurer leur défense, que j’ai aucun doute sur la solidité des armées françaises. J’ai aucun doute sur la solidité des armées françaises. Je sais qu’on sera au rendez-vous et je sais que nos compétiteurs, ceux qui déposent des têtes de cochon coupées devant des mosquées, ceux qui inventent des histoires de punaises de lit, nous écoutent et le savent.
Mais il faudra le montrer. Il faut montrer qu’on a cette volonté à nous protéger.
Ce sont des choix qu’il y a en ce moment sur le budget. C’est la pédagogie vers les Français qui font beaucoup d’efforts. Je le mesure dans un moment où il y a beaucoup d’attentes dans des domaines clés de notre vie, de santé, d’éducation, de modèle social. Mais cet effort me paraît indispensable au regard des défis qui se présentent à nous.
J’aimerais terminer en vous remerciant parce que je l’ai vécu en vivant dans une très belle région en exerçant des responsabilités en Berry où j’ai pu nouer des attaches qui restent pour moi très chères. Je sais à quel point vous êtes engagés. Je sais à quel point vos activités sont complexes et demandent beaucoup de courage. Je peux vous assurer que vous avez des armées qui sont aujourd’hui très engagées, très conscientes des efforts de la nation mais très conscientes des défis et qui s’y préparent. Et la certitude à mon niveau qu’on est dans un moment où on doit expliquer à nos concitoyens les défis de défense qui se présentent à eux, c’est ce qui justifie l’effort de défense qu’ils réalisent et c’est ce qui justifie toute notre histoire pour protéger notre liberté.
Voilà, je tiens à vous remercier et si vous aviez quelques questions, je me tiens à votre disposition.






