jeudi 25 juillet 2024

Art, histoire et respect

Etonnement sur une photo vue dans le TGV Magazine de juillet-août (Cf. aussi le site de 20 minutes). Certes, je réagis avec un peu de retard mais est-ce une raison pour se taire ? Non.

Pour lancer le « voyage à Nantes », voyage urbain dans la ville, Tatzu Nishi, un artiste japonais sans doute connu, a montré tout son « savoir-faire » dans l’art moderne, le manque de respect à un officier général et à un des acteurs de l’histoire de France. Le général Mellinet a servi la France pendant 50 ans, avec loyauté et fidélité comme tout soldat quatre régimes politiques successifs.

Se faire « récompenser » ainsi par sa ville d’origine est assez lamentable.

Cette photo montre donc la mise en place le 13 mars 2015 à Nantes d’objets de tout genre (Une pile de livres, un bureau, un lavabo, un radiateur, un piano, un porte-manteau, un lit, le tout suspendu) sur la tête de la statue du général Mellinet. Certes, cela était une œuvre éphémère mais était-ce vraiment de l’art, même éphémère ? Sans vouloir épiloguer sur ce qu’est l’art, aurait-on fait de même pour Jaurès dans cette ville très socialiste… au nom de l’art ?

La ville de Nantes, dont la maire est socialiste, n’a pu que donner son autorisation à cette dégradation temporaire de l’image d’un grand serviteur de l’Etat. Je n’ai cependant pas trouvé l’expression d’une quelconque indignation du ministère de la défense, de la communauté militaire, légionnaire ou pas, des associations de la communauté de défense. Lorsqu’on n’est plus capable de défendre son patrimoine, on ne peut plus s’étonner de l’affaiblissement du sentiment national et de la présence croissante d’une mémoire historique sélective.

Une lueur d’espoir, peut-être. Il a fallu une forte polémique pour que l’histoire de France soit enfin privilégiée dans les programmes scolaires malgré les critiques par exemple du SNES-FSU, premier syndicat du second degré, qui avait  » globalement soutenu «  le premier projet, regrette désormais (Cf. Le Monde du 26 septembre 2015) que « des gages ont été donnés aux tenants d’une histoire scolaire à visée identitaire » (Cf. Mon avis dans Mon billet du 17 mai 2015, Enseignement de l’histoire et roman national).

Un peu d’histoire : qui était le général Mellinet ?

Le général Emile Mellinet est né le 1er juin 1798 à Nantes et y est mort le 20 janvier 1894. Il est le fils du général Anne-François Mellinet, général dans l’armée impériale puis dans celle de la restauration, avant de rejoindre l’armée belge après l’indépendance de ce pays en 1830.

Sous le Premier empire, son fils Emile rejoint en 1813 les gardes nationales d’active de la Loire-Inférieure. Il est sous-lieutenant breveté au 88e régiment d’infanterie de ligne en 1814. Sous la royauté, il est breveté capitaine le 11 août 1830 et participe à la Libération de Bruxelles.

En 1841, il rejoint l’Algérie. Rapidement distingué par le général Bugeaud, il est cité à plusieurs reprises. En 1842, le commandant Mellinet compte alors 28 ans de services, 3 campagnes, 3 blessures, 7 citations. Il gagne ses épaulettes de lieutenant-colonel au 41e Régiment d’Infanterie de Ligne. Promu au grade de colonel du 1er régiment étranger le 15 mars 1846, il prend ce commandement dans une Algérie en pleine insurrection. De 1846 à 1851, il fonde la garnison de Sidi Bel Abbes, berceau de la Légion étrangère (Cf. La Légion et son berceau à Sidi Bel Abbes).

Sous le second empire, le colonel Mellinet est admis en 1re section des officiers généraux avec le grade de général de brigade en 1850, puis de général de division en 1855. Il est blessé à Sébastopol en Crimée. Il commande la division d’infanterie de la Garde impériale en 1856. Il participe aux combats de la campagne d’Italie, a deux chevaux tués sous lui à Magenta en 1859, un aux combats de Ponte-Nuovo, Ponte-Vecchio et Buffalora.

Il est nommé Directeur des Musées Impériaux en 1861. Le 2 juin 1863, il est placé dans la section de réserve des officiers généraux. Il est alors nommé membre du Conseil de l’ordre de la Légion d’honneur et commandant supérieur des Gardes nationales de la Seine. Il est nommé sénateur le 15 mars 1865.

Il succède de 1865 à 1870 au général Bernard-Pierre Magnan comme grand maître au Grand Orient de France, la principale obédience maçonnique française.

Sous la IIIe République, il prend définitivement sa retraite à Nantes en 1878. Il devient l’une des figures les plus populaires de la vie locale, favorise l’épanouissement des Arts et Lettres, joue au théâtre de Compiègne. Passionné de musique, il contribue à l’organisation des musiques régimentaires et compose quelques morceaux. Bibliophile, il donne au ministère de la Guerre une importante collection d’ouvrages militaires et, à la bibliothèque de Nantes, un fonds précieux d’autographes. Il est enterré au cimetière Miséricorde de Nantes.

Un grand soldat et un grand serviteur de l’Etat bien mal reconnu et peu respecté à Nantes.

Général (2S) François CHAUVANCY
Général (2S) François CHAUVANCY
Saint-cyrien, breveté de l’École de guerre, docteur en sciences de l’information et de la communication (CELSA), titulaire d’un troisième cycle en relations internationales de la faculté de droit de Sceaux, le général (2S) François CHAUVANCY a servi dans l’armée de Terre au sein des unités blindées des troupes de marine. Il a quitté le service actif en 2014. Consultant géopolitique sur LCI depuis mars 2022 notamment sur l'Ukraine et sur la guerre à Gaza (octobre 2023), il est expert sur les questions de doctrine ayant trait à l’emploi des forces, les fonctions ayant trait à la formation des armées étrangères, la contre-insurrection et les opérations sur l’information. A ce titre, il a été responsable national de la France auprès de l’OTAN dans les groupes de travail sur la communication stratégique, les opérations sur l’information et les opérations psychologiques de 2005 à 2012. Depuis juillet 2023, il est rédacteur en chef de la revue trimestrielle Défense de l'Union des associations des auditeurs de l'Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale (IHEDN). Il a servi au Kosovo, en Albanie, en ex-Yougoslavie, au Kosovo, aux Émirats arabes unis, au Liban et à plusieurs reprises en République de Côte d’Ivoire où, sous l’uniforme ivoirien, il a notamment formé pendant deux ans dans ce cadre une partie des officiers de l’Afrique de l’ouest francophone. Il est chargé de cours sur les questions de défense et sur la stratégie d’influence et de propagande dans plusieurs universités. Il est l’auteur depuis 1988 de nombreux articles sur l’influence, la politique de défense, la stratégie, le militaire et la société civile. Coauteur ou auteur de différents ouvrages de stratégie et géopolitique., son dernier ouvrage traduit en anglais et en arabe a été publié en septembre 2018 sous le titre : « Blocus du Qatar : l’offensive manquée. Guerre de l’information, jeux d'influence, affrontement économique ». Il a reçu le Prix 2010 de la fondation Maréchal Leclerc pour l’ensemble des articles réalisés à cette époque. Il est consultant régulier depuis 2016 sur les questions militaires au Moyen-Orient auprès de Radio Méditerranée Internationale. Animateur du blog « Défense et Sécurité » sur le site du Monde à compter d'août 2011, il a rejoint en mai 2019 l’équipe de Theatrum Belli.
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