Christophe Dickès avait reçu au micro de Canal Académie Ernst Nolte (1923-2016), historien des idéologies plutôt que des idées. Tour d’horizon d’une carrière controversée mais non moins brillante.
Né à Witten (ouest), Ernst Nolte a longtemps enseigné à l’Université libre de Berlin. Parmi ses ouvrages les plus renommés figurent « le fascisme dans son époque » une analyse de la nature du fascisme grâce à laquelle il se fait connaître au début des années 60, et « La guerre civile européenne – national-socialisme et bolchevisme (1917-1945) », paru à la fin des années 80.
En 1963, Ernst Nolte, philosophe de formation, fait irruption dans le champ de l’histoire contemporaine en publiant un ouvrage monumental, Le Fascisme dans son époque. Il voit dans l’émergence du fascisme le fruit d’un enchaînement dialectique : une double réaction de type révolutionnaire face au système libéral et démocratique et, surtout, face au mouvement marxiste incarné à partir de novembre 1917 par la révolution bolchevique.
L’historien philosophe cherche à comprendre les deux phénomènes typiques du XXe siècle que sont le communisme et le fascisme. L’une des grandes originalités de sa démarche est l’attention qu’il porte à l’histoire des idéologies, ensembles d’idées qui traduisent des « émotions fondamentales » et peuvent mettre en mouvement des populations entières. Ces émotions fondamentales – peur, haine, mépris, colère, mais aussi enthousiasme, espoir, foi –, François Furet les nommait « passions » et a montré leur importance. Nolte n’est pas un historien des idées, mais des idéologies vécues par leurs adeptes comme des religions séculières se livrant à une surenchère permanente dans les promesses de bonheur.
Stéphane COURTOIS