vendredi 19 avril 2024

Guerre en Ukraine : pourquoi l’élite russe admet-elle soudainement les défaites de son armée

À toutes fins utiles, mes interventions du jeudi 6 octobre et du samedi 8 octobre, ainsi que ma contribution à un article du Figaro de ce 8 octobre 2022 après ces quelques lignes.

https://www.tf1info.fr/replay-lci/video-lci-midi-week-end-du-8-octobre-2022-2234809.html

https://www.tf1info.fr/replay-lci/video-le-club-le-chatelier-du-jeudi-6-octobre-2234585.html

Je me permettrais de faire néanmoins un commentaire sur la situation énergétique française actuelle qui ne peut être dissociée de la guerre en Ukraine.

La CGT, ancien (peut-être) soutien du parti communiste français, lui-même ancien (peut-être) avatar du parti communiste soviétique, bref russe, nuit au bon fonctionnement de la société française en prenant en otage cette semaine l’accès à l’énergie.

Hier la CGT combattait l’engagement des armées françaises que ce soit en Indochine ou la première guerre du Golfe. Alors, la CGT, agent de l’étranger sous couvert du syndicalisme ?

La coïncidence est étrange compte tenu du conflit actuel en Ukraine mais je peux me tromper. À analyser mais que les adhérents de la CGT prennent conscience du chemin que leur fait prendre leur direction générale.

Que se passerait-il si la guerre en Ukraine s’aggravait ? Juste une question qui mérite cependant que nous nous y intéressions notamment sur la place d’organisations nationales, y compris syndicales.

Ma contribution dans le Figaro du samedi 8 octobre 2O22

https://www.lefigaro.fr/international/guerre-en-ukraine-pourquoi-l-elite-russe-admet-elle-soudainement-les-defaites-de-son-armee-20221007

Par (Publié le 07/10/2022 à 19:49,

DÉCRYPTAGE – Alors que l’armée ukrainienne reprend du terrain, des proches du Kremlin dénoncent et critiquent publiquement les stratégies militaires russes. Dissidence ou manipulation ?

Réelle dissidence ou énième jeu de dupes piloté par le Kremlin ? Les critiques d’élites russes conspuant les généraux et leurs stratégies sur le champ de bataille se multiplient depuis plusieurs jours, à la faveur de tonitruantes défaites en Ukraine.

Alors que la ville clé de Lyman, dans la région de Donetsk, a été reprise et que les forces ukrainiennes progressent dans le Sud et le Nord-Est, un haut responsable parlementaire russe a appelé l’armée à « arrêter de mentir » : « Les gens savent. Notre peuple n’est pas stupide. Et il voit qu’on ne veut pas lui dire ne serait-ce qu’une partie de la vérité. Cela peut entraîner une perte de crédibilité », a ainsi déclaré à la télévision mercredi 5 octobre Andreï Kartapolov, député à la tête de la Commission de défense de la Douma, la chambre basse du Parlement, et ancien commandant militaire.

Même son de cloche chez Alexandre Kots, le reporter de guerre star du journal pro-Kremlin Komsomolskaïa Pravda, qui a prévenu ces derniers jours qu’il « n’y aura(it) pas de bonnes nouvelles (du front) dans un avenir proche ». Le très regardé et ultra-patriotique Vladimir Soloviov, présentateur sur la télévision d’État Rossiya 1, a également déclaré à l’antenne ne pas s’attendre « à de bonnes nouvelles. On a besoin d’une volonté forte et d’une patience stratégique ».

Le brutal dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov a même appelé à utiliser « des armes nucléaires de faible puissance » en Ukraine, après le retrait des Russes de Lyman. « Il faut mener l’“opération militaire spéciale” au sens plein du terme, et non s’amuser à jouer », a-t-il raillé, tout en critiquant le responsable des opérations militaires à Lyman, jugeant que celui-ci n’avait pas fourni « les communications » et les «munitions nécessaires » aux soldats engagés. « Si cela ne tenait qu’à moi, je le rétrograderais, je le priverais de ses récompenses et je l’enverrais au front, avec une mitrailleuse à la main, afin qu’il lave sa honte au prix du sang », a-t-il enragé.

Des dires salués par Evguéni Prigojine, oligarque fondateur du groupe paramilitaire Wagner, qui a déclaré : « Qu’on envoie tous ces salauds au front, avec des mitrailleuses et les pieds nus ! » Les sévères propos de Ramzan Kadyrov ne l’ont en tout cas pas empêché d’être promu, mercredi, au grade de colonel-général par Vladimir Poutine…

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L’élite place-t-elle ses pions en vue d’un « effondrement » ?

