Jusques à quand dormirez-vous, ô jeunes hommes ?
Quand aurez-vous au cœur le goût de réagir ?
Quand cesserez-vous donc sans en avoir de honte
D’offrir à l’étranger la vue de vos plaisirs ?
Vous croyez que la paix règne sur votre terre,
Et la guerre pourtant la serre toute entière.
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Que chacun en mourant, frappe ses coups derniers !
Il est beau qu’un soldat lutte, c’est son honneur,
Pour le sol, les enfants et la femme épousée,
Contre ses agresseurs.
La mort viendra, au jour par les destins fixés :
Jusque-là que chacun, debout, la lance haute,
Marche le cœur vaillant dessous le bouclier,
A l’heure où la mêlée commence pour les hommes.
Car l’homme n’est pas né pour éviter la mort,
Eût-il du sang des dieux dans ses veines encor.
Souvent celui qui fuit la bataille et la lance
S’est heurté à la mort en revenant chez lui,
Et du peuple a perdu et l’estime et l’appui ;
Mais lorsque le héros a connu la souffrance,
De la foule aux plus grands chacun pleure sur lui :
Pour la patrie sa mort est le plus rude coup,
Sa vie a des honneurs dignes d’un demi-dieu,
Il est comme une tour dressée devant les yeux,
Car il a fait tout seul le labeur de beaucoup.
Callinos
Traduit du grec par Robert Brasillach.
Callinos, qui vivait vraisemblablement à Ephèse dans la première moitié du VIIe siècle avant J.-C., est considéré comme un des initiateurs de l’élégie politique et le maître de Tyrtée.