L’offensive russe se poursuit en Ukraine, avec peu de progression sur la carte, mais cela ne signifie pas pour autant qu’elle soit en échec. L’offensive semble un peu mieux planifiée que l’intervention du 24 février (même si, vu les délais, on reste dans l’improvisation). Or une offensive organisée face à un adversaire fortifié passe une phase de « shaping », c’est à dire de « modelage » du champ de bataille. L’attaquant ne se limite pas à un affaiblissement des forces adverses par des tirs, mais est censé « organiser » une situation qui sera favorable à une phase plus mobile qui lui permettra d’atteindre ses objectifs prioritaires, censés être liés au centre de gravité adverse.
En l’occurrence, on voit que l’armée russe lance ses attaques dans plusieurs zones et fait de timides mais réels progrès sur le terrain. Bien entendu, les Ukrainiens s’accrochent avec beaucoup de détermination et les pertes russes sont lourdes. Difficile de savoir à ce stade si ce « shaping » russe qui mobilise 2 500 pièces d’artillerie et plus de 80 bataillons tactiques sera couronné de succès. On voit que les Russes cherchent des zones où insérer des éléments plus mobiles et veulent mettre le ravitaillement ukrainien en difficulté. On peut imaginer aussi qu’ils souhaitent contraindre les défenseurs à s’éparpiller. Toute la zone autour de Sloviansk est difficile, avec emprises urbaines, fleuves, bois et collines.
Alors que les Ukrainiens concentrent leurs efforts mobiles sur le dégagement de Kharkiv et la menace des axes de ravitaillement adverses (1), la poussée russe en Donbass se fait sur trois axes : depuis Izyum, des éléments de la 20e armée ont atteint les abords de Barvinkove (2), à plus de 40 km d’Izyum. S’ils prennent la ville de 8 000 habitants, ils couperont la ligne de chemin de fer et la route qui ravitaillent Slovyansk.
Plus à l’est, la 41e armée a pris Kreminna (3) et la 2e pousse vers Lyman, à l’autre bout de la ligne. On voit toujours que la progression se fait le long des voies ferrées et des routes. Une « poche » possible se dessine entre ces deux poussées, au nord de Sloviansk. Les Russes ont intérêt à créer de petites poches : elles seront plus étanches vu leurs faibles effectifs et plus faciles à réduire par l’artillerie.
Depuis les territoires séparatistes l’avancée de la troisième pointe est faible (4) en dehors Popasna. Les défenses locales tiennent bon.
Plus à l’ouest (5), les 5e et 58e armées lancent des efforts en direction de Huliaipole. Il est possible que la ligne « Donetsk — Zaporijia » soit un objectif de campagne, même si l’assaut de cette dernière ville presque deux fois grande comme Marioupol semble hors de portée.
Autour de Kherson (7), la 49e armée a lancé des efforts pour mieux contrôler la zone au sud de Kryvyi Rih, mais sans succès. Les effectifs russes dans la zone sont toujours insuffisants pour autre chose.
Cette phase devrait continuer un jour ou deux…
Ukraine 25 avril : l’armée russe toujours en phase de « shaping » dans le Donbass ?
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Un texte qui reste tendancieux. Il semble que les défenses Ukrainiennes sont littéralement écrasées d’obus et de bombes Russes. C’une démarche tactique traditionnelle des guerres à haute intensité depuis 14-18. De plus concentrer des forces pour percer le front en entreprenant un encerclement de l’adversaire est tout autant un classique du genre.
Tout cela dénommé un shaping pour faire smart.
Les pertes Russes sont lourdes. Sans doute mais quid de celles des Ukrainiens ?
Trois commentaires :
1) on peut s’interroger sur l’état des sols: sont ils toujours aussi boueux, ou bien en voie d’amélioration ?
2) une fois la ligne de chemin de fer et la grande route menant à l’Est coupées, est-ce que l’encerclement est réalisé ou non ?
3) l’armée Ukrainienne est encadrée par des ultranationalistes autoritaires qui sans doute motivent par force des troupes qui pourraient se démoraliser. Envisage-t-on un effondrement moral (celui anticipé à tort au début de la guerre) ou pas du tout ?