Oserai-je dire que Serval efface Drakkar car l’ennemi était similaire ? Oui sans que cela ne supprime ce devoir de mémoire envers nos camarades.
Trente ans déjà en effet que que 58 parachutistes ont été assassinés dans un attentat au Liban le 23 octobre 1983 (Cf. Intervention du 23 octobre 2012 de Bruno Racouchot sur Theatrum Belli), peu de temps après un autre attentat qui avait coûté la vie à 241 Marines. Attribué au Hezbollah, avec un doute sur la participation de la Syrie, il avait suscité une frappe aérienne française symbolique sur le Hezbollah (cf. Mon billet du 1er septembre 2013, « Réflexions sur les armées et guerre en Syrie »), bien peu crédible avec la mort d’un berger et quelques chèvres.
Cette commémoration, ou ce devoir de mémoire, se déroule aujourd’hui dans le contexte de la guerre civile en Syrie, des troubles au Liban et de l’engagement de 800 Casques bleus français, (cf. CDEF, l’armée de terre française et les opérations des Nations unies). En fond de tableau, le rôle militaire et terroriste du Hezbollah est toujours important dans cette région du Moyen-Orient en permanence à la limite de l’explosion, dans le contexte renouvelé d’une alliance plus ou moins sincère entre les Etats-Unis et la France.
Un long article du Monde a été consacré aux survivants du Drakkar dans le Monde Magazine du 19 septembre 2013. Il y a été mis en exergue la difficile réinsertion de ces soldats parachutistes. Il y a été mis surtout en avant qu’il s’agissait de volontaires et non d’engagés, oubliant aussi les cadres d’active qui les encadraient. J’en connaissais un certain nombre, le lieutenant de La Batie, qui a donné son nom à une promotion d’élèves-officiers de l’EMIA en 2007, l’adjudant-chef Marie-Magdeleine et bien d’autres, car cette unité de parachutistes était en mission de six mois avec nous un an auparavant, à l’été 1982, au sein du 420ème détachement de soutien logistique de la Finul.
Cet article que je vous invite à lire met surtout en avant la problématique des chocs post-traumatiques que les armées françaises ont redécouverts avec l’Afghanistan. Des études françaises récentes ont mesuré une proportion de 7% de soldats atteints de blessures psychiques. Dans certaines unités combattantes, les chiffres peuvent toutefois monter à 100% suite à un incident majeur comme l’explosion d’un véhicule en tête d’une patrouille en Afghanistan avec des effets sur l’ensemble de l’unité. En 2011, un rapport médical de l’armée de terre américaine révélait que 12% des troupes déployées en Irak et 17% de celles servant en Afghanistan absorbaient régulièrement antidépresseurs et somnifères.
La France ne reconnaît que depuis 1992, l’existence de la « névrose de guerre » comme donnant droit à une pension militaire d’invalidité. Tous les services de psychiatrie des hôpitaux militaires sont formés à cette pathologie. Dans les unités françaises, il existe des « officiers d’environnement humain » depuis 1995 (dans les textes uniquement pendant très longtemps) et des « cellules d’intervention et de soutien psychologique » (Cispat). Il a fallu cependant attendre le bombardement de Bouaké en Côte d’Ivoire en 2004 (neuf tués) puis la mort de dix soldats en 2008 à Uzbin, en Afghanistan pour provoquer une prise de conscience, et non Drakkar.
Un effort reste donc à faire pour inciter les soldats victimes de ces blessures invisibles à venir consulter. Un numéro vert a été mis en place par le ministère de la défense pour permettre aux anciens militaires qui connaîtraient des troubles après leur départ de l’armée. J’espère que ces anciens soldats de Drakkar retrouvés par le journaliste du Monde connaissent cette possibilité et qu’à défaut les autorités militaires prendront le contact avec eux si cela n’est pas déjà fait.
Il y a t’il des lorrains parmi les 58 camarades au drakkar
Cordialement
Président de UNC l’arrondissement de Saint Avold
Président des Anciens Combattants de Ham sous Varsberg