Cette question mérite d’être posée. Déjà deux ministres des armées en un mois quand on est en guerre peut susciter quelques inquiétudes. Ensuite, au nom de la parité, mettre à la tête d’un ministère éminemment masculin deux femmes sans expérience des questions militaires, n’est-ce pas avoir bien peu d’estime pour la communauté militaire malgré les grands témoignages de sympathie du nouveau président dès sa prise de fonction ?
Finalement, dans le rôle habituel de la variable d’ajustement assurée par les armées, que ce soit par l’image – la parité avant la compétence technique – ou par les promesses qui ne seront sans doute pas tenues en terme de budget de la défense, le président de la République a-t-il réellement la volonté de s’engager dans le réarmement des forces armées ?
Pour ma part, j’en doute pour plusieurs raisons.
Avoir pour ministre une experte « budgétaire » et en rationalisation des effectifs, ce qui veut dire une reprise potentielle des diminutions d’effectifs, n’est pas le meilleur signal à donner d’autant qu’en son temps, sous un gouvernement qui a largement engagé la désorganisation des armées, le gouvernement Jospin, Florence Parly était obligatoirement au premier rang des coupes budgétaires.
Aujourd’hui, elles existent toujours et les 2,4 milliards d’euros gelés par le précédent gouvernement n’ont pas été rendus aux armées malgré une (simple ?) tentative de l’éphémère Sylvie Goulard. Le gouvernement ne semble pas presser de soutenir ce combat budgétaire et Bercy reste la bête noire des armées. Si on ajoute que la haute technocratie de gauche comme de droite, est aux affaires, inquiétons-nous.
Ensuite, observons le cabinet du ministre des armées Sylvie Goulard et pour l’instant sans changement. Hormis l’affectation de deux ingénieurs de la délégation générale pour l’armement qui montre la priorité donnée aux ventes d’armes, aucun militaire n’est visible. En bref, le ministère des armées est aujourd’hui dirigé par deux femmes sans connaissance de l’institution et entourées de civils n’en connaissant pas forcément plus. Dans les autres ministères, experts et énarques se positionnent en grande partie par leurs compétences techniques. Au ministère des armées, surtout pas d’experts ou de professionnels des questions militaires autour du ministre.
En bref, la civilianisation du ministère continue. Il est vrai que l’infantilisation du militaire n’est pas nouvelle. Nous avons bien eu le droit de vote après les femmes ! J’ajouterai aussi ce commentaire récent d’une haute responsable du ministère des armées : être une femme et une civile était sans doute le meilleur moyen de faire passer les messages des militaires, notamment aux autres ministères. Je vous laisse juge des conclusions que nous pouvons en tirer. Quelle est la réelle considération qui nous est réellement portée?
Pour conclure, je ne suis pas le seul à douter de la volonté de ce gouvernement à renforcer les armées désormais. Ainsi le magazine Challenge rapporte que le général Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées, « a déjà fait savoir à la nouvelle ministre, Florence Parly, qu’il n’était pas question qu’il puisse être prorogé dans ses fonctions par le gouvernement si le budget 2018 de la défense n’était pas conforme à ses vœux ».
Il va falloir gagner la confiance de la communauté militaire et dans le contexte politique actuel, il y a du travail.