Quatre de nos camarades ont été tués hier et plusieurs blessés suite à une attaque suicide. Que peut-on y faire ? Malheureusement, pas grand-chose et rien ne pourra empêcher l’action de candidats déterminés au suicide (voir Bruxelles2 pour l’état des pertes de l’OTAN). Le chef de l’Etat et le ministre de la défense ont déjà pris la mesure de leurs lourdes responsabilités et font face. Ayons une pensée pour nos soldats et leurs familles. J’ai aussi une pensée pour ces interprètes afghans qui sont un apport essentiel aux missions de nos forces en Kapisa. Ils ont aussi servi la France à leur manière.
Cet attentat a donc coûté la vie à des soldats courageux dont le métier était d’aller au contact des populations, d’expliquer la présence de la France et de l’OTAN, de contribuer à limiter autant que possible les conséquences négatives de la guerre en améliorant les conditions de vie des Afghans, de comprendre aussi les facteurs socioculturels qui construisent les populations côtoyées. Les soldats qui ont été tués l’ont été alors qu’ils étaient là pour aider les populations locales et atténuer les rigueurs de la guerre contre-insurrectionnelle. Il ne faut pas l’oublier. Effectivement c’était des « non-combattants » comme les ont qualifiés certains médias mais un soldat en mission opérationnelle peut-il être considéré comme un non-combattant ?
L’OTAN et la France ont décidé de prendre en compte l’environnement humain des opérations depuis les années 1990. Ainsi le groupement interarmées (Terre, Air, Mer, directions et services) d’actions civilo-militaires a été créé à Lyon suite aux propositions faites en mai 1999 au chef d’état-major de l’armée de terre. Le groupement des opérations militaires d’influence a été créé au début des années 2000 à Lille. Aujourd’hui, conformément à la doctrine d’emploi des forces de 2011, il s’agit avant tout de prendre en compte l’environnement humain des opérations, en l’occurrence les populations au milieu desquelles nos troupes évoluent. Cependant, ce ne sont pas des « hommes du renseignement » comme l’affirme Jean Guisnel sur le site du Point aujourd’hui. Ils n’en font pas plus que les autres soldats déployés sur le terrain.
Les ETOMI (équipe tactique « opérations militaires d’influence » créée dans le cadre de la doctrine des Psychological operations de l’OTAN en 2007 et des opérations militaires d’influence en France en 2008) sont des équipes de deux à trois hommes déployés en appui des forces de l’Otan pour expliquer les raisons de leur présence ou les objectifs des opérations aux populations au contact des troupes occidentales. En France, ces équipes sont formées au sein des unités déployées (infanterie, arme blindée, artillerie) en raison des effectifs limités du groupement des opérations militaires d’influence (GOMI) qui rassemble, forme les spécialistes des opérations militaires d’influence (et non PSYOPS comme l’écrit JD Merchet, je fais partie des puristes – avec de bonnes raisons – qu’il évoque). En république de Côte d’Ivoire, les équipes ETOMI et CIMIC employées ensemble ont grandement facilité l’opération Licorne. Ce mode d’action a été repris en Afghanistan.
Donc rien de très secret. Tous les documents d’emploi sont en ligne.
Le GOMI et le GIACM ont été rassemblés à Lyon pour constituer le 2 juillet 2012 le centre interarmées des actions sur l’environnement. Cela pourrait aussi être un événement où le souvenir des camarades tombés pourra être rappelé.