Ces critiques sont d’autant plus surprenantes qu’elles surviennent à la suite de sept mois de propagande — où le pouvoir russe n’a eu de cesse de communiquer sur de prétendues prises « libératrices », malgré les difficultés de l’armée — et quelques jours seulement après un décret d’annexion signé par Vladimir Poutine concernant quatre régions d’Ukraine. Que se passe-t-il au sein de l’élite russe ? Assiste-t-on à un délitement, alors que l’hypothèse d’une défaite militaire n’est plus à écarter ?

Interrogés par Le Figaro, Dimitri Minic, chercheur spécialiste de la Russie à l’Institut français des relations internationales, et François Chauvancy, général (2S) et consultant en géopolitique, veulent y croire, pointant du doigt les velléités personnelles des proches du pouvoir, à l’heure d’une hypothétique révolte contre Poutine en cas de retrait militaire. « Le cas du député Kartapolov est intéressant : son intervention sur les ondes d’un propagandiste important proche du Kremlin vise directement le ministère de la Défense et l’armée russe », indique Dimitri MinicCet ancien général a d’ailleurs été démis de ses fonctions militaires pour devenir parlementaire un an jour pour jour avant sa déclaration, le 5 octobre 2021, signe d’une potentielle vengeance.

Kadyrov de son côté, devenu incontournable aux yeux de Moscou, « anticipe peut-être déjà une défaite et l’effondrement de la Fédération de Russie pour garantir à la Tchétchénie une belle place dans le nouvel ordre russe», prévoit François Chauvancy.

« Le Kremlin craint une déstabilisation de la Fédération de Russie par ses sujets les plus instables, dont font partie les Tchétchènes. »

Dimitri Minic, chercheur spécialiste de la Russie à l’Institut français des relations internationales (Ifri).

Mais alors, comment expliquer que le dirigeant tchétchène ait été promu colonel-général par Vladimir Poutine, quelques jours seulement après ses critiques ? Pour Dimitri Minic, « c’est le signe que le Kremlin n’est plus en mesure de contraindre ses sujets » autrement qu’en leur versant des pots-de-vin, et que Moscou « craint une potentielle déstabilisation de la Fédération par l’une de ses régions les plus instables, à savoir la Tchétchénie ». Le théoricien ultranationaliste Alexandre Douguine, dont la fille a été tuée dans l’explosion d’une voitures’est d’ailleurs enthousiasmé des propos de Kadyrov et Prigojine, les présentant sur un réseau social comme de « véritables héros et leaders de la guerre de notre peuple ».

L’Institute for the Study of War, groupe de réflexion américain réputé, estime en tout cas que les remarques du tchétchène et de l’oligarque « ont brisé le récit du Kremlin qui tentait d’atténuer le coup de la défaite autour de Lyman (…) Leurs propos ont probablement sapé le leadership de Vladimir Poutine, peut-être par inadvertance ».

Des critiques murmurées par le Kremlin ?

Mais faire du Kremlin la victime de ces discours dissonants serait oublier sa capacité de manipulation. François Chauvancy, aussi docteur en sciences de l’information et de la communication, ne croit d’abord pas à l’émergence d’une dissidence au sein des élites. « Les élites dissidentes, elles se sont enfuies, et n’ont plus de pouvoir interne au régime », relate-t-il. « N’oublions pas que, depuis plusieurs mois, une vingtaine d’oligarques ont été victimes d’accidents. En termes de probabilité, c’est énorme », ironise le général.

Ce dernier émet plutôt l’hypothèse d’un discours soufflé par les équipes de Moscou. Avec pour intérêt celui de dédouaner Poutine de tout échec militaire, et d’accuser les généraux sur le terrain. « Et si Kadyrov exprimait ce que Poutine ne veut pas exposer sur la place publique, et qu’il a été promu pour cela ? », s’interroge le général. « Ces critiques ouvertes pourraient effectivement émaner d’un pilotage du Kremlin, qui cherche à se dédouaner des défaites en Ukraine », explique Dimitri Minic.

Faisant du seigneur de guerre tchétchène un pantin, le maître du Kremlin préparerait l’opinion publique à un durcissement du conflit, avec l’usage éventuel d’une arme nucléaire. « Vladimir Poutine a justifié l’invasion en présentant les Russes dans le Donbass comme des agressés, continue François Chauvancy. Avec cette nouvelle rhétorique défaitiste, Poutine ferait des Russes les victimes de l’Otan, désigné coupable des récentes pertes »Le président russe chercherait alors à ce que le peuple soutienne un effort de guerre plus intense, capable de rivaliser avec les armes livrées par l’Occident.

