Le premier numéro numérique 2018 de « Soldats de France », magazine d’histoire militaire de l’Armée de terre, a été diffusé (Cf. Site de l’Armée de terre). Cette publication comble depuis 2017 une lacune importante : l’histoire militaire. La force d’une armée s’appuie sur son histoire qui crée ses traditions mais la prépare aussi à « faire face » avec la réflexion sur les expériences passées.
Histoire de l’Armée française
J’ai justement retrouvé dans ma bibliothèque un magnifique ouvrage du général Maxime Weygand (Cf. Biographie du général Weygand) intitulé « Histoire de l’Armée française ». Publié en 1938 dans un grand format aux éditions Flammarion, il est richement illustré avec pratiquement une photo ou un dessin sur chacune des 389 pages de l’ouvrage alors que bien souvent les illustrations sont plutôt rares aujourd’hui. J’y ai retrouvé les récits des batailles lues durant ma jeunesse. La bataille de Bouvines gagnée par Philippe Auguste en 1214 est sans aucun doute celle qui est restée gravée dans ma mémoire.
D’une plume alerte et avec un grand esprit de synthèse, le général Weygand, membre de l’Académie française, décrit l’évolution de l’Armée française jusqu’à la fin de la Première guerre mondiale dans une approche intégrée à notre histoire nationale, que ce soit par les guerres menées ou subies, ou dans les soubresauts internes de notre Nation. Stratégie, tactiques, armements nous sont décrits certes, avec parfois des mots ou des affirmations que nous n’oserions plus dire pour éviter tout contresens ou sans doute toute polémique. Cependant, le style de l’auteur de cet ouvrage écrit avant qu’il ne soit rappelé par le pouvoir politique en 1940 permet aussi de comprendre indirectement une partie de son comportement entre 1940 et 1944 au service du maréchal Pétain.
Paradoxe. Cet ouvrage a été édité à la veille de la Seconde guerre mondiale qui a vu la plus sévère défaite de l’histoire de notre pays. Il laissait aussi supposer la force invincible de l’Armée française après sa victoire de 1918. Nous connaissons la suite. Rien n’est jamais acquis et l’histoire critique contribue à la réflexion pour mieux anticiper et s’adapter aux nouvelles menaces. Il est vrai aussi que le général Weygand n’a jamais commandé de grandes unités ni même suivi les enseignements de l’Ecole de guerre. Lieutenant-colonel en 1914, affecté dès le début la guerre auprès du général Foch, il est nommé général de brigade en 1916, général de division en 1917, ce qui pourrait laisser rêveurs bien des officiers car la durée dans le grade permet aussi d’acquérir des compétences avant le grade suivant.
Cet ouvrage montre donc l’évolution de notre Armée dans une approche essentiellement terrestre. La Marine est effectivement peu présente dans cet ouvrage. Weygand regrette d’ailleurs qu’elle n’ait pas été suffisamment prise en considération par ceux qui ont régné ou gouverné dans notre histoire.
L’histoire militaire, révélatrice des qualités et des défauts de l’Armée
Cependant, les défauts et les qualités de l’Armée y apparaissent d’une manière récurrente au cours des siècles, ce qui ne manque pas d’interroger sur leurs causes. Un invariant semble apparaître avec ce besoin finalement d’être mise en échec pour se relever et surtout en être capable. Ce qu’on appellerait « résilience » aujourd’hui est aussi un bon prétexte pour affirmer que « nous nous en sortirons toujours », arrogance ou optimisme persistant, mais aussi toujours ces manques de moyens, situation qui ne s’est pas démentie au moins jusqu’en 2017… On fait « avec » même si on a peu ou pas tout ! Le soldat quelle que soit son armée d’appartenance fait face pour remplir la mission.
Sans identifier la part prise par chacun, formation, recrutement, esprit de corps, traditions plusieurs fois centenaires parfois, cet ensemble est ce qui fait sa force et conduit souvent à l’héroïsme dans des combats qui semblent perdus d’avance. Le numéro 5 de Soldat de France montre d’ailleurs cette force morale des Français dans la re-création de l’Armée française pour la libération de la France en 1944 (Cf. Soldats de France n°5)
L’histoire militaire est donc essentielle et ce renouveau est une action positive pour montrer que les armées ont un passé lié à la France, qu’elles peuvent en être fières. Les faits d’armes y contribuent que ce soit dans la victoire ou la défaite notamment au profit de la formation morale du soldat. L’Armée de terre a donc mis cette connaissance à la disposition de tous, civils compris, sous la houlette du lieutenant-colonel Portes, historien militaire reconnu.
Cela donne l’opportunité de citer les sites officiels du ministère des armées consacrés à l’histoire militaire :
- armée de Terre (Cf. Armée de terre et patrimoine)
- Marine (Cf. Histoire de la Marine nationale)
- armée de l’Air (Cf. Histoire de l’Armée de l’air)
- Gendarmerie (Cf. La gendarmerie de sa naissance à aujourd’hui).
Construire l’Armée de terre de nos besoins dans ce monde qui vient
Cependant se référer à l’histoire ne suffit pas car elle se répète très rarement. La construction de l’Armée de terre, sinon sa reconstruction est en cours pour répondre aux menaces.
Poursuivant notre réflexion sur l’évolution de l’Armée de terre, un document de l’IFRI de février 2018 sur le rôle stratégique des forces terrestres (Cf. Le rôle stratégique des forces terrestres) évoque les forces terrestres qui n’englobent certes pas uniquement l’Armée de terre. Le contrôle de l’espace terrestre reste une nécessité de toute stratégie sinon de souveraineté nationale mais l’Armée de terre y retrouve comme hier cette responsabilité qui fait d’elle le premier rempart de notre sécurité.
La lecture de cette étude peut aussi être complétée par celle du même auteur sur l’opération Sentinelle (Cf. La Sentinelle égarée ? L’Armée de terre face au terrorisme) qui montre l’évolution de l’Armée de terre en particulier dans ses missions du XXIe siècle et sur sa place dans l’organisation de la sécurité sur le territoire national.
Pour conclure, il n’en reste pas moins qu’une continuité se dessine à travers l’approche historique évoquée et notre période contemporaine. « La France fut faite à coups d’épée » comme l’écrivait le général De Gaulle dans « La France et son armée » en 1938. Il n’est pas certain que cette citation soit obsolète.