La 7e édition du Marrakech Security Forum a réuni, les 12 et 13 février 2016, plus de 200 experts civils et militaires, venus du monde entier, pour réfléchir sur le thème « l’Afrique dans la guerre contre le jihadisme international ». Cette rencontre internationale, organisée par le Centre marocain des études stratégiques (CMES) a été l’occasion pour l’ensemble des panélistes de mettre l’accent la menace grandissante que représente le terrorisme international pour la stabilité et la prospérité dans le monde et plus particulièrement en Afrique qui est aujourd’hui au cœur de ce combat dans la mesure où il existe de nombreuses zones représentant des vulnérabilités énormes.
Les travaux ont porté sur divers aspects sécuritaires et la nécessité de la mise en place d’une stratégie globale dans la lutte contre le terrorisme, dans la mesure où selon Mohammed Benhamou, directeur du CMES, le continent « a besoin d’une réponse globale aux vecteurs majeurs de l’insécurité dont font partie les groupes qui recourent au terrorisme ». Les participants ont abordé des questions comme les fragilités sécuritaires en Afrique du nord, la progression des menaces transnationales asymétriques, les conflits mal éteints de la zone sahélo-saharienne ou le risque d’un nouveau cycle de violences, la nébuleuse de terrorisme en Afrique ( Daech, AQMI, Chebab, Boko Haram…), les défis de la sécurité maritime, les combattants terroristes étranger, L’Afrique face à la cybercriminalité et au cyber-terrorisme etc.
Akwasi Opong-Fosu, ministre d’État au Ghana, a souligné la nécessité d’une stratégie globale adaptée pour faire face à ce fléau qui menace la dynamique de développement de nombreux pays africains. Cette idée a aussi été développée par le chef de la Direction générale du renseignement extérieur (DGRE) du Sénégal, l’amiral Samba Fall, a noté que face à « des menaces mutantes », la coordination sécuritaire et du partage de renseignement entre les États africains revêt un caractère crucial. Si « chaque pays fait de son mieux pour limiter les dégâts les collaborations interétatiques sont désormais incontournables », surtout que les groupes terroristes profitent de l’existence de frontières poreuses entre les États qui, souvent, sont à court de moyens militaires et humains pour exercer un contrôle effectif sur de vastes étendues désertiques comme c’est le cas des pays sahélo-sahariens. Pour sa part, le professeur Charles Saint-Prot, directeur général de l’Observatoire d’études géopolitiques de Paris, a affirmé en séance plénière que « l’Afrique subit les effets déstabilisateurs du conflit artificiel entretenu autour du Sahara marocain, par le groupe séparatiste du Polisario basé en Algérie ». Il a rappelé les liens entre des membres du Polisario avec les narcotrafiquants, les mafias locales et les organisations terroristes, ce qui, selon lui, justifierait de classer le Polisario sur la liste des groupes terroristes.
Le modèle marocain
L’attention a également été attirée sur la nécessité du combat antisubversif en matière religieuse. Sur ce point, Charles Saint-Prot, qui est un expert dans ce domaine, a estimé que « la réponse au terrorisme et à la radicalisation ne peut être seulement militaire ou policière mais consiste également à combattre l’ignorance qui nourrit la radicalisation. Les extrémistes ont instrumentalisé la religion à des fins politique, par conséquent le combat est aussi idéologique. C’est ici qu’il faut mettre en exergue l’exemple du Maroc qui est le meilleur rempart contre le danger de fanatisme religieux dans la région ». Le secrétaire général de la Rabita Mohammadia des Oulémas, Ahmed Abbadi, a évoqué la restructuration du champ religieux « qui, dans le modèle marocain, repose sur une vision claire basée sur le rite malékite et favorise une formation clairvoyante et modérée des imams. » Après avoir rappelé que la maitrise du champ religieux et l’action conduite sous l’autorité du Roi, Commandeur des Croyants, place le Maroc en pointe dans la lutte contre la déviance extrémiste, M. Abbadi a rappelé l’assistance fournie par le Maroc aux États africains en matière de formation des imams, notamment par l’intermédiaire de l’Institut Mohammed VI pour la formation des imams et la fondation des oulémas marocains et africains. C’est à la lumière de ces faits que la présidente de l’Institut des études africaines russe, Irina Abramova, estime que « le Maroc reste aujourd’hui l’un des rares pays de la région, où le terrorisme international n’a pas de racines profondes, grâce à la vision globale du Maroc en matière sécuritaire»
Renforcer la coopération internationale
Dans la résolution finale, les participants ont relevé l’impératif de renforcer la coopération internationale pour stopper l’expansion de ces structures extrémistes qui n’ont pas de frontières. Le texte souligne l’importance de prendre des initiatives politiques nationales en vue d’encourager certaines catégories de combattants enrôlés dans les mouvements terroristes à quitter lesdits mouvements et bénéficier de programmes spéciaux de réintégration. Il insiste également sur la nécessité de mettre en place une plateforme internationale dédiée exclusivement à la prévention du terrorisme dans le domaine du renseignement et de mettre en œuvre, dans tous les États africains, une stratégie globale en matière de sécurité des systèmes d’information.
La déclaration insiste particulièrement sur l’impératif de prendre en charge la gestion du champ religieux au niveau de chaque État pour prévenir l’instrumentalisation de la religion à des fins de subversion. Elle relève la nécessité de renforcer et cultiver dans tous les pays les valeurs de citoyenneté, de développer les capacités d’anticipation pour faire face aux risques et menaces, de promouvoir le partenariat à travers une coordination locale, régionale et internationale et de partager les informations et les expériences au niveau régional et sous-régional. Enfin, les participants soulignent la nécessité de trouver des solutions durables aux phénomènes de rébellion et de séparatisme qui constituent «une véritable base arrière» des mouvances terroristes.