Louis Henri Félix de Cazenave, né le 16 octobre 1897 à Saint-Georges-d’Aurac (Haute-Loire) et mort le 20 janvier 2008 à Brioude.
En 1916, il quitte à 19 ans son village natal où sa mère est receveuse des postes. Le jeune soldat est affecté au 22e RIC, puis au 5e BTS, période qu’il décrit par : « Forcément on ne nous mettait pas dans les endroits les plus calmes. »
En avril 1917, il est envoyé au chemin des Dames. Il y participe à la terrible offensive lancée par le général Nivelle, qui remplace le maréchal Joffre à la tête de l’État-major français depuis décembre 1916. Les moyens militaires français se montrent rapidement insuffisants face à une armée allemande bien préparée et embusquée dans les côtes de la vallée de l’Aisne.
Il témoigne : « Il faut avoir entendu les blessés entre les lignes. Ils appelaient leur mère, suppliaient qu’on les achève. C’était une chose horrible. Les Allemands on les retrouvait quand on allait chercher de l’eau au puits. On discutait. Ils étaient comme nous, ils en avaient assez. »
Il a le souvenir de veiller dans les tranchées nuit et jour et il n’a pas oublié la chanson de Craonne. Durant l’année 1917, il raconte : « Nous avions fraternisé mais quand c’est arrivé aux oreilles de l’État-major, il a ordonné une attaque. »
Puis il est muté dans l’artillerie en septembre 1917 : « Là ce n’était pas comparable. » Titulaire d’une citation, il est décoré de la Croix de guerre en 1918. Le canonnier de Cazenave est démobilisé en septembre 1919. Il reçoit la carte du Combattant en 1930.
À la fin de la guerre, il revient dans la Haute-Loire et entre aux chemins de fer en 1919. Il épouse en 1920 Marie, receveuse des postes, qui met au monde trois fils auxquels il ne parlera jamais de ce qu’il a vécu dans les tranchées. Il s’installe en 1927 à Brioude avec sa famille.
Pacifiste convaincu, il participe aux grèves de 1936 et s’abonne à La Patrie humaine, un journal libertaire. Fin 1941, il est arrêté par la police de Vichy et emprisonné quelques semaines. Selon son fils, « Il n’était pas d’accord avec le régime de Pétain » et fut mis en retraite d’office.
Pendant longtemps, il a d’ailleurs refusé la Légion d’honneur qu’il devait finalement recevoir en novembre 1995, à la demande des anciens combattants.
En novembre 2007, il est l’un des deux derniers poilus encore en vie, avec Lazare Ponticelli. Comme ce dernier, il décline des obsèques nationales. En 2005, le Haut conseil de la mémoire combattante, présidé par le président de la République (alors Jacques Chirac), avait en effet décidé que des obsèques de portée nationale seraient organisées pour le dernier combattant de 14-18 et que celui-ci serait enterré au Panthéon. À ce propos, il répondit sans hésitation : « Non je veux aller avec les miens, avec ma famille au cimetière de Saint-Georges-d’Aurac. Je veux la simplicité. »