Les discours alarmistes des médias d’État iraient également en ce sens, bien qu’il ne soit pas exclu que les « journalistes » y officiant soient encore plus extrêmes que Vladimir Poutine. Pour Dimitri Minic, la presse et la télévision pro-Kremlin, « très appréciées du public », seraient suffisamment libres pour « essayer de faire pression » sur les dirigeants russes, « jugés timorés », et les inciter à aggraver le conflit.

Toujours est-il que rallier la majorité de l’opinion publique à la cause nationaliste ne sera pas une mince affaire. Pour la première fois depuis le début de la guerre, Vladimir Poutine a perdu en popularité la semaine dernière, selon un sondage. En cause, la mobilisation partielle annoncée par le président russe. « En refusant longtemps de déclarer la mobilisation, Poutine était paradoxalement peut-être plus lucide que quiconque sur l’état de la société russe, qui n’était pas prête à cette guerre », reprend Dimitri Minic. Le sera-t-elle un jour ? « Avec ces critiques d’élites, les Russes ont surtout l’impression qu’on les prépare à une défaite totale », résume François Chauvancy.

Général (2S) François CHAUVANCY
Général (2S) François CHAUVANCY
Saint-cyrien, breveté de l’École de guerre, docteur en sciences de l’information et de la communication (CELSA), titulaire d’un troisième cycle en relations internationales de la faculté de droit de Sceaux, le général (2S) François CHAUVANCY a servi dans l’armée de Terre au sein des unités blindées des troupes de marine. Il a quitté le service actif en 2014. Consultant géopolitique sur LCI depuis mars 2022 notamment sur l'Ukraine et sur la guerre à Gaza (octobre 2023), il est expert sur les questions de doctrine ayant trait à l’emploi des forces, les fonctions ayant trait à la formation des armées étrangères, la contre-insurrection et les opérations sur l’information. A ce titre, il a été responsable national de la France auprès de l’OTAN dans les groupes de travail sur la communication stratégique, les opérations sur l’information et les opérations psychologiques de 2005 à 2012. Depuis juillet 2023, il est rédacteur en chef de la revue trimestrielle Défense de l'Union des associations des auditeurs de l'Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale (IHEDN). Il a servi au Kosovo, en Albanie, en ex-Yougoslavie, au Kosovo, aux Émirats arabes unis, au Liban et à plusieurs reprises en République de Côte d’Ivoire où, sous l’uniforme ivoirien, il a notamment formé pendant deux ans dans ce cadre une partie des officiers de l’Afrique de l’ouest francophone. Il est chargé de cours sur les questions de défense et sur la stratégie d’influence et de propagande dans plusieurs universités. Il est l’auteur depuis 1988 de nombreux articles sur l’influence, la politique de défense, la stratégie, le militaire et la société civile. Coauteur ou auteur de différents ouvrages de stratégie et géopolitique., son dernier ouvrage traduit en anglais et en arabe a été publié en septembre 2018 sous le titre : « Blocus du Qatar : l’offensive manquée. Guerre de l’information, jeux d'influence, affrontement économique ». Il a reçu le Prix 2010 de la fondation Maréchal Leclerc pour l’ensemble des articles réalisés à cette époque. Il est consultant régulier depuis 2016 sur les questions militaires au Moyen-Orient auprès de Radio Méditerranée Internationale. Animateur du blog « Défense et Sécurité » sur le site du Monde à compter d'août 2011, il a rejoint en mai 2019 l’équipe de Theatrum Belli.
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2 Commentaires

  1. Sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2, camion d’explosifs contre le pont de Crimée, les USA jouent à tester jusqu’où ils peuvent aller trop loin, avec le calcul que la Russie ira trop loin. Et que sa défaite finale leur laissera les mains libres pour traiter leur problème chinois.

    S’agissant des gazoducs, le calcul est simple : les Européens et surtout l’Allemagne sont maintenant condamnés à l’escalade avec la Russie. Celle-ci doit être vaincue au plus vite sous peine de catastrophe économique à court terme. Un accommodement n’est plus possible techniquement. Admettons que la CGT agisse dans l’intérêt de l’URSS – pardon, de la Russie – les USA font beaucoup plus fort. Leur idée est que la guerre en direct est trop coûteuse et qu’il vaut mieux trouver des alliés, complaisants ou forcés, qui la fassent à votre place sur le terrain. Pour les Ukrainiens, c’est fait. Pour les pays de l’UE, la montée en puissance de leur effort de guerre est rendu inévitable. Avec envoi de troupes en Ukraine, plus ou moins discrètement.

    Vers la troisième guerre mondiale pour ne pas avoir laissé une autonomie aux provinces russophones d’Ukraine. Du délire ! Les Allemands – premiers concernés – savent mais n’osent rien dire. la blague qui court est qu’Olaf ne veut pas finir comme Olof.